Atangana
Mebara. En attendant le verdict ce 30 avril, la défense de l’ex Sg/Pr
soutient que l’accusé est en « prison pour n’avoir rien fait ». Récit de
la plaidoirie.
Des moments graves partagés entre l’émotion, la « peur » et la « confiance ». Surtout des instants de droit.
Mieux, des leçons de droit. Vendredi dernier au tribunal de Grande
instance du Mfoundi, le collectif de défense de Jean-Marie Atangana
Mebara a tenté de réhabilité l’ex Sg/Pr dans son droit. La liberté. Car,
« le dossier est juridiquement vide », soutient Me Claude Assira. Et de
ce fait, les conseils de l’ex Sg/Pr plaide pour l’acquittement de M.
Atangana Mebara, du chef de tentative de détournement de 24 milliards
FCfa (argent destiné à l’achat de l’avion présidentiel), « les faits
n’étant pas établis et en raison de l’absence de la tentative ».
De même pour l’accusation de 1,5 milliards FCfa
(arriérés de locations d’avions de la Camair destiné au loueur d’avion,
Ansett), dont la défense estime également que « les faits ne sont pas
établis ». Quant à l’accusation de complicité de détournement de 121
millions FCfa, (reliquat d’un crédit de 720 millions FCfa envoyé par
l’Etat du Cameroun à son ambassade à Washington), la défense évoque
l’absence d’éléments caractéristiques de la complicité. De manière
élaborée, les quatre avocats de Jean-Marie Atangana Mebara sont arrivés à
ces conclusions. Chacun dans son ton.
En effet, les conseils de l’ex Sg/Pr ont fait le procès de la Justice.
Me Ebanga Ewodo parle de « cannibalisme judicaire » à l’encontre de
Jean-Marie Atangana Mebara. « Quel est le fondement juridique de
l’action engagée contre Atangana Mebara », interroge-t-il. L’ancien
bâtonnier estime que son client est poursuivi sur la base des
interprétations subjectives. C’est le cas pour l’accusation de 24
milliards FCfa.
Avion presidentiel
L’avocat rappelle que Mebara n’est pas Sg/Pr lorsque le projet
d’acquisition de l’avion présidentiel est élaboré, encore moins lorsque
l’argent débloqué disparait. « Comment rétablir la fortune publique de
l’Etat. Voilà la question que Mebara s’est posé pour régler les torts
occasionnés ». Me Ebanga estime alors que son client est poursuivi parce
qu’il a « tenté de récupérer l’argent que d’autres ont volé ». Me
Assira lui avait déjà emboité le pas en constatant qu’une lettre, celle
écrite à Apm pour récupérer les fonds détenus par Gia, a suffi pour
condamner Mebara. « Le lien de causalité n’est pas établi puisque la
lettre ne laisse pas apparaitre les éléments d’exécution du
détournement. Le lien de causalité doit être direct pour que le fait
soit punissable », souligne Me Assira. Et de s’interroger : « Quel est
le texte de droit qui a été violé en demandant à Apm de récupérer
l’argent ? On n’est pas en présence d’un contrat. C’est un mandat
écrit.» Me Assira crie à l’acharnement.
Machine judiciaire
Et lorsqu’il parle de la complicité de détournement de 121
millions FCfa, il y voit « un délire total ». « On reproche à Monsieur
Mebara de n’avoir pas donné des instructions à l’ambassadeur Mendounga
pour arrêter les dépenses. La complicité par extension n’existe pas »,
fait-il savoir. Me Assira évoque l’article 97 du Code de procédure
pénale qui indique que pour qu’il y ait complicité, il faut avoir
provoqué de quelque manière que ce soit l’infraction. S’agissant de
l’accusation de 1,5 milliard FCfa, les avocats de Mebara estiment « que
le but recherché est de poursuivre, cherchez n’importe quoi, peu
importe, mais il faut poursuivre ». Pour cette accusation, Ansett,
elle-même, loueur d’avion de la Camair, a confirmé que l’argent lui a
été versé ainsi que le témoignage du liquidateur de la Camair.
Me Ekani s’offusque de ce que « Atangana Mebara est injustement arraché à
l’affection de sa famille et exposé aux affres de la solitude et de
l’angoisse face à cette machine judiciaire implacable et déshumanisante
». Elle a la voix tremblante et les yeux larmoyants lorsqu’elle se
souvient que Me Denis Ekani, son père défunt, qui a commencé la
procédure aux côtés de Mebara, a attendu 10 mois avant d’avoir accès au
dossier. « C’est une torture morale », s’émeut-elle. Me Ekani évoque le
parcours de son client. « Un self made man », qui a fait face à la
disparition de son père à l’âge de 16 ans et « emprunté le chemin d’une
prestigieuse carrière dans l’administration camerounaise ». Et lorsqu’il
prend la parole pour la dernière fois dans ce procès samedi vers 3h,
Mebara affirme : « J’ai servi loyalement mon pays et le chef de l’Etat.
On a monté un dossier judiciaire contre moi et on attend de vous que
vous confirmiez des accusations politiques ». Le fougueux et spirituel
Me Nguini, à en croire son rêve, pense toutefois que le tribunal ne
confirmera pas ces accusations. « J’ai fait un rêve. La Une des journaux
affichait à profusion « Atangana Mebara acquitté ». Verdict le 30
avril.