Cameroun, Evocation : Quand Tchiroma critiquait Biya

Issa Tchiroma:Camer.beL’Oeil du Sahel a retrouvé des lettres ouvertes du ministre de la Communication qui indexait le régime. Pour qui aime ou adhère au Renouveau de Paul Biya, il y a dans l’édition numérotée 346 du 14 septembre de l’Oeil du Sahel, des phrases choquantes, écrites par le ministre Issa Tchiroma Bakary. Certaines sont simplement opposées à l’idée directrice du régime : «Notre bataille est juste, notre cause est noble, pour sûr nous gagnerons, car le soleil en déclin du Renouveau est déjà à 17 heures.» D’autres se proposent de clarifier la situation : «Quel est le septentrion qui fait entièrement confiance à Monsieur le président de la République ? Celui de vos rêves et de vos fantasmes ou celui des damnés de la terre et des forçats de la faim ?» Mais il y a aussi celles qui tuent : «L’expérience nous prouve que le Renouveau porte la poisse comme la nuée porte l’orage, l’échec lui étant à ce point consubstantiel qu’à son contact l’or le plus pur se transforme en ordure.»

L’Oeil du Sahel, l’hebdomadaire qui s’est spécialisé dans les nouvelles du septentrion camerounais, vient donc de donner à la politique camerounaise un sujet de discussion. C’est du moins ce qu’explique la présentation de cette longue réflexion de l’actuel ministre de la Communication, revenu au gouvernement après douze années de passage à vide, dans cette récente édition du journal sahélien. Il s’agit de comprendre sa «conversion politique», qui s’est produite comme d’autres ralliements, note notre confrère.

Mais, reconnaît l’Oeil du Sahel, le cas Tchiroma est «une curiosité pour ses concitoyens et un sujet d’études pour les politologues»… D’où qu’il est offert à la discussion publique. Car, il faudrait finalement lire entre les lignes avec l’hebdo du grand nord que la politique devrait choisir entre ceux qui se «déshabillent» et ceux qui gardent leur «dignité». Ce bref avertissement passé, toutes les lignes des cinq pages rédigées en 2003 (Lettre ouverte aux responsables du Rdpc originaires du septentrion) et en 2007 (Lettre aux congressistes de l’Undp de Bertoua) par M. Tchiroma constituent un réquisitoire sans concession du régime dirigé par Paul Biya. En interpellant les hommes politiques du pouvoir, l’auteur des deux lettres souligne en effet «l’obsédante pression de la pauvreté et la misère». Du point de vue des libertés publiques, Issa Tchiroma parlait alors des interdictions de séjour qui le frappaient ici et là, afin d’éviter qu’il passe un message opposé au discours du pouvoir. Et de dénoncer des élections «ou ce qui en tient lieu», bénies par «une Onel docile à la servilité».

Une telle catastrophe commandait alors, d’après le ministre de la Communication qui est revenu au gouvernement le 30 juin, que l’on recherche un candidat qui battrait Paul Biya. Depuis lors, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Issa Tchiroma pense-t-il donc toujours que : «C’est au nom de l’alimentaire, toute honte bue que le président national [de l’Undp] capitule, renonce à la conquête du pouvoir, prend un titre foncier au sein du gouvernement du Rdpc et abandonne en plein orage, dans une tourmente et une souffrance indescriptibles, ceux et celles pour qui il était l’incarnation de l’espoir et malheureusement aujourd’hui son cimetière» ? Pour l’Oeil du Sahel, il n’est pas difficile de répondre. Celui qui dénonçait «ceux qui agissaient comme il le fait lui-même au quotidien» aujourd’hui n’a pas changé car « ce n’est pas lui qui change, mais la situation ». Pour ne pas faire comme les «imbéciles qui ne changent pas d’avis».

A l'intention des lecteurs de Camer.be: Sondage, Internet et participation politique. Répondez à un questionnaire en ligne sur ce lien

© Mutations : Jean Baptiste Ketchateng
Paru le 30-09-2009 16:14:53


30/09/2009
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