Une semaine après avoir publié un navet digne de Radio mille collines, les rédacteurs de l’appel d’Obala sont suivis par le président de l’Assemblée nationale dont le jeu reste cependant trouble. Le masque du Pan est finalement tombé.
Le peuple camerounais dans son ensemble est très indigné par les déclarations de certaines élites de la Lékié, réunies la semaine dernière à Obala, à l’effet d’appeler à la stigmatisation des ressortissants du Grand Nord, présentés comme étant les véritables instigateurs des actes de barbarie et de sauvagerie qui répandent morts, sang et désolation dans les familles. Car, il est difficile de comprendre pourquoi des gens peuvent-ils se laisser à des fantasmes aussi nauséeux et s’emporter de façon aussi malheureuse. L’appel d’Obala est d’une inopportunité effarante et constitue une démarche malheureuse de ponce-pilatisme et de jésuitisme mal placés.
Si Eyebe Ayissi et compagnie, sous le prétexte d’un soutien au chef de l’Etat et à la guerre qu’il a lancée contre la secte islamiste Boko Haram, tentent de travestir la réalité, il reste cependant que l’on ne saurait tancer les élites de la Lékié sans questionner l’attitude de Cavaye Yéguié Djibril, le président de l’Assemblée nationale (Pan). Jeudi 4 septembre en effet, alors que le chef de l’Etat vient de rentrer de son voyage en Europe, le très honorable pond un communiqué dans lequel, il dénonce les rédacteurs de l’appel d’Obala.
«Dans cet appel, les auteurs, sous le prétexte de mobiliser les compatriotes pour une guerre totale contre la secte islamique Boko Haram, dénoncent plutôt un complot qui serait ourdi par des ressortissants du Grand Nord et qui viserait à déstabiliser les institutions républicaines», écrit Cavaye Yéguié Djibril. Plus loin, il indique que ces «allégations sont porteuses de relents de stigmatisations à l’endroit des valeureux, dignes et fidèles fils du Grand Nord». Mieux, «elles sont ni plus ni moins qu’un appel à la partition du Cameroun qu’à sa construction ou à la mobilisation de tous pour la lutte contre un ennemi commun».
Jeu trouble.
Si le président de l’Assemblée nationale est dans son rôle lorsqu’il dénonce «de basses manœuvres qui ne visent qu’à ternir l’image de toute une partie du pays et aider au positionnement des individus», l’on se demande à quoi, lui, Cavaye Yéguié, joue-t-il ? Car, c’est bien lui qui, lors de la session parlementaire de juin, avait, du haut de son perchoir, indiqué, en présence de tout le sérail, du corps diplomatique et de Guillaume Sorro Kigbafori, le président de l’Assemblée nationale ivoirienne, en visite de travail au Cameroun, que «les complices de Boko Haram sont parmi nous, les uns tapis dans l’ombre, les autres actifs mais dans l’hypocrisie, faisant semblant d’apporter leur aide aux autorités, leur objectif étant de brouiller les pistes, certainement pour mettre le pays à feu et à sang».
Le Pan est même allé plus en soulignant que « ceci est inacceptable ! N’ayons pas peur, dénonçons les ! Ils doivent rendre compte de leur turpitude». Ce discours, en son temps, n’aurait attiré curieusement l’attention de grand monde. Mais avec la sortie des élites de la Lékié et la réaction de Cavaye via son communiqué de presse, l’on peut questionner le jeu trouble du Pan qu’on cite souvent comme étant une des pièces maîtresses des négociations dans la libération des otages.
Aussi peut-on penser que c’est bien le discours de la troisième personnalité de la République qui a prêté le flanc à la pantalonnade des élites de la Lékié qui, dans ce cas, seraient du coup excusables. Ce d’autant que ces élites de la Lékié n’auraient fait qu’exploiter le discours de Cavaye dont la proximité avec des personnalités impliquées dans le paiement des rançons, serait aujourd’hui établie avec les querelles sur le partage des milliards débloqués par l’Etat. L’on fait notamment référence au vice-Pm, Amadou Ali ; au président de l’Assemblée nationale, Cavaye Yéguié ; à l’incontournable député Abba Sidiki; au secrétaire général de la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh. À partir de cet instant, les pouvoirs publics seraient en droit de leur exiger un jour, des comptes pour leur implication dans la libération des otages et la gestion du pactole des rançons.
Autre point, lorsque Cavaye Yéguié déclarait que Boko Haram a des complices parmi nous, sur quel argument basait-il ce discours et qu’en entendait surtout-il par le terme « nous » ? Si tant est qu’il dispose des informations sur la présence au Cameroun et dans les hautes sphères de l’Etat des membres ou de chefs de la secte islamiste, qu’il soit mis en exploitation pour que la situation soit tirée au clair et que les fantasmes de l’élite de la Lékié, prise dans un mouvement de folie et un tourbillon délirant, cessent et fassent place à la lutte contre les ennemis réels du pays.