Cameroun. Le DG de Camtel pourrait être inquiété par «l'Opération Epervier»
Le mois dernier, David Nkoto Emane, le directeur général de
l’opérateur historique Cameroon Telecommunications (Camtel), a répondu à
une lettre de convocation du procureur près le Tribunal criminel
spécial (TCS). L’entretien a porté, à en croire nos sources, sur sa
gestion de l’entreprise des télécommunications.
Selon le journal l’Epervier,
le Dg pourrait être inquiété dans les prochains jours par l’opération
nationale de lutte contre la corruption et les détournements de deniers
publics, qui a déjà emporté plusieurs hauts commis de l’Etat. Depuis
plusieurs années, de supposés dossiers de mauvaise gestion auraient été
accumulés par David Nkoto Emane, qui serait aussi soupçonné de
distractions de fonds. C’est ce qui expliquerait pourquoi Camtel, chargé
de gérer la fibre optique, peine à dominer le marché local des
télécommunications.
Depuis son arrivée à la tête de l’entreprise
en 2005, le Dg de Camtel a considérablement augmenté le personnel de la
société, dont les femmes sans qualifications professionnelles seraient
les plus nombreuses grâce à la «promotion canapé», soutient le journal l’Epervier, ceci au détriment d’ingénieurs parfois renvoyés en masse du ministère des Postes et Télécoms.
C’est
le cas de Godfroid Ondoua Ella, qui a adressé le 5 juillet 2011 une
correspondance au chef de l’Etat camerounais, avec ampliation à la
justice, à la police judicaire, aux services du Contrôle supérieur de
l’Etat, à l’Agence nationale d’investigation financière, à la Commission
nationale anti-corruption pour se plaindre de la gestion de M. Nkotto
Emane.
Dans ce brulot, l’ingénieur et ancien collaborateur du Dg
de Camtel révèle par exemple qu’à cause de la piteuse qualité du service
offert aux abonnés, «plus d’un abonné Ctphone sur deux abandonne le
réseau, (…) près de 500 abonnements à Internet ne sont pas renouvelés
chaque mois ; et l’on est obligé de maintenir dans la base de données,
des années durant, des abonnés qui ont depuis longtemps oublié qu’ils
ont un jour souscrit un abonnement au réseau Ctphone, dans un souci de
maquillage des chiffres officiels, tactique que l’on retrouve d’ailleurs
sur le réseau fixe, où des dizaines de milliers d’abonnés continuent de
recevoir des factures mensuelles, alors que leurs lignes sont hors
service depuis de nombreuses années déjà». Résultat : depuis plus de 6 ans, Camtel revendique invariablement un parc de 220 000 abonnés.
Pourtant, dans le même temps, apprend-on dans cette correspondance, les recettes de l’entreprise publique de téléphonie «dépassent
difficilement 30 milliards de Fcfa/an, le Ctphone [produit phare de
l’entreprise] ne parvenant même pas à faire des recettes de 500 millions
de Fcfa/mois, soit moins de 6 milliards/an, sur un budget annuel de
plus de 100 milliards, budget néanmoins continuellement révisé à la
hausse, visiblement pour tromper la vigilance du Chef de l’Etat», affirme le plaignant.
Selon
des sources internes à l’entreprise, Cami Toyota aurait retiré de
nombreux véhicules à Camtel, pour non payement des traites, la Sgbc
rechignerait désormais à faire des avances de trésorerie à Camtel à
cause de l’insolvabilité de cette entreprise, de nombreux fournisseurs
de la société attenderaient le paiement de leurs factures depuis des
mois. Selon les employés de cette entreprise des télécommunications, les
salaires sont de plus en plus payés en retard, pour cause de tensions
de trésorerie.
On apprend également dans la correspondance de Godfroid Ondoua Ella, que malgré «de
nombreux rapports dénonçant la violation systématique des règles de
l’art lors de la conduite des travaux de pose de plusieurs centaines de
km de câbles à fibres optiques en régie (…) et en dépit du refus
systématique des opérateurs Gsm que sont Mtn et Orange [manque à gagner
de plusieurs milliards pour Camtel] d’emprunter une infrastructure
visiblement de qualité douteuse», le Dg de Camtel a poursuivi ces travaux d’un montant de 38 milliards de Fcfa, rendant ainsi «la situation des près de 6000 km d’infrastructures de câbles à fibres optiques précaire».
BRM