CAMEROUN : L’OPPOSITION EST-ELLE PRÊTE POUR L’ALTERNANCE ?

CAMEROUN : L’OPPOSITION EST-ELLE PRÊTE POUR L’ALTERNANCE ?Nous sommes consternés par l’absence d’argumentaire dont font preuve certains de nos lecteurs suite à notre post sur l’incurie de l’opposition camerounaise. Nous sommes partis d’un constat qui est accablant pour ceux qui veulent diriger notre pays demain. Malheureusement, les propos de nos contradicteurs n’ont pas éclairé notre lanterne. Ils sont restés comme d’habitude dans le règne de la pensée unique, de l’époque stalinienne dans l’ex – URSS où toute personne émettant un avis contraire au conformisme ambiant était soupçonnée de traitre ou d’espion.

Rien ne sert d’affirmer que l’opposition camerounaise a un programme si celui-ci n’existe pas ! Un programme politique ne se limite pas à dire que « Biya est un voleur, Biya doit partir, Biya ne doit pas se représenter… » ; À la longue, ça devient fatiguant et anti productif !

Nous aimerons entendre l’opposition sur des questions cruciales et concrètes qui se posent au Cameroun.

A titre d’exemple :

Au niveau des institutions, quelle est la position des partis d’opposition vis-à-vis des différentes modifications de la constitution opérées par Biya et non mises en œuvres pour certaines : le mandat présidentiel, les pouvoirs du président de la république, le conseil constitutionnel, le sénat, les régions et la décentralisation etc… L’opposition entend –elle entériner ces réformes ou bien revenir dessus, voire les annuler. Le futur président entend-il renforcer les pouvoirs du parlement. Quel rôle pour le premier ministre qui n’est en réalité que le secrétaire général du gouvernement. Doit-on continuer dans cette logique ? Les interrogations dans ce domaine sont nombreuses, la liste n’est pas exhaustive.

La lutte contre la corruption : l’opposition va-t-elle se satisfaire de l’opération épervier ou bien a-t-elle d’autres solutions pour mettre un terme à la corruption qui gangrène la société camerounaise au-delà des seuls ministres et directeurs emprisonnés à ce jour ? Si solutions il ya, quelles sont elles ? Les sommes cachées dans les banques étrangères seront-elles rapatriées ? Par quels moyens ? L’opposition va-t-elle reprendre à son compte l’enquête du CCFD sur les biens mal acquis ? Biya conservera t-il son immunité à vie que le parlement lui a accordé si d’aventure il était battu aux élections en 2011 ?

Industrie et Economie : Depuis le départ d’Ahidjo, le Cameroun a perdu l’embryon de tissu industriel qui faisait de lui un pays en voie d’industrialisation. Nous étions classés alors dans la même catégorie que le Brésil et la Corée du Sud. Le Cameroun disposait d’une flotte de marine marchande, d’une compagnie aérienne, un véritable tissu industriel en voie de constitution. On ne connaissait pas les délestages de la Sonel, on avait l’eau courante dans les maisons. Aujourd’hui, nous allons demander des subsides à la Corée du Sud et au Brésil. Le Maroc s’accapare les pans de notre économie. Le Transcamerounais est devenu le Transbolloré. Nous ne parvenons pas à faire voler un avion. Nous ne parvenons pas à construire un pont sur le Wouri. Les asiatiques achètent nos terres et nous revendent le manioc et le riz de chez nous. Que pense l’opposition de tout cela ? Comment compte t- elle mettre un terme à la dégradation de notre économie ? Quelles solutions pour redynamiser le secteur industriel et reconquérir la place qui fut jadis la notre ?

Nous pensons à l’emploi, à tous ces jeunes diplômés qui conduisent les « bensikins » au pays avec en poche la licence, la maîtrise ou tout autre diplôme de l’enseignement supérieur ;  à cette jeunesse qui ne trouve pour seul salut que la prostitution et la « feymania ».  Nous pensons à ces agriculteurs qui sont encore à travailler avec la houe à l’heure de la mondialisation et où le machinisme se généralise dans la plupart des économies des pays en développement. Toutes ces personnes attendent du concret et non de simples invectives et des injures à Biya. Cela, tous les Camerounais savent le faire, et même ne s’en privent pas. Cela n’a jamais rien changé au Cameroun pour autant.

L’administration va-t-elle continuer à fonctionner à mi-temps alors que dans les autres pays du monde, la tendance est à l’augmentation de la durée du temps travail ?

Le chantier est immense, tous les secteurs économiques et sociaux sont touchés, et nous ne pensons pas qu’un président aussi volontaire soit-il puisse changer le cours des choses au Cameroun à lui tout seul, s’il n’a pas le soutien populaire qui sied dans de telles circonstances. Trente années de régression économique, politique et sociale ne peuvent se résorber d’un coup de baguette magique. Par ailleurs, on n’a pas besoin de se farcir à nouveau un pseudo sauveur amateur, un apprenti sorcier qui va nous bercer à nouveau d’illusions et de beaux discours pendant un quart de siècle. L’alternance demande un temps de préparation et de prospective.

Notre appel  pour une concertation de toute l’opposition n’est pas du tout une diversion. Bien au contraire, ceux qui la refusent sont ceux-là même qui veulent remplacer la bande à Biya par un autre groupuscule identique qui viendra se servir à son tour. Un candidat unique de l’opposition élu après des primaires sur la base d’un projet commun, sera tenu par des engagements de résultat et ne pourra dévier de la voie qui lui sera imposée par la coalition.

La plateforme politique permettra de poser dès le départ les bases d’un contrôle ultérieur des actions du futur gouvernement, d’un véritable contre pouvoir. Nous avons besoin de cette visibilité quant aux objectifs de prétendants au pouvoir, et plus vite le dialogue s’engagera, plus il sera constructif, et plus les chances de succès seront grandes.

Les grandes alternances politiques de l’histoire se sont opérées lorsque les forces de l’opposition étaient unies et présentaient un front commun, une bannière commune et un chef unique. A titre d’exemple, l’Iran avec Khomeiny, la France avec Mitterrand, l’Italie avec Romano Prodi, l’Afrique du Sud avec Nelson Mandela, etc.…

La solution à nos problèmes n’est pas dans le chaos. Nous croyons fermement à l’attachement de la grande majorité de nos concitoyens aux valeurs démocratiques pour qu’ils se laissent tenter par des aventures sans lendemain.

Il est loin le temps où le peuple pouvait se satisfaire des seules insultes au dictateur pour accueillir les putschistes en héros. Il est dépassé le temps où l’on pouvait venir se reposer en occident et se dire opposant, réfugié politique, héros national. Les choses ont beaucoup évolué.

Loin de nous l’idée de renier ceux là qui ont combattu pour notre indépendance et versé leur sang pour le peuple camerounais. La patrie sera reconnaissante à ses vrais martyrs et héros.

Nous attirons encore l’attention sur l’enracinement du RDPC dans tous les rouages politico-économiques du Cameroun, et même dans la société. Le RDPC est un parti-état avec ses apparatchiks et sa nomenklatura.  Le RDPC est la fille de l’UNC qui elle est fille de l’UC. Et prétendre aujourd’hui que ce parti se disloquera avec la fin de BIYA est une marque de naïveté et une ignorance totale du fonctionnement de ce parti politique. Ce parti ne disparaît pas. Il se transforme. Il est comme un serpent qui mue et se pare de nouveaux atours pour mieux séduire, sans pour autant dévier de son idéologie, comme un sphinx qui renait de ses cendres, donc à ne jamais sous estimer.

D’autre part, ce n’est pas parce que les dirigeants actuels bafouent les lois de la république que l’opposition doit adopter les mêmes comportements. Le peuple ne peut comprendre que l’opposition critique le gouvernement alors même qu’elle se complait dans les mêmes erreurs. D’où viendra la crédibilité du message que l’on veut passer au peuple ? Il est affligeant de se voir rétorquer que « Biya ne respecte pas tel ou tel principe, alors pourquoi le demander à l’opposition ». Si tel est que l’opposition entend changer les choses une fois au pouvoir, cela doit se mesurer bien avant sa prise de fonctions.

Chers compatriotes, nous avons tort de nous mettre des œillères et de ne pas vouloir reconnaître les insuffisances de l’opposition. Nous avons tort de nous contenter des injures à Biya sans aborder avec le peuple les problèmes de fond qui minent le Cameroun aujourd’hui et de débattre des solutions qui peuvent relever le pays. Il est inutile de nous bercer de fausses illusions.

Nous ne nous limiterons pas à la seule interpellation de nos chers leaders politiques et entendons mettre tout en œuvre pour redonner espoir à tous nos compatriotes qui croient encore à une alternance démocratique au Cameroun, et convaincre nos contradicteurs que le salut du Cameroun ne viendra que par la voie des urnes, et à venir nous rejoindre dans une démarche responsable.

Dieu Bénisse le Cameroun !

© Correspondance de : Gérard André – CERPAC (Cercle des Patriotes Camerounais)
Paru le 30-09-2009 09:38:40




30/09/2009
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