Cameroun: Des membres du gouvernement suspectés de « complicité » du vol du bébé
Cathérine Bakang Mbock (en veste noire ci-dessus) affirme qu’il n’y a jamais eu vol de bébé. Son collègue Mama Fouda se terre dans un mutisme suspect, malgré les pressions venant de toute part. Le procureur d’Ekounou instruit une nouvelle enquête. Entre temps, des gendarmes tentent de déloger de force Vanessa Tchatchou de son lit d’hôpital.
Aux dernières nouvelles, le procureur de la République près le tribunal de première instance de Yaoundé-Ekounou, a instruit l’ouverture d’une nouvelle enquête au sujet du bébé de Vanessa Tchatchou, volé quelques heures seulement après sa naissance le 20 août 2010 à l’Hôpital gynéco-obstétrique de Ngousso. Cette enquête sera diligentée, selon les instructions du magistrat, par le commandant de la brigade de gendarmerie de Ngousso en personne. Entre temps, des sources indiquent que la présumée voleuse aurait été refoulée d’une représentation diplomatique, où elle sollicitait un visa en vue de s’échapper avec le fruit des 8 mois de grossesse de cette pauvre ancienne élève du Lycée de Ngousso. Jusqu’ici, les précédentes enquêtes sont toujours au point mort. Celle ouverte par la brigade de Nkolmesseng à la suite de la plainte déposée par le directeur de l’Hôpital gynéco-obstétrique de Ngousso, deux jours après le constat du coup de vol, reste sans suite. De même que celle ouverte par la police judiciaire.
Entre temps, les membres du gouvernement dans leur entièreté restent silencieux face à cette grossière disparition de bébé dans la couveuse d’un hôpital pompeusement baptisé de référence. Une histoire rocambolesque qui ternit l’image du Cameroun. Même le ministre de la Santé publique, André Mama Fouda, sous la responsabilité de qui travaille le directeur de cet hôpital, reste muet. Ceci malgré les multiples interpellations venant aussi bien du président de la commission nationale anti-corruption, Dieudonné Massi Gams que des représentations diplomatiques.
« Je vais recouper l’information et te relancer », s’est contenté de promettre le chef de la cellule de communication du ministre Mama Fouda, joint au téléphone par le reporter de Le Messager en vue de savoir la position de son ministre au sujet de cette scabreuse affaire. Même Issa Tchiroma Bakary, le ministre de la Communication d’habitude très disert, n’a jusqu’ici fait aucune sortie médiatique pour situer les Camerounais sur les raisons de ce laxisme dans les enquêtes.
Le ministre Cathérine Bakang Mbock des Affaires sociales va même plus loin, en affirmant qu’aucun enfant n’a été volé à l’Hôpital gynéco-obstétrique de Ngousso. Ceci rentre d’ailleurs en contradiction avec la position du directeur de cet hôpital, qui reconnaît le vol du bébé de Vanessa dans une correspondance du 7 décembre. «En temps que femme, mère et ministre de la République à qui le chef de l’Etat a confié un certain nombre de missions, madame Bakang Mbock sait quelle est la douleur de l’enfantement. Elle sait qu’il y a une fille Vanessa Tchatchou qui a porté un enfant durant 8 mois de grossesse, que cet enfant est venu au monde et qu’il a disparu comme par enchantement dans un hôpital public. Elle sait comment l’enfant a été soustrait de l’affection de sa mère. Elle sait aussi là où il se trouve actuellement. Il faut qu’elle s’exprime. Sinon, son silence ne peut être considéré que comme complice », dénonce Vincent Sosthène Fouda, homme politique camerounais dont la candidature pour la présidentielle de 2011 a été recalée par Elections Cameroon.
Il se dit d’ailleurs très déterminé à faire jaillir la vérité dans cette affaire, pour que les criminels qui continuent d’être protégés soient démantelés. Ce mercredi, cet homme politique organise une manifestation pacifique devant l’hôpital incriminé.
Focal. Attention à l’enlèvement !
La jeune Vanessa Tchatchou fait face aux violences physiques de toutes sortes, malgré les souffrances morales qui la hantent au quotidien. Hier, 24 janvier 2012, aux environs de 13 heures, cette dernière à été presque traînée au sol par les éléments de la gendarmerie nationale, qui souhaitaient l’amener on ne sait trop où, pour une audition instruite par le procureur.
On dirait une tentative d’enlèvement, puisque le cas Vanessa devient déjà un casse tête pour les trafiquants aux cols blancs, qui exerceraient à l’hôpital gynéco. On se serait attendu que le procureur lui-même vienne entendre la jeune Vanessa sur son lit d’hôpital, compte tenu de la gravité de la situation et du manque d’objectivité qui caractérise les hommes en tenues dans le suivi de l’affaire. Mais ce qui reste curieux dans cette histoire, c’est que l’infirmière major qui officiait le jour du vol d’enfant, et sous la responsabilité de qui ce bébé se trouvait, n’a jamais été auditionnée. Un médecin dont le nom est régulièrement cité dans cette mafia, continue de vaquer sereinement à ses occupations.
La présumée voleuse aussi, une dame
originaire de l’une des deux régions anglophones du pays et qui
travaillerait comme substitut du procureur auprès du tribunal de
première instance de Mfou, serait toujours terrée dans son domicile au
quartier Odza à Yaoundé. Alors que cela ne fait plus l’ombre d’aucun
doute, c’est elle qui détiendrait le bébé volé, selon certaines sources.
Joseph Flavien KANKEU