Auchan expérimente le paiement biométrique
La volonté des commerçants de simplifier et d’accélérer le processus de paiement donne lieu à de nombreuses initiatives. L’une des plus aboutie est surement le paiement sans contact qui tend à se démocratiser grâce à la diffusion de supports de paiement conformes aux normes NFC.
L’état des développements relatifs à cette technologie était résumé dans le rapport Pauget-Constans sur l’avenir des moyens de paiement publié fin avril.
« En France, la grande distribution a commencé à équiper ses TPE de fonctions de paiement sans contact. Ainsi, Carrefour a commencé à utiliser cette fonctionnalité et comptait 2,5 millions de porteurs de la carte Pass MasterCard dotée de la fonction sans contact. Celle-ci a été utilisée au moins une fois par 34 % de ces porteurs, avec un montant moyen de 11 euros. En outre, Visa Europe mentionne que 400 000 cartes avec la fonction sans contact étaient émises en France à fin 2011 et que 100 000 TPE étaient déjà adaptés même si très peu ont été activés », résume le rapport. « Le développement devrait s’accélérer puisque depuis avril 2011 le GIE carte bancaire a donné son agrément à l’implantation de terminaux de paiement sans contact partout en France, au-delà des expériences dans certaines villes comme Strasbourg, Nice ou Caen».
Mais les nouveaux processus de paiements ne se résument pas à la seule technologie sans contact NFC. Plusieurs commerçants expérimentent actuellement des solutions de paiements biométriques à l’instar du distributeur français Auchan, qui mène l’expérience depuis plusieurs mois.
« Nous voulons simplifier le passage en caisse et enrichir l’expérience client. Cela passe par une solution qui supprime la manipulation du support de paiement sans dégrader le niveau de sécurité, voire l’améliore », indique Arnaud Crouzet, directeur du développement monétique du groupe Auchan.
« L’utilisation d’une technologie sans contact à moyenne distance répond à cette volonté. Toutefois, il nous fallait absolument trouver un moyen d’éviter le stockage des données biométriques sur des serveurs centraux, cette spécificité étant le principal inconvénient des solutions de paiement biométrique développées dans le passé. L’authentification systématique requise par la technologie Natural Security fait appel à la biométrie embarquée, c’est-à-dire un geste volontaire de l’utilisateur », précise-t-il.
Authentification forte
La solution expérimentée chez Auchan effectue un rapprochement entre l’empreinte digitale ou le réseau veineux situé sous la phalange d’un des doigts du payeur et l’information contenue dans la puce de sa carte bancaire.
« Notre système transforme la biométrie, qui est habituellement utilisée comme solution d’identification, en une méthode d’authentification forte grâce à l’utilisation d’un support personnel sécurisé (ndlr : la carte de paiement dans ce cas présent) intégrant à la fois les données biométriques, l’application qui sert à en faire la comparaison et l’application de paiement », explique Cédric Hozanne, directeur général de Natural Security, la société qui définit les spécifications du système et promeut sa diffusion.
« En recourant à deux facteurs d’authentification, le système assure un respect total de la vie privée puisqu’il ne repose pas sur l’utilisation de bases de données centralisées. Cette spécificité répond à une recommandation forte de la CNIL et aux préoccupations de nombreux pays en Europe et dans le monde »,souligne André Delaforge, responsable marketing chez Natural Security.
A la différence de la technologie NFC, nécessitant un passage de la carte à quelques centimètres du terminal, la solution de Natural Security repose sur la technologie WPAN (Wireless Personal Area Network) qui autorise des échanges d’informations jusqu’à 2 mètres, évitant ainsi au payeur d’avoir à manipuler sa carte de paiement.Elle permet aussi de lever les craintes relatives à la sécurité que peut susciter le paiement sans contact.
« Le client doit poser son doigt sur un lecteur pour procéder au paiement. Cette méthode est ainsi beaucoup plus sécurisée puisque seul le porteur de la carte est éligible. La carte peut ainsi être envoyée en courrier simple dans la mesure où personne d’autre ne pourra l’utiliser », relève Arnaud Crouzet.
L’authentification forte du porteur de carte permet aussi de supprimer le plafond de paiement en vigueur dans le cadre du paiement sans contact, généralement fixé à 20 ou 25 euros par règlement, ainsi que la nécessité de retaper le code au-delà d’un certain montant cumulé de dépenses.
Lancée il y a cinq mois, l’expérimentation chez Auchan concerne plusieurs centaines de clients volontaires de la Banque Accord qui se sont vus remettre une carte Mastercard dédiée (toutefois, l’emprunte biométrique pourra être apposée sur une carte de paiement classique qui intègre ou non le NFC). Ceux-ci ont la possibilité de tester la solution basée sur la reconnaissance de l’empreinte digitale et celle utilisant le réseau veineux.
« C’est un gain de temps énorme », se réjouit Arnaud Crouzet. « Le système de reconnaissance du réseau veineux nécessite des investissements en matériel plus élevés, bien qu’en terme de fonctionnement les deux systèmes sont assez comparables. Toutefois, le réseau veineux est moins sensible en cas de coupure du doigt, et le système se révèlerait plus fiable et plus sécurisé », remarque-t-il.
Le groupe attend désormais d’analyser l’ensemble des retours clients avant d’envisager le déploiement de la solution à plus grande échelle.
De son côté, Natural Security, dont l’actionnariat est partagé entre des banques (Crédit Agricole, Crédit Mutuel Arkea, banque Accord, BNP Paribas), des commerçants (Auchan et Leroy Merlin) et des fournisseurs de solutions de paiement (Ingenico), envisage une exploitation de la technologie pour d’autres usages que le paiement en face à face comme le règlement des transactions en ligne, les opérations sur distributeurs automatiques, l’accès à certains services, etc.
« Natural Security est une brique d’authentification qui peut être ajoutée à un moyen de paiement ou à d’autres services », résume Cédric Hozanne. « Nous cherchons à créer un standard de fait. Celui-ci n’aura de sens que s’il est déployé massivement », ajoute-t-il.
Bien qu’elle tire ses revenus de la commercialisation de licence aux fabricants industriels, la société participe activement à la promotion de la solution auprès des utilisateurs finaux. Au-delà des expérimentations en cours (chez Auchan, Leroy Merlin et « d’autres commerçants parfois concurrents de nos actionnaires »), Natural Security finalise un partenariat avec une université aux Etats-Unis.
Sources : Bfinance.fr / Le Journal du Siècle