Cameroun : Amateurisme,incompétence : Nos ministres face à la mondialisation
La corruption n’est pas le seul mal qui mine notre économie et notre développement. Sans vouloir dédouaner les auteurs de détournements de fonds publics, nous conviendrons que l’opinion publique camerounaise s’est beaucoup focalisée depuis 2006 sur ce phénomène comme étant le seul problème à l’origine de la crise que nous connaissons au Cameroun, alors que d’autres causes sont aussi forces de blocage de notre économie.
Depuis plus d’une décennie maintenant, l’économie camerounaise navigue à vue, sans véritable ligne de visibilité. Il est difficile en effet de savoir quels sont les véritables objectifs politiques du pays, tant on ne sait qui pilote véritablement l’économie camerounaise.
Le flou absolu est entretenu par le fonctionnement même de nos institutions. Nous avons toujours eu un premier ministre, chef du gouvernement sans véritable feuille de route en matière de politique économique, d’autant plus que le Président de la République de qui il tient n’a jamais fait preuve d’une grande volubilité dans ce domaine. Et c’est peut-être là, la grande faiblesse de Paul BIYA depuis son accession au pouvoir.
En effet dans les discours du Président de la République, nous chercherons vainement de projets économiques pour le Cameroun développés, en dehors de grandes théories creuses qui n’ont de sens que pour ceux qui veulent leur en donner. Que peut-on entendre par « politique de grandes ambitions » ? Ca sonne creux, il n’ya pas de contenu. On est dans le flou artistique.
Aussi, n’est-il pas facile pour le Premier Ministre et ses ministres en charge des questions financières économiques et industrielles de broder un projet sur de telles assertions. Si le Président fait preuve d’insuffisance en matière de politique économique, il est plus surprenant que tous les professeurs d’économie qui ont cheminé avec le Président et occupé des postes importants soit comme conseillers, soit comme ministres n’aient pu produire un véritable projet pour amener le Cameroun vers le développement économique, et sortir le pays de sa léthargie.
En parcourant les fiches signalétiques des projets d’infrastructure jugés stratégiques par le gouvernement camerounais pour les années à venir, on est consterné par l’absence d’ambition – c’est le cas de le dire – et le niveau des projets qui sont supposés préparer l’avenir du pays.
Aucune création industrielle d’envergure n’est prévue au Cameroun d’ici la fin du septennat. Aucune vision en matière d’emploi, de lutte contre le chômage des jeunes, et pour les quelques projets cités au long de l’épais document du premier ministère, rien n’est précisé quant à la manière dont le gouvernement compte financer bien de projets qui devraient normalement être gérés au niveau du chef de district et non d’un chef de gouvernement.
La mondialisation a amené avec elle une nouvelle donne de l’économie mondiale. Les transactions financières se font à l’échelle mondiale et dans le cadre d’une économie virtuelle. Nos ministres ne maîtrisent pas les nouvelles technologies de l’information et de la communication. A l’heure d’internet, l’Etat paie encore les salaires avec des bons de caisse et les ministères n’ont pas de compte bancaire. L’Etat effectue ses achats en espèces sonnantes et trébuchantes. Combien de Camerounais disposent-ils d’un compte bancaire à ce jour sur le territoire national ? Les tontines prospèrent dans tous le pays, alors que le système bancaire ne peut financer les investissements productifs. Notre économie n’est pas celle du 21è siècle. Le pays ne peut prospérer ainsi.
Nos ministres faute de maîtriser les nouvelles règles du commerce mondial se font littéralement arnaquer par des traders et petits escrocs de la finance qui viennent piller les richesses de la nation : sociétés virtuelles, transactions bidon, faillites des entreprises nationales…
A vouloir spéculer sur l’exploitation de nos matières premières, le Cameroun se trouve détroussé de ses ressources, hypothéquant l’avenir des générations futures. Des concessions de service public sont réalisées sans étude préalable, sans véritable contrepartie, juste pour coller à la mode qui veut que l’on privatise. Ainsi, tout notre secteur industriel et énergétique a été bradé, sans espoir de reconstruction.
La corruption ne peut à elle seule justifier tous ces échecs, mais aussi l’amateurisme et l’incompétence qu’il faut reconnaître
Le nouveau gouvernement n’a pas dérogé à la règle, et nul doute que le redressement du Cameroun n’est pas pour demain. Il ne faut pas s’attendre aux miracles.