Cameroun : Issa Tchiroma Bakary ou le type-idéal du degré zéro de la politique
L’opposition institutionnelle au Renouveau National est tellement sans consistance et sans convictions fermes, que Paul Biya peut faire de l’une de ses figures de proue, un porte-parole de son gouvernement. C’est comme si, en France, Olivier Besancenot devenait porte-parole du gouvernement de Nicolas Sarkozy qu’il combat politiquement.
En fait, l’Homme fort de Yaoundé ose de telles choses parce qu’il sait pertinemment que ceux qui se disent traditionnellement « opposants » au Cameroun, ne le sont que du bout des lèvres tant qu’ils n’ont pas encore un poste. Comme quoi, on s’oppose non parce qu’on a des convictions fortes et fermes sur une façon de conduire le pays divergente de celle en vigueur, mais parce qu’on aimerai aussi être intégré dans « la mangeoire ». Une fois la bouche pleine, comme le dit la sagesse populaire, le ton change et on commence à défendre le régime contre lequel on gesticulait dans tous les sens il y a quelques temps.
Comment ne pas le croire lorsque quelqu’un comme
Issa Tchiroma accepte une telle fonction au sein d’un régime qu’il dit
combattre ? Une chose est certaine, c’est une nomination qui confirme
le discrédit consommé de l’opposition institutionnelle camerounaise
auprès des populations. Le président camerounais joue avec les pseudo
opposants à son régime comme le scientifique Pavlov jouait avec son
chien. Lorsqu’il brandit un os, le chien salive. Il reprend son os, le
chien commence à aboyer en guise d’opposition pour signifier qu’il a
faim. Alors il lui redonne un os pour qu’il se taise et redevienne
docile.
Ce schéma pavlovien d’interactions caractéristiques de l’opposant
institutionnel au Renouveau National, prouve que celui-ci est au degré
zéro de la politique.
C’est-à-dire la politique du ventre et de la satisfaction de purs instincts animaux. La politique n’est pas pour lui l’art d’augmenter les droits des populations en élargissant sans cesse par l’action l’ensemble de leurs possibles, mais juste une activité personnelle où la langue de bois et les retournements de veste sont fréquents. C’est une conception minable et pauvre de la politique parce qu’elle l’ampute de son sens onirique, noble, sacerdotal, tribunitien et messianique. Elle devient une activité opportuniste en ce sens qu’elle se transforme en une entreprise sans portée historique et sans idées originales, ni convictions fermes de ce qu’on veut faire de son pays. Ce degré zéro de la politique est celui qui explique tant la baisse continue des taux de participation aux votes en Afrique noire, que la croyance populaire selon laquelle « tous les politiciens sont des menteurs ».
Avec Issa Tchiroma Bakary et bien d’autres opposants camerounais, faire de la politique, c’est être un homme aux convictions liquides qui prennent la forme du récipient politique qui les contient. C’est être quelqu’un qui n’a pas une identité, un projet et une trajectoire politique cohérente. C’est être un éternel surfeur pour son propre compte. C’est être un adepte convaincu de ce qu’on appelle le moment machiavélien pour son peuple.
D’aucuns pourraient croire que ces propos sont sans fondements explicatifs réels si le nouveau ministre de la communication du Renouveau National n’avait fait feu de tous bois ces derniers temps pour défendre le président en place notamment par rapport aux diatribes de la diaspora. Un opposant peut bien participer au pouvoir exercé par un de ses adversaires politiques. Là n’est pas le problème. Celui-ci réside dans le fait qu’un opposant digne de ce nom, ne dilue pas lui-même et son identité d’opposant dans une stratégie courtisane où un mensonge bien dit vaut mieux qu’une vérité mal agencée. C’est à croire que Kontchou, autre adepte du degré zéro de la politique, aurait fait des émules lorsqu’on écoute la dernière interview de Tchiroma dans les médias camerounais. Il explique à la diaspora qu’elle dois concentrer ses esprits et son intelligence à la construction du pays et non à salir son image à l’extérieur. Autrement dit, dire qu’on n’est pas d’accord avec Biya ne peut pas contribuer à construction du Cameroun et revient à salir l’image du Cameroun. C’est une preuve que donne Tchiroma que Paul Biya c’est le Cameroun.
Ceci n’est pas surprenant car il explique le bien fondé de la dernière révision constitutionnelle par le fait que la limitation du nombre de mandats a entraîné le détournements de deniers publics par ceux qui voulaient prendre la place du président. Autrement dit, et aussi paradoxal que cela puise paraître, Paul Biya président à vie, est le meilleur bouclier contre les malversations au sein de l’Etat camerounais. Sacré Tchiroma lorsqu’il va jusqu’à justifier les biens mal acquis par l’exemple de la famille royale d’Angleterre qui est riche de générations en générations. Au fait monsieur Tchiroma n’avez-vous pas encore fait le choix entre le principe électif et le principe héréditaire ?
Que dire alors lorsque le ministre de la communication conteste la légitimité de l’ONG qui accuse le président de biens mal acquis si ce n’est qu’il réaffirme juste son degré zéro de la politique en feignant d’oublier que la légitimité d’une ONG provient de son indépendance, de son expertise et surtout du fait qu’elle pose des actes qui visent la justice sociale et le bien-être des