Une quarantaine de morts reconnus par le gouvernement, par le truchement de son ministre d’Etat d’alors, en charge de l’Administration territoriale et de la décentratlisation, Marafa Hamidou Yaya. De nombreuses arrestations ayant donné lieu à des procès et condamnations.
Voilà cinq ans que le Cameroun a vécu une fin de
mois de février particulièrement agitée. Dans un discours prononcé le 27
du même mois, le président Biya reconnaît que « notre pays (était) en
train de vivre des événements qui nous rappellent les mauvais souvenirs
d’une époque que nous croyions révolue ».
Cinq provinces sur les 10 devenues régions étaient en ébullition : deux
des quatre départements que compte le Littoral : le Wouri et le Moungo,
une grande partie du Sud-Ouest, l’Ouest et le Nord-Ouest et Yaoundé,
siège des institutions dans le Centre. Mais cette agitation populaire
née d’un malaise social ne s’arrête pas au Cameroun.
15 % d’augmentation des salaires de base pour les civils et les
militaires au niveau de la Fonction publique ; importation du ciment :
10% de baisse pour le tarif extérieur ; logement des fonctionnaires et
agents de l’Etat : indemnité portée à 20 % du salaire de base ;
suspension des taxes et droits de douanes sur les produits de première
nécessité : poisson, riz, froment (blé) dur, semencce de riz, farine de
blé, huile de table, accélération des procédures relatives au payement
de la dette intérieure, c’est dans cette foulée que le chef de l’Etat
lance le processus de recrutement de 25 000 jeunes diplômés à la
Fonction publique. Dans tout cela le secteur privé et l’informel ne
peuvent bénéficier que des mesures qui assouplissent la drastique loi du
marché. Ce qui n’est pas négligeable, mais éphémère quand on sait que
le commerçant a l’imagination fertile quand il recherche le bénéfice.
Dans le secteur privé, on aurait esquissé un sourire si, comme par le
passé, les travailleurs auraient aussi bénéficié de quelque chose
ordonné par le chef de l’Etat. Si l’on peut saluer les mesures fiscales
concernant les denrées de première nécessité, écrivions-nous au Messager
à l’époque, il est douteux qu’elles puissent prévenir d’autres émeutes
de la faim, étant donné qu’elles ne rassurent pas tout à fait les
populations. Ces mesures ne peuvent tenir qu’un temps très limité. Dans
la mesure où nos habitudes de consommation nous rendent tributaires de
l’extérieur.
Par snobisme ou par mentalité de colonisé, nous
préferons ce qui vient d’ailleurs à ce nous produisons localement. Alors
comment juguler les prix des produits importés ? Il faut aussi compter
avec la corruption des agents de l’Etat. Et même si ces mesures étaient
garanties dans la durée, elles ne ressoudront pas l’équation de la vie
chère qui est d’abord et avant tout affaire de politique de production.
La baisse ou la suppression des taxes à l’importation n’est qu’une
mesure palliative et ponctuelle. Elle ne peut tenir lieu que de
politique de stabilisation des prix qui, elle prend d’abord en compte
l’offre des biens à consommer.
Cinq ans après les émeutes de la faim et les
mesures prises à l’époque, nous voici à nouveau rattrappés par la vie
chère. Même l’eau et l’électricité ont augmenté de prix, entraînant une
forte spéculation qui étouffe davantage les consommateurs. Surtout qu’en
augmentant les prix de ces produits incontournables, on n’en a même
pas. Les pénuries d’eau et de rationnement de l’électricité font partie
des frustrations quotidiennes des Camerounais.
Quand on sait qu’une nouvelle augmentation du prix des hydrocarbures
peut advenir à tout moment sous les injonctions de la Banque mondiale et
du Fmi, il est fort à parier que l’on est pas si éloigné de
l’atmosphère sulfureuse de 2008. Surtout que les bailleurs de fonds
estiment, sans doute avec raison, que la subvention consacrée au
hydrocarbures profitent plus aux nantis qui roulent carosse qu’au petit
peuple. Alors vigilance ! Prudence !