Selon des indices, d’autres personnalités issues du sérail, soupçonnées d’avoir joué un rôle dans les négociations, seraient dans le viseur de la secte islamique déchaînée. Panique chez les «négociateurs».
Les faits sont lourds de significations. Les membres des familles de hauts dignitaires du régime originaires du septentrion seraient, selon des sources introduites, en train de prendre leurs quartiers à Maroua et Yaoundé. L’actualité dans cette partie du pays s’y prête certainement. Mais, de mémoire d’observateur, en dehors des rapts de ressortissants étrangers, le groupe islamique n’avait jamais commis d’acte terroriste de grande envergure au Cameroun, visant des proches de hautes personnalités d’obédience islamique originaires des régions frontalières avec le Nigeria. Jusqu’au 27 juillet dernier, par exemple, la famille du vice-Premier ministre en charge des Relations avec le Parlement, Amadou Ali, observait à distance les crimes odieux perpétrés par les hommes sans foi ni loi venus du Nigeria voisin.
Il n’en fallait pas plus pour que ce dimanche, très tôt et avec une violence inouïe, les déments d’Allah tuent le cadet du vice-Pm Alhadji Malloum, son cousin Mohamadou Djougoudoum, son homme à tout faire à Kolofata et à Maroua, Madi Talba, la sœur de son épouse, 3 autres personnes travaillant chez lui ainsi que des gendarmes de garde ce jour. Dans la foulée, ils vont emmener avec eux vers une destination inconnue son épouse et quelques proches.
Apparemment, bien qu’il leur ait échappé, c’est Amadou Ali en personne qui était la cible principale de l’escadron de la mort, l’enlèvement du chef de canton de Kolofata et maire de la ville, Seini Boukar Lamine ainsi que de proches ne paraissant alors que comme des dégâts collatéraux. De sources non confirmées rapportent que les éléments du groupe islamique avaient pourtant été mis au parfum du séjour de l’ancien ministre d’Etat à la Défense dans son village natal, pour participer aux festivités de fin de Ramadan. Mais, on ne sait trop comment, l’ancien secrétaire d’état à la Défense chargé de la gendarmerie (Sed) va renvoyer le déplacement à la dernière minute, préférant faire voyager son épouse en mission avancée. Ce qui laisse entrevoir de nombreux non-dits autour de l’attitude de ce Kanuri.
Mais, une question ne manque pas de tarauder les esprits : pourquoi Amadou Ali était-il particulièrement visé ? D’abord, répondent des analystes, son nom aura, plusieurs fois, circulé dans le cadre des négociations pour la libération des otages français. Il n’est pas superflu de rappeler que, dans les coulisses des discussions pour la récupération du prêtre Georges Vandenbeusch, la presse avait longuement évoqué son entregent dans cet heureux dénouement. En effet, alors que le monde entier supputait encore sur les circonstances et les conditions de la libération du curé de la paroisse de Nguétchéwé, mardi 30 décembre 2013 aux environs de 23h ainsi que sa remise aux autorités camerounaises, certains médias vont révéler que le vice-Pm y était pour beaucoup. Il n’a jamais tenté de démentir ces assertions.
Frayeur chez les entregents
Ceux qui en parlaient dans les médias prétendaient déjà qu’en avril
2013, Amadou Ali avait hébergé, pendant quatre jours dans sa résidence
de Kolofata, le négociateur de Boko Haram pour la libération de la
famille Moulin-Fournier. Il serait, pour cela, un maillon de poids dans
la chaîne des tractations. Les djihadistes nigérians, dont on connaît
l’intransigeance, la témérité et la férocité, cherchent rarement à
liquider les otages pris au Cameroun et ne sauraient libérer un otage
dit précieux sans – lourde – contrepartie financière.
Le journal L’œil du Sahel, plus précis sur le sujet, soutiendra, dans la foulée, que c’est un certain Hassan qui était au centre de la manœuvre tandis qu’un certain Lawan, originaire d’Achigachia, petit village situé aux confins du Nigeria, dans le Mayo-Tsanaga, jouait les intermédiaires entre la partie camerounaise et Boko Haram. C’est lui qui aurait même préfinancé l’opération, et ne serait pas totalement rentré dans ses frais. Ainsi, en dépit de ce happy-end, les membres du groupe islamique auraient juré de se venger et de revenir à la charge avec plus de férocité. Il se murmure que c’est à cette période que le «réseau» Amadou Ali aurait été mis hors circuit, au profit dit-on de la «filière» Cavaye Yeguie Djibril.
Seulement, mis sur orbite lors des négociations des autres otages, le président de l’Assemblée nationale (Pan) aurait également commis le même pêché de cupidité. A l’Extrême-Nord, on croyait que les extrémistes avaient oublié. Et, à ce qui paraît, l’«intermédiaire» Cavaye serait lui également, devenu une cible privilégiée des islamiques, plus que jamais irrités et déchaînés et qui attaquent, désormais, avec un nombre impressionnant d’éléments lourdement armés.
Dans la même veine, on cite le nom du secrétaire général à la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh, comme étant dans l’œil du cyclone de la nébuleuse islamiste. Il se susurre qu’il serait de ceux qui auraient coupé la poire en plusieurs morceaux, lorsqu’il a fallu satisfaire les besoins de la secte pour la libération du père Georges Vandenbeusch. Info ou intox ? Tout le monde en parle sous cape au point où, aujourd’hui, on pense que la secte ne voudrait plus entendre parler de lui dans ses tractations avec le pouvoir de Yaoundé. On parle également dans ce sillage du député Abba Malla de Mora qui serait, dit-on, présenté comme une cible de poids de la secte islamique.