Braquage d’Ecobank à Bonanjo: Où en sont les enquêtes?

YAOUNDE - 30 Mars 2012
© James MBOUMA (L'Epervier) | Correspondance

Un an après cette opération spectaculaire de grande audace menée en pleine capitale économique par des assaillants venus du Wouri, les enquêtes stagnent.

Pour la majorité des Camerounais, les enquêtes recommandées par le Chef de l'Etat après chaque événement malheureux dans notre pays n'ont jamais donné de résultats probants par le fait que ce sont parfois ceux qui les avaient planifiés qui devenaient des acteurs sollicités pour les élucider. Ainsi, on est passé du lancement très médiatisé de ces enquêtes à l'oubli des événements sans qu'au passage, un seul vrai pas ne soit franchi dans la manifestation de la vérité. Le braquage de l'agence d'ECOBANK de Bonanjo à Douala le 18 mars 2011 à, non seulement démontré la curieuse vulnérabilité de notre pays, mais aussi semé le doute quant à la loyauté de nos forces de défense.

Au moment où le continent Africain est pris d'assaut par des groupes armés se réclamant des mouvements indépendantistes et de l'intégrisme religieux de tout bord, le trafic d'armes de guerre et de drogue fait planer un climat d'insécurité permanent dans tous les pays. Le Cameroun dont on vante la stabilité des institutions à travers le monde s'est retrouvé brutalement au centre de toutes les tentatives de déstabilisation. Bakassi Freedom Fighters et African Marine Commando se sont distingués par des attaques contre nos forces de défense et des prises d'otages sans qu'aucun citoyen ne puisse connaître exactement, ni leurs vraies motivations, ni les contours de négociations ayant marqué leurs actions quand il fallait répondre à leurs revendications.


Le Danger de l'intérieur

Le braquage du 18 mars 2011 à Bonanjo a révélé au grand jour tout ce qui n'était qu'un secret de polichinelle, c'est-à-dire que le ver était dans le fruit.

L'affairisme dans nos forces armées et la corruption qui les gangrène plus qu'aucun autre corps de l'Etat, ont exposé le pays aux risques de grande fragilité. Le déroulement des enquêtes a retracé le film des événements dont la fluidité et la facilité de leur exécution par des assaillants laissaient entrevoir des germes de complicité de certains éléments de la troupe. L'immobilisme des postes de contrôle de la marine» et l'intervention de la patrouille du BIR qui s'est soldée par la mort de son chef, abattu par des assaillants lourdement armés qui ont opposé une résistance farouche aux éléments des forces spécialisés, démontraient que, non seulement ces assaillants étaient mieux renseignés, mais qu'ils connaissaient la lenteur de réaction de nos forces du fait de la lourdeur du commandement.

L'arrestation de 03 ou 04 assaillants et leur exploitation ont permis de démasquer des gangsters tapis dans les rangs de nos armées. Les captifs ont désigné le capitaine de corvette Decke Nestor comme maillon essentiel de la chaine du braquage, ce qui, au vu de la gravité de la faute ne pouvait que contraindre le chef suprême des forces armées à signer le décret de sa révocation. Cet ancien officier qui avait tout pour faire une brillante carrière, mais qui a opté pour le grand banditisme est depuis son arrestation il y a un an, à la disposition de la justice militaire. La question que l'opinion se pose est de savoir pourquoi, malgré les preuves irréfutables concernant son implication dans le coup, il n'a pas encore été jugé?

La crainte de voir ce dossier se terminer comme ceux du colonel Oyono Nveng dans la tuerie de 21 militaires en 2008 au large de Bakassi, du caporal Ayong dans l'assassinat de 07 de ses camarades dans un poste avancé en période de conflit avec le Nigeria dans cette zone, de la fusillade à la CRTV, des incursions des bandes armées à Limbe ou de la découverte des armes et grenades dans un étang à Obala est grande quand on connaît la capacité des officiers de nos forces armées à se protéger mutuellement...

Dans les armées, des sources concordantes indiquent que l'arrestation du capitaine de corvette Decke Nestor n'a été possible que grâce au courage et à la volonté du MINDEF de mettre fin à certaines pratiques maffieuses qui empêchent la modernisation de nos armées depuis plus de 50 ans. Mais cette détermination de Mebe Ngo'o peut elle infléchir la position des vieux généraux conservateurs qui sont pour la plupart ses grands pères?


Circulation des armes

Dans des pays comme le Liberia, la Sierra Léone, la Côte d'Ivoire, la Guinée, le Tchad et la RCA pour ne citer que ceux là, la libre circulation d'armes et munitions de guerre du fait de la porosité des frontières a précédé l'éclatement de graves conflits car, militaires et responsables politiques étaient des otages de la course aveugle à l'enrichissement et ont oublié cet essentiel qui est la sécurité du pays. L'enchainement des incursions armées et des braquages loin des cotes de notre pays ne fait-il pas peser une menace sur les fondations des institutions ? Peut-on croire que la seule mise aux arrêts du capitaine de corvette Decke Nestor a suffi à démanteler un réseau qui semble bien installé dans la hiérarchie de la grande muette devenue grande sournoise ? La situation de nos forces armées fait dire aujourd'hui à certains Camerounais qui soutiennent des efforts d'assainissements des mœurs du Chef de l'Etat qu'il faudrait peut être élargir l'opération épervier dans les forces armées pour non seulement, traquer des gangsters en képi, mais aussi parvenir à l'avènement d'une armée loyale et professionnelle débarrassée de la corruption de l'affairisme et du clanisme.


01/04/2012
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