Cameroun: Lettre ouverte à M. Essimi Menye, Ministre des Finances
Cameroun: Lettre ouverte à M. Essimi Menye, Ministre des Finances
Un lecteur réagit au sujet de la sortie médiatique récente de M. Essimi Menye, Ministre des Finances en rapport avec l'affaire COFINEST. Lisez- plutôt... Monsieur le Ministre,Après une longue période de réflexion et d’hésitation, j’ai décidé de vous écrire pour vous faire part de mon sentiment de révolte après votre point de presse relatif à la désormais « Affaire COFINEST ». En temps normal, écrire à un Ministre de la République est une lourde responsabilité et fait appel à un temps de réflexion qui permet de mesurer toutes les conséquences d’un tel acte, notamment lorsque la lettre en question n’est pas une motion de soutien, mais plutôt une motion de censure. C’est dire que mon acte n’est nullement le fruit d’une réaction épidermique et qu’en toute responsabilité, je l’assume. Citoyen jusqu’au bout des ongles, je me considère, même si cela peut m’éloigner de toute humilité.
En réalité, dans ma naïveté, j’ai pensé que ma réaction arriverait après celles de beaucoup d’autres camerounais originaires des multiples villages que compte notre pays, et qui s’insurgeraient de ce qu’un Ministre de la République se soit donné la liberté d’appeler en direct sur les antennes de la télévision nationale, des camerounais à haïr d’autres camerounais. Il n’en a rien été et je le mets sur le compte de « qu’est-ce qu’on va faire alors » qui caractérise désormais les camerounais qui se privent de leurs droits fondamentaux dans une attitude de lassitude face à des incongruités devenues modes de gestion de certains responsables des affaires de la Cité. Garder silence face à cette attitude serait être complice d’une déclaration machiavélique qui, si elle venait à se répéter, serait de nature à mettre notre pays à feu et à sang. Indexé dans vos déclarations alors que je suis par ailleurs victime de la fermeture de COFINEST, blessé dans ma dignité de Baham et désormais inquiet pour ma sécurité face au désarroi de nombreux camerounais aussi victimes que moi, je ne pouvais m’offrir le luxe du silence.
En effet, à l’occasion de votre point de presse, vous avez utilisé la CRTV, un média de service public qui fonctionne grâce aux impôts des contribuables camerounais dont moi-même, pour lancer un appel à la haine contre les Baham qui seraient les principaux promoteurs de la COFINEST que vous avez décidée de mettre en liquidation. Ils sont tous des Kamdem avez-vous dit alors, comme si ce nom était l’exclusivité des Baham. Parlant de vos concitoyens qui ont confié leurs épargnes à cet établissement de micro finance qui pourtant fonctionne avec l’autorisation du Ministère des Finances dont vous avez la charge, vous avez estimé qu’ils ne devraient s’en prendre qu’à eux-mêmes, dans la mesure où ils ont décidé librement d’ignorer les banques classiques. En d’autres termes, l’autorité monétaire chargée du contrôle et de la protection des intérêts financiers du citoyen a failli à sa mission. Qui ne se rappelle des banques classiques qui, à l’instar de la BIAO, de la BCD et de la SCB, ont fermé les portes en engloutissant des milliards de francs d’économie de nombreux citoyens ? Et que dire de la Caisse d’Epargne Postale, institution publique qui s’est offerte le luxe d’engloutir comme une vulgaire prédatrice, les économies de plusieurs années d’efforts des citoyens de ce pays ! L’Etat n’avait-il pas pris sur lui, après cette série noire, de mettre en place des instruments spécialisés à l’effet de sécuriser l’épargne des citoyens ? A cet effet et sauf erreur de ma part, vous êtes supposé être l’œil et l’oreille de l’Etat dans ce sens. Avez-vous,
Monsieur le Ministre, joué votre rôle en toute honnêteté ?
Vos déclarations successives et votre attitude à la Ponce Pilate m’amènent à relever une ou deux choses : d’abord, votre haine apparente pour les créateurs de richesses que vous semblez mépriser malgré le fait qu’ils payent des impôts grâce auxquels vous recevez votre traitement de Ministre ; vous ne vous privez pas de les humilier à la première occasion en affichant cette attitude condescendante qui devrait être celle d’un piégeur. A cet effet, qui ne se rappelle avec quelle hargne méprisante vous avez évoqué le nom de Yves Michel FOTSO dans « l’affaire CBC » et que vous avez traité de tous les noms humiliants? Ensuite, votre propension à vous substituer à la justice de ce pays pour servir à tour de bras des peines de prison avant que tout jugement ne soit initié, est inadmissible dans un pays de dro
Tous les citoyens sont supposés être égaux devant la loi, encore faut-il que responsabilité soit celle des tribunaux de rendre justice. C’est dire que mon propos n’a nullement l’intention de servir une quelconque immunité à quelque justiciable que ce soit. Il est destiné d’une part, à vous refuser le droit de vous substituer à la justice et de profiter des antennes publiques pour proférer des injures à l’endroit des citoyens qui ont le droit à la présomption d’innocence jusqu’à ce que les tribunaux en aient décidé autrement, et d’autre part, à attirer votre attention sur les risques d’explosion que vous faites délibérément courir sur le Cameroun, notre pays à tous, à moins que dans votre omnipotence, vous ne suggériez aux Baham, un autre pays dans lequel ils auraient droit au respect et à la protection. J’ai le sentiment que votre attitude relève de la provocation, de la pêche en eaux troubles et que vos desseins restent obscurs. En effet, comment comprendre que vous fassiez fi des efforts du Chef de l’Etat à maintenir la paix au sein du triangle national et vous risquiez dans des actes et des postures de nature à saper les fondations de sa politique d’unité nationale ? L’avenir nous le dira. Dans un pays normal, vous auriez déjà démissionné sous la pression d’une opinion publique qui souffre depuis un certain temps, des provocations indignes d’une personnalité de votre rang. Vous me répondrez certainement que « le Cameroun, c’est le Cameroun » mais tenez-vous tranquille, les coups de tête du Prince sont souvent imprévisibles.
En attendant, je vous préviens qu’à votre prochaine sortie contre les Baham ou tout autre peuple de ce pays, vous aurez à en répondre devant les tribunaux sur le chef d’accusation « d’incitation à la haine tribale ». Bien que l’humilité ne soit pas la chose la mieux partagée pour des personnes de vote type, je puis déjà vous assurer que des excuses publiques sur les mêmes antennes seraient acceptées malgré le mal que vos déclarations ont causé car, je crois fermement qu’un pays peut et doit se faire avec tous ses enfants, y compris les gaffeurs, ce qui suppose le droit à l’erreur, à condition qu’elle soit reconnue. « Citoyennement » vôtre.