Cameroun: Message de la Plate-Forme au Secrétaire Général de l'ONU sur la prochaine élection présidentielle de 2011 au Cameroun
La Plate Forme de la Société Civile pour la Démocratie au Cameroun, (la Plate Forme),par le biais de son Porte parole, a l’honneur de vous adresser ses compliments en cette 2ème Journée Internationale pour la Démocratie. La Plate-Forme a bien voulu saisir cette occasion pour adresser à votre auguste Institution ce message qui, de part sa motivation, son enjeu et la dernière actualité liée à Elections Cameroon (ELECAM), s’avère être d’une importance capitale pour l’avenir politique et démocratique du Cameroun. Au moment où la Communauté Internationale célèbre la 2ème Journée Internationale de la Démocratie, il est impérieux que la Plate Forme, qui œuvre exclusivement dans le domaine de la démocratie, et particulièrement pour une ALTERNANCE DANS LA PAIX ET PAR LES URNES au Cameroun, prenne acte de la visite officielle de la mission d’évaluation des Nations Unies au Cameroun et surtout, attire l’attention de l’ONU sur les risques qui pèsent sur la stabilité au Cameroun à l’horizon 2011 où l’élection présidentielle est attendue.
En effet, au regard de l’incongruité de l’encadrement juridique électoral, au regard du comportement de plus en plus ambigu de certains acteurs politiques, au regard des enjeux déterminés par des facteurs aussi bien endogènes qu’exogènes, au regard des rapports de forces biaisés par une trop grande implication des réseaux plus ou moins mafieux dans l’évolution du jeu politique national, nous avons des fortes raisons de penser que le pays risque de basculer dans un réel trouble et même une instabilité dangereuse à l’horizon 2011. La mise en commun des éléments conjoncturels, structurels et même factuels ne rassure guère quant à l’impartialité et la transparence qui doivent encadrer le processus électoral tel qu’exigé dans toute démocratie qui se respecte. Dans ce domaine électoral, les lois et autres dispositions législatives et règlementaires en vigueur au Cameroun ne garantissent, ni une impartialité de l’organe en charge des questions électorales en l’occurrence ELECAM, ni une implication légale des acteurs en compétition, ni la transparence véritable de la future consultation compte tenu des différentes pesanteurs qui entrent en jeu dans le processus électoral camerounais.
L’ONU doit prévenir la paix et écouter toutes les parties prenantes à la prochaine élection présidentielle de 2011.
Il est nécessaire de souligner la détermination d’une partie des acteurs politiques camerounais qui à tort ou à raison, ne croyant plus à la possibilité d’une alternance par les urnes et dans la paix au Cameroun, envisage sérieusement et ouvertement d’autres options de prises du pouvoir par des moyens non démocratiques que la Plate-Forme condamne par ailleurs. Il ne faut donc pas que les tenants actuels du pouvoir favorisent consciemment ou inconsciemment les conditions d’instabilité future.
La Plate Forme, créée dans l’unique objectif d’œuvrer pour une alternance dans la paix et par les urnes, appelle à une réelle implication des Nations Unies dans le processus devant conduire à l’organisation de la prochaine élection présidentielle au Cameroun.
Il nous semble indiqué de souligner qu’en son temps, nous avons décrié la tentative de holdup électoral de certains dirigeants du gouvernement camerounais, qui voulaient s’assurer en 2011 de l’élection de leur candidat même si celui-ci n’est pas le choix du peuple. Malgré nos protestations et notre exigence pour une structure plus crédible dès la conception, ELECAM a été mis en place et l’encadrement juridique de tout le système électoral camerounais est resté incongru, opaque et inopérationnel. Il est évident que la démocratie, et partant, le processus menant à une alternance au pouvoir dans la paix, est gravement menacé au Cameroun. Ce qui commande une action urgente, efficace et judicieuse dans la perspective d’une réelle préservation de la paix et la stabilité dans ce pays.
Excellence Monsieur le Secrétaire Général,
Permettez-nous de signaler que La Plate Forme
dans cette optique, mène depuis janvier 2006, et plus intensément
depuis le 29 décembre 2006 – date de promulgation de la loi portant
création, organisation et fonctionnement d’ELECAM -, tant sur le plan
national qu’international, une vaste campagne de sensibilisation et de
lobbying pour un système électoral plus crédible, et bénéficiant de la
confiance du plus grand nombre de citoyens. Il convient ici de
mentionner quelques escales clés de la caravane de la démocratie que
nous menons:
- Avant juillet 2006, les responsables de la Plate-Forme ont eu
plusieurs rencontres au Sommet avec les dirigeants du Commonwealth ;
Plusieurs tournées de sensibilisation et d’information de la Communauté
internationale ont été menées ; les activités de lancement d’un projet
citoyen pour une loi sur la Commission Electorale Nationale
Indépendante (CENI) ont été organisées;
- 25-27 octobre 2007 : le Cameroun a connu l’organisation à Douala du
1er forum de la Plate Forme de la société civile camerounaise sur la
Démocratie ayant abouti à l’adoption de La Déclaration de Bonamoussadi
(Charte contenant toutes les résolutions citoyennes et autres grandes
orientations relatives à la construction d’une démocratie camerounaise
plus crédible et transparente) ;
- Février - Avril 2008, Les dirigeants de la Plate-Forme ont initié et
conduit une mission internationale de lobbying pour l’appui au
processus électoral camerounais
- 29 juillet 2008 : la Plate Forme, à travers une conférence de presse
(traditionnel Thé Citoyen), a lancé une vaste campagne de mobilisation
pour un amendement de la loi portant création, organisation et
fonctionnement d’ELECAM (selon la Plate-Forme, ladite loi consacre une
régression dangereuse du système électoral camerounais) ;
- Juillet –Aout 2008 : Des dirigeants de la Plate-forme ont intensifié
les missions internationales de lobbying pour un ELECAM plus efficace
et plus crédible;
- 06 janvier 2009 : suite à la nomination par décret présidentiel des
membres d’ELECAM le 30 décembre 2008, la Plate Forme à travers une
conférence de presse (Thé Citoyen) a fustigé les complices de cette
manipulation du système électoral camerounais, mais s’est engagée à
évoluer positivement en rassurant les populations quant aux options
alternatives à un « ELECAM aux ordres » ;
- Mai 2009 : la Plate-Forme à défaut d’être suivie dans sa proposition
d’amendement de loi portant création, organisation et fonctionnement
d’ELECAM a décidé de favoriser la mise sur pied, par les organisations
de la Société Civile, des Commissions Electorales Citoyennes
Indépendantes (CECI), organes parallèles mais complémentaires
d’observation des élections.
- Nous pouvons nous limiter ici à ces quelques faits.
Par ailleurs, nous n’avons pas de sérieuses raisons de douter de la prédisposition de l’actuel Président de la République du Cameroun à œuvrer pour la paix et surtout pour la pérennisation de la stabilité dont il a eu le mérite d’être le garant au cours de sa trentaine d’années de règne.
Nous ne doutons pas non plus de la prédisposition de S.E Paul Biya à contribuer à une alternance paisible et par les urnes à la fin de son règne en 2011.
Malheureusement, nous sommes convaincus que plusieurs réseaux, souvent mafieux, contrôlant des parcelles (plus ou moins importantes) de pouvoir, pour des raisons de dauphinat non clarifiées, s’organisent pour éloigner le Cameroun d’une possibilité d’alternance paisible en 2011.
Il serait peut être maladroit de vous rappeler que le Cameroun est un socle fondamental de la stabilité en Afrique centrale et que par conséquent, un déséquilibre sociopolitique dans ce pays affecterait tous les autres pays de la sous région. Aussi, il est de votre responsabilité, conformément au Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, de veiller à la pérennisation de la paix dans et entre les pays membres.
De même, nous tenons à préciser que l’enjeu de l’élection présidentielle de 2011 pour le Cameroun commande une lecture plus profonde de la situation avant toute décision à quelques niveaux que ce soit. Entre autres, il ne faudrait pas perdre de vue, que, conformément à la Constitution du Cameroun tout citoyen, regroupement de citoyens ou parti politique peut présenter une candidature à l’élection présidentielle. Par conséquent, lors des consultations et des négociations relatives à ce scrutin, les partis politiques doivent être considérés au même titre que les autres regroupements citoyens qui travaillent pour la bonne tenue de cette élection.
Au regard de tous ces faits, La Plate Forme a donc cru urgent de mettre à votre disposition quelques inquiétudes déterminées par la mise à l’épreuve des fondamentaux, dont la prise en compte pourrait éloigner notre pays d’une éventuelle crise postélectorale.
Excellence M. le Secrétaire General, Permettez
nous donc de vous faire part de certaines de nos principales
inquiétudes par rapport à l’hypothétique justesse de la prochaine
élection présidentielle :
Pourra-t-on parler d’Elections justes lorsqu’un potentiel candidat maîtrise seul le calendrier électoral ?
Pourra-t-on parler d’élections justes, lorsque la structure
d’organisation des élections (ELECAM), émanant d’un seul parti
politique est contestée par l’ensemble des autres protagonistes ?
Pourra-t-on parler d’élections justes si la loi électorale reste
incongrue et porte en elle-même des dispositions contradictoires et
inopérationnelles?
Pourra-t-on parler d’élections justes, si l’un des partis en
compétition s’arroge le droit de détourner et de mobiliser, pour sa
campagne électorale, tout le dispositif humain et matériel de
l’administration publique?
Pourra-t-on parler d’élections justes, si les médias publics sont
essentiellement au service du parti au pouvoir et de son candidat ?
Pourra-t-on parler d’élections justes, si un seul potentiel candidat
confisque a dessein le résultat du recensement de la population ?
Pourra-t-on parler d’élections justes, lorsque la loi portant
financement des partis politiques n’est pas respectée ? Lorsque tout le
mécanisme de financement de ces partis est défini par un seul potentiel
candidat et que l’argent destiné à la campagne électorale est souvent
déboursé aux candidats seulement la veille du scrutin?
Pourra-t-on parler d’élections justes, si un potentiel candidat gère en
exclusivité, grâce à ses excroissances, tout le processus électoral ?
Pourra-t-on parler d’élections justes, si les libertés de manifestation
et de réunion, pourtant juridiquement bien encadrées, sont mises à
l’épreuve par des agents à la solde d’un seul potentiel candidat ?
NON !!!! Mr Le Secrétaire Général.
Ce sont là quelques préalables dont la prise en compte justifierait à
suffisance votre position future au lendemain de la consultation
électorale tant attendue par le peuple camerounais en 2011.
Il n’est plus besoin de vous signaler que certains esprits malins dans
le monde, ont très souvent besoin de votre auguste institution et/ou de
certains gouvernements de l’Occident, pour valider de véritables
Hold-up électoraux. Nous essayons de nous convaincre, non sans aviser
sur notre détermination, que de tels esprits n’existent pas encore au
Cameroun.
Aussi, la Plate-forme suggère, et précise le caractère impératif, de créer au Cameroun, dans un délai convenable, un cadre permanent de dialogue électoral qui devra regrouper en son sein des experts représentant le Gouvernement, les partis politiques, la Société Civile engagée et la Communauté internationale sous la houlette d’un de vos représentants.
Dans le cadre de ce dispositif permanent de dialogue, l’on devrait pouvoir s’accorder :
- sur un processus de crédibilisation d’ELECAM avant la prochaine Présidentielle ;
- sur un Code électoral harmonisé, corrigeant les insuffisances et les conflits des lois actuelles ;
- sur le financement des partis politiques et des candidats aux élections ;
- sur l’observation indépendante des élections (étant entendu qu’ELECAM qui organise ne peut pas observer en même temps) ;
- sur la sécurité des candidats et leur accès aux médias publics ;
- sur la gestion politique des médias privés pendant la période électorale ;
- Sur la mise en place d’une commission ad hoc et paritaire chargée de
suivre de manière permanente, et à tous les niveaux, le processus
d’informatisation du fichier électoral.
Par ailleurs, en prenant en compte le fait que
l’abstention électorale a été un déterminant fondamental pour la fraude
électorale lors des précédentes consultations électorales au Cameroun,
nous vous suggérons, de souligner à l’attention du Chef de l’Etat
Camerounais, la nécessité de faire élaborer et de promulguer une loi
d’application de l’article 2 alinéa 3 de la Constitution camerounaise,
qui rend le vote obligatoire. Cette obligation, qui n’altère aucunement
les libertés individuelles, pourra rester factuelle et applicable
exclusivement lors de l’élection présidentielle de 2011.
Enfin, il est évident qu’il doit être exigé au Gouvernement camerounais
de publier dans l’urgence les résultats du recensement général de la
population de novembre 2005 car, il serait malhonnête de parler de
prédisposition à la transparence d’un processus démocratique lorsqu’un
camp politique, s’arroge le droit de confisquer les statistiques de la
population (base de toute analyse politique objective du niveau de
dévolution de pouvoir).
Excellence, nous vous saurons gré par conséquent, d’aider le Gouvernement en place au Cameroun à comprendre les risques de l’application en l’état de l’arsenal juridique encadrant les élections, notamment la loi sur ELECAM qui est une régression dangereuse pour la démocratie, et les autres lois électorales.
De même, La Plate-Forme a pris note de votre souci d’appuyer ELECAM et nous apprécions à sa juste valeur cet effort visant à renforcer le processus électoral camerounais. Dans ce sillage, nous sollicitons des Nations Unies un appui multiforme à la dynamique de la société civile qui vise à combler le vide dans le champ d’observation des élections jadis assuré par l’Observatoire Nationale des Elections (ONEL). Bien que disposée à appuyer ELECAM à se crédibiliser si elle le souhaite, La Plate-Forme a initié, une dynamique complémentaire à travers la création des Commissions Electorales Citoyennes Indépendantes (CECI), comme solution circonstancielle de compromis traduisant la volonté de la société civile engagée à rester positive sans pour autant faire de concessions anti citoyennes de nature à compromettre l’issue de l’alternance pacifique attendue au Cameroun.
La Plate-Forme fait sienne cette assertion selon laquelle il est toujours plus adéquat et moins coûteux de se mobiliser pour prévenir les conflits que de s’activer pour les gérer. Nous voulons rester en paix au Cameroun : Aidez le Cameroun dans cette perspective.
Il n’est pas inutile de signaler que la prochaine élection présidentielle de 2011 n’est pas une élection comme les autres. Elle devrait marquer, avant la modification de la Constitution, la fin d’un Règne que nous refusons pour l’instant de juger. Les citoyens de la Nouvelle génération ne sont aucunement disposés à rester les bras croisés face à toute tentative de détournement de l’expression de la souveraineté du peuple lors de cette élection. C’est une question de survie générationnelle. Il est donc dans l’intérêt de toutes les parties prenantes que l’élection présidentielle de 2011 se passe en toute transparence et à l’échéance constitutionnelle prévue. Il serait de ce fait impardonnable que l’on tente de proposer une fois de plus la modification de la Constitution dans le but d’anticiper ou de repousser la date de cette cruciale élection.
Excellence,
Il est important de rappeler que La Plate-Forme est un regroupement
légal des associations et personnalités de la société Civile
camerounaise créé dans le but de favoriser une alternance par les urnes
et dans la paix au Cameroun. La Plate-forme a pour objectif de
valoriser, mutualiser, capitaliser toutes les expériences et pratiques
des droits de l’Homme ; d’initier des alliances avec les mouvements
sociaux et de la société civile, et enfin d’éduquer les citoyens aux
vertus de la paix civile, de la justice sociale et de la démocratie.
En espérant que ce message aura l’écho approprié auprès de vous, nous vous adressons ici nos vœux de succès et de prospérité dans votre lourde mission à la tête de l’Organisation des Nations Unies.
Fait à Yaoundé le 14 septembre 2009.
Pour la Plate Forme de la Société Civile pour la
Démocratie au Cameroun, Le Secrétaire Permanent et Porte Parole,
Citoyen Hilaire KAMGA
Permanent Secretary of the Platform of the civil society for the Democracy Tel. 00 (237) 2,201 12 47)/00 (237) 7,752 45 94
Fax: 00 (237) 2221 38 63 ///E-mail: htkamga@yahoo.fr
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