Cameroun: La République des voleurs et des prisonniers
DOUALA - 17 Avril 2012
© David Nouwou | La Nouvelle Expression
© David Nouwou | La Nouvelle Expression
L’implacable
constat est que le Cameroun est l’une des rares Républiques au monde,
là où il est déjà rendu, à avoir réalisé cet exploit d’écrouer ses
élites, sous un seul régime, dans cette périodicité.
La lutte contre la corruption et les
détournements des deniers publics garantit l’une des voies royales qu’un
peuple doit emprunter pour assurer un développement durable. Mais dans
ce parcours, il faut être un sacré pays pour se vanter d’avoir
embastillé, en 15 ans, autant d’élites de la haute administration. Pour
détournement de deniers publics. Et à l’occasion, on sert là à Amnesty
International les preuves, s’il en était encore besoin, que ce n’était
point un complot que cette organisation internationale ait décerné au
pays de Paul Biya, et pendant des années de suite, la palme d’or du
pays le plus corrompu de la planète.
L’implacable constat est que le Cameroun est l’une des rares Républiques au monde, là où il est déjà rendu, à avoir réalisé cet exploit d’écrouer ses élites, sous un seul régime, dans cette périodicité. Un ancien premier ministre, Inoni Ephraïm. On dit le prendre aujourd’hui dans le cadre de l’affaire Albatros, du nom de cet avion que les hommes de la présidence de la République avaient envisagé d’acheter pour les voyages du président de la République au début des années 2000. Et dont la gestion était confiée finalement à plusieurs structures différentes : Gia International, Sygma, Apm et l’avion Albatros lui-même qui, il faut le noter, était négocié à travers des transactions particulièrement filiformes et à l’allure d’une véritable toile d’araignée, officiellement pour le compte de la défunte Cameroon Airlines (Camair) dirigée par «le capitaine d’industrie» Yves Michel Fotso, mis aux arrêts dans le cadre de la même procédure, depuis un an. A la suite de l’ancien premier ministre, chef supérieur de Bakinguili dans la région du Sud-Ouest où il s’est retiré depuis sa chute du gouvernement, ont déjà été également pris dans la foulée de la lutte contre les détournements de la fortune publique, trois anciens secrétaires généraux de la présidence de la République : Titus Edzoa, Jean Marie Atangana Mebara, et depuis hier, Marafa Hamidou Yaya. Une demi-douzaine de ministres, une vingtaine de directeurs de sociétés d’Etats et de hauts cadres de l’administration. Et dire, compte tenu de l’ampleur du mal dans l’administration camerounaise, que ce contingent ne représente qu’une poignée de sable dans le fleuve des cas de détournement des deniers publics déjà recensés par de multiples contrôles. Du coup, l’opinion publique nationale et internationale qui avait salué des deux mains le lancement de cette opération épervier entrée dans sa phase active il y a bientôt six ans, commence à remettre en question la sincérité de ses auteurs à combattre véritablement ce fléau. Parce que l’entreprise, de plus en plus discréditée, s’est manifestement muée en une opération d’épurement de ceux qui ne se moulent pas harmonieusement dans le système. Lorsqu’on regarde, finalement, la stature de tous ceux qui ont été déjà happés par l’oiseau, ce sont toutes les tranches de l’élite camerounaise utilisée par le Renouveau à qui ils ont tout donné et tout reçu, qui sont représentées. Comment alors rassurer que les autres membres qui croient continuer de tenir fermement le système, ne sont pas en sursis, devant la gueule béante de ce monstre froid qui broie doucement, mais très sûrement ses propres enfants? |
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