Cameroun: quand le « pilotage automatique » ne dérange plus personne

 

Cameroun : quand le  « pilotage automatique »  ne dérange plus personne ::CameroonIl ya environs deux ans, le ministre Issa Tchiroma Bakary répondait aux journalistes lors d’une conférence de presse en ces termes : «  le président est quelque part et il travaille ». Il ajoutait : « qu’importe là ou il se trouve, le président Paul Biya est au service du peuple camerounais, et à tout moment ! ». Propos anodins de la part de celui qui est passé maître dans l’art du ridicule et de la profanation de la vérité et par là même, de l’histoire de ce Cameroun qui nous appartient tous et que nous allons tous laisser après notre mort.  Ce qui me marqua personnellement ce jour là, c’est le zèle avec lequel monsieur Tchiroma répondait aux journalistes. 

Pauvre Issa qui  ne semblait rien maîtriser du tout. Le président du FNSC ne savait rien de la situation du chef de l’Etat et encore moins de son calendrier. Mais puisqu’il fallait fredonner une vérité officielle,  notre ministre a bruyamment tambouriné…la caravane est passé, le film a continué. 

Bruxelle, sommet Union européenne-Afrique le 1er avril 2014. Le chef de l’Etat s’évanouit dans la nature après les travaux et (ré) apparaît à Rome le 25 du même mois. Où était le chef de l’Etat ? Pourquoi ce silence autour de sa personne ? Et bien sur tout le monde semble couaque sur cette situation qui a alterné pendant presque trente ans en faisant dire à certain que Paul Biya était en séjour au Cameroun. Voici ce qui  révolte : 

Un ministre arrêté en fonction- et libéré le lendemain-, un citoyen mourant pour défendre une cause à la quelle la majorité des camerounais se sentent solidaire à distance (ou dans les photos-publicité). Les communications du chef de l’Etat au Cameroun sont rares, voire inexistantes. Toutefois  sa présence  à l’intérieur de nos frontières donne une sensation de sécurité à la quelle nous préférons tous adhérer,  si ce n’est en fin de compte par solidarité à nos milliards de francs qui s’envolent ainsi. Le président peut confier au soin de ses collaborateurs des dossiers importants, ou il peut être tenu informé et temps et en heure de ce qui se passe au Cameroun. De cette manière, il peut alors intervenir par les multiples moyens de communications dont dispose notre siècle électronique. 

 

Un tweet, un sms, une vidéo conférence…le Cameroun en est arrivé là, à l’e-gouvernance ! 22 millions de personnes, 10 régions,  combien de communes ? Combien de ministères ? Combien de programmes qui attendent les financements dont la disponibilité dépend de la présence du chef de l’Etat ? Quand on sait à quel point le président de la république concentre dans sa personne des pouvoirs et des prérogatives, on ne peut que se démaquer jusqu’où le pays est ainsi paralyser par ce pilotage automatique. Même le RDPC se confond dans cette situation. 

Dans un pays où l’essentiel de la classe politique est concentré dans un camp, les partis d’opposition n’arrivent pas à saisir pareille occasion pour être présent dans l’espace public. Toute génération et de tout bord, on se contente d’attendre la veille des élections pour se réveiller miraculeusement. Amateurisme, charlatanisme politique !
Dans tous les pays sérieux du monde, la gouvernance manuelle est une option largement partagé. 

Même Mugabe y a souscrit. La seconde nature de notre « nomgui » est telle qu’on ne peut que se contenter de constater cette situation avec regret. D’autant plus que son herméneutisme ne facilite pas beaucoup les choses. Si d’aventure une personne tierce se trouvait dans la situation actuelle, vivement que pareille gestes  soit  réduit à leur fraction minimale. Et surtout que le peuple y veillât, parce que  quand on est un chef de l’Etat, on veille, on surveille, et on réveille, sans répit !

 

© Correspondance de : Edmond François Ngagoum


28/04/2014
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