Biya fait la pluie et le beau temps chez les sénateurs
Intervenue du jour au lendemain sans explication, la baisse des émoluments des sénateurs illustre l'improvisation totale qui caractérise le fonctionnement de la Chambre basse du Parlement. Une institution davantage au service de Paul Biya que des lois.
La dernière session de travail du Sénat, fin juin-début juillet, n’a pas été une partie de campagne pour le secrétaire général, Michel Meva'a Meboutou. Ce dernier, ex-ministre des finances et cousin de Paul Biya, a dû affronter la fronde des membres de cette institution après avoir décidé de réduire leurs émoluments.
Protestation
De 1,3 million F CFA jusqu'à présent, cette rémunération mensuelle est subitement tombée à 850 000 F CFA, somme que touchent les députés. En novembre, le budget de la session 2014-2015 avait pourtant été voté sur la base d'une enveloppe arrêtée à 1,3 million F CFA par mois et par sénateur. Où passe désormais la différence ? Mystère…
Pour marquer leur mécontentement, certains parlementaires ont rédigé une pétition. Cependant, ce texte a été aussitôt étouffé par Peter Mafany Musonge, ex-premier ministre et actuel grand chancelier des Ordres nationaux, qui préside le groupe ultra-majoritaire du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC).
Informel
Si les sénateurs peuvent toujours se réconforter avec la Toyota Avanza qui leur a été offerte dans le cadre de leur fonction, ce contexte illustre l'improvisation - pour ne pas dire l’informel - dans laquelle la seconde chambre évolue depuis sa création en juin 2013. Présidée par l'ancien vice-premier ministre Marcel Niat, mais dirigée dans les faits par Michel Meva’a Meboutou, le Sénat ne dispose toujours d’aucun siège. Il est logé, à titre provisoire, au 5e étage du Palais des congrès de Yaoundé. Dans l'attente d’une paierie et de services comptables dignes de ce nom, les sénateurs sont rétribués en liquide, de la main à la main. Aucun organigramme n’est encore finalisé.
Créée après dix-sept ans d’attente (l’existence du Sénat est inscrite dans la Constitution de janvier 1996), cette chambre s'avère surtout être une rente pour les principales figures du parti majoritaire, sans que son rôle n’ait une quelconque influence sur l’approbation des lois. Sur 100 membres, plus de 80 appartiennent au RDPC, dont 30 ont été directement nommés par Paul Biya. Autant dire que le chef de l'Etat peut manœuvrer comme bon lui semble.