Englué dans des scandales itératifs, l’Archevêque de Yaoundé a finalement abdiqué, en se conformant à l’occasion aux dispositions du canon 401,2 du Code du droit canon de 1982, lui imposant une renonciation.
Si pour le néophyte il s’agit d’un fait inédit, à la réalité il s’agit plutôt de la résultante de nombreux griefs à l’encontre de celui qui jusqu’alors, présidait aux destinées de ce prestigieux archidiocèse qui doit inéluctablement son aura à son implantation dans la capitale politique du pays. Mais autant cet état de fait lui octroyait des avantages singuliers, autant lesdits avantages semblent l’avoir grisé pour le muer en véritable homme d’affaires. Malheureusement, le gros de celles-ci fut foireux à plus d’un titre, ne serait-ce qu’à en juger par le fait pour Mgr Victor Tonyé Bakot de faire la manchette des journaux depuis quelque temps.
Toutes choses pour lesquelles, lesdites populations saisirent, au
travers d’un mémorandum aussi bien la Conférence épiscopale nationale
que le Vatican. Et quand bien même le Nonce apostolique au Cameroun, Mgr
Pierro Pioppo, réussira à tempérer les ardeurs vindicatives desdites
populations, le dossier disciplinaire, pourrait-on le qualifier de Mgr
Victor Tonyé Bakot enregistrait ses premières notes sombres. Si de fait
son statut d’archevêque l’autorise à faire des placements financiers
pour le compte de l’archidiocèse et dans l’optique d’en fructifier les
avoirs, Mgr Victor Tonyé Bakot va s’y fonder pour se lancer dans les
affaires tous azimuts.
Ainsi en sera-t-il de son intention d’intégrer la
distribution des produits hydrocarbures, au plus fort de la
libéralisation dudit secteur. Mais loin de s’entourer pour ce faire de
compétences requises, il se laissa plutôt emporté par quelque réflexe
identitaire en faisant plutôt confiance à certains des siens qui ne
traduisirent pas en investissements effectifs, les fonds pourtant
mobilisés pour ce faire. Ainsi, l’archidiocèse va connaître ses
premières difficultés de trésorerie.
Au point de compromettre les salaires des personnels enseignants, alors
que notoirement chaque archidiocèse se veut une entité plutôt autonome
au plan financier. Et devant l’important déficit engendré par le
placement financier indu dans la distribution de produits hydrocarbures,
Mgr Victor Tonyé Bakot crut devoir le combler en opérant un appel de
fonds auprès d’institutions financières aussi bien nationales
qu’internationales et notamment une banque saoudienne et le groupe Cbc
qui lui accordèrent des avances de fonds à hauteur de près d’une dizaine
de milliards de Fcfa. Mais à échéance, aucune des institutions
financières ne put rentrer dans ses fonds, contraignant ces dernières
ainsi à muer leurs avances de fonds respectives en des créances
compromises autorisant la mise en branle de procédures judiciaires à
l’encontre de l’archidiocèse de Yaoundé. Mais autant pour la Cbc, il
s’est agi de trouver quelque arrangement à l’amiable, pour la banque
saoudienne, il se sera plutôt agi de lever l’hypothèque sur le bien
immeuble abritant la cathédrale de Yaoundé qui constituait la garantie
de son avance de fonds.
Ceux qui alimentèrent en son temps, un nouveau scandale à mettre à
l’actif du prélat qui dut s’appuyer à l’occasion, sur le délégué du
gouvernement auprès de la communauté urbaine de Yaoundé pour déclarer le
site, objet de la convoitise des Saoudiens, monument culturel national
et par conséquent, incessible sous quelque forme que ce soit. Or,
l’intention des Saoudiens était d’y ériger une mosquée en détruisant
préalablement la cathédrale de la capitale. Scandale qui, s’il avait été
effectif aurait définitivement mis à nu, l’affairisme exacerbé de Mgr
Victor Tonyé Bakot. Mais loin de retenir les leçons inhérentes à cette
autre affaire foireuse, il perpétua dans le recours indu aux avances de
fonds auprès des institutions bancaires et financières et singulièrement
du groupe Cbc et ce, en se comportant littéralement comme un potentat.
Aussi, quand il y a quelques jours le Pape François, au sortir des
Journées Mondiales de la Jeunesse s’insurgea contre la propension de
certains de ses collaborateurs à s’enfermer dans une véritable tour
d’ivoire, l’on comprit que son message était prémonitoire à plus d’un
titre, à l’encontre de ceux des évêques qui ont littéralement transformé
leurs diocèses en de sortes de royaumes.
Eviction sibylline
Fort de ce qui précède et quand bien même les dispositions de la loi
canonique régissant la renonciation d’un évêque sont claires, il ne fait
point de doute que Mgr Victor Tonyé Bakot aurait simplement été démis
de ses fonctions. Une assertion fondée en ce qu’on ne démissionne guère
dans les conditions qui furent les siennes dans le cas d’espèce. En
effet, on ne saurait dire qu’il entendait de quelque manière se prémunir
de ses ennuis de santé, mais plutôt pour cause grave tenant des
frasques itératives à mettre à son actif. Mais comme le hasard semble
bien faire les choses, le Vatican à tôt fait de commettre Mgr Jean
Mbarga, alors économe dans l’archidiocèse de Yaoundé que combattit à son
temps Mgr Victor Tonyé Bakot, pour colmater les brèches, en qualité
d’administrateur apostolique.
Toutes choses qui induisent conséquemment qu’à la réalité, Mgr Victor Tonyé Bakot aurait simplement été par la spirale scandaleuse dans laquelle il s’était enlisé depuis quelques années. Mais tenant à ne point salir la réputation de l’Eglise catholique au Cameroun, le Vatican a préféré taire les raison profondes de cette démission, en servant à l’opinion un communiqué des plus laconiques. Pourtant, au regard des griefs évoqués supra, on peut valablement dire qu’il ne s’agit guère d’une démission mais bien plus d’une éviction en bonne et due forme pour réfréner la saignée financière de l’archidiocèse de Yaoundé. Et comme par ailleurs il n’est pas le seul englué dans l’affairisme exacerbé, nul doute que les prochains jours nous révèleront d’autres démissions d’évêques tout aussi empêtrés dans de véritables réseaux maffieux comme le fut incontestablement Mgr Victor Tonyé Bakot.