Comme son prédécesseur, le chef de l’Etat devrait quitter le palais de l’unité en cours de mandat. C’est un deal secret passé avec la communauté internationale.
Le scénario d’une démission du Président va-t-il se produirecomme en 1982 où le Président Ahidjo, 2 ans après sa réélection, avait brusquement quitté le pouvoir ? Selon des confidences que nous avons pu personnellement glaner auprès de très hautes personnalités qui ont leurs habitudes dans les couloirs du palais présidentiel, et aussi d’après plusieurs analystes avertis de la scène politique camerounaise, il est évident que l’actuel Chef d’Etat n’en a plus que pour 3 années au plus au palais.
Selon, toute vraisemblance, le Président démissionnera après avoir mis son dauphin à la présidence nationale de son parti le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais(RDPC). Dans ces mêmes colonnes, le 29 août 2011, reprenant les informations contenues dans le très introduit journal parisien « la lettre du continent », nous relayions ces confidences du Président BIYA « himself » au Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies (ONU), Ban Ki Moon.
Le journal de la rue Montmartre indiquait alors que Paul Biya a bel et bien confié à Ban Ki Moon qu’il a l’intention d’être candidat à la présidentielle de 2011. Cependant,il lui avait déclaré que ce serait le dernier mandat qu’il souhaite effectuer pour «assainir le climat politique». Le Président Biya aurait rassuré Ban Ki Moon qu’il est en train de préparer sa succession.
A cet effet, dans un délai de deux ans, il abandonnerait la présidence du RDPC pour la confier à celui qui sera son successeur. Après avoir quitté le pouvoir, il souhaite se retirer à Mvomeka’a son village natal au sud du pays. Ceci explique pourquoi trois jours seulement après le scrutin du 09 octobre 2011, Ban Ki Moon s’est réjouit de la tenue pacifique de l’élection présidentielle.
Ainsi, Paul BIYA a voulu mettre de son côté le Secrétaire Général des Nations Unies. Le deal que BIYA a passé avec la communauté internationale fait ressortir le truisme d’après lequel après l’élection présidentielle de 2011, il ne restera au pouvoir que pendant 3 années.
Dans cette perspective, la Chine aura été pour le président Biya une alliée précieuse dans cette démarche. Les américains lui avait fait comprendre clairement qu’il n’était plus question qu’il se présente à une élection.Paul BIYA va dès lors entreprendre une offensive diplomatique sans précédent.
Il se rendra en Chine, en fin juillet 2011, pour une visite de 3 jours qui lui a permis de plaider sa cause auprès des Chinois qui disposent d’un droit de véto au conseil de sécurité de l’ONU. Ce n’est qu’au terme de cette visite qu’il est revenu à Yaoundé pour convoquer le corps électoral après les assurances d’une protection de l’Empire du Milieu. C’est donc ainsi que BIYA a retourné en sa faveur une partie de la communauté internationale qui voyait d’un très mauvais oeil sa candidature à la dernière élection présidentielle en raison de sa longévité au pouvoir.
Quelques mois avant de réviser l’article 6 alinéa 2 de la constitution limitant le nombre de mandat, le Président Biya s’interrogeait face à l’ambassadeur américain Niels Marquardt « quelle fierté aurais-je si je laissais le Cameroun dans cet état aujourd’hui ? » A Ban Ki Moon, comme relevé plus haut, il va affirmer vouloir « assainir le climat politique » avant de partir. Partir la tête haute Les proches du Chef de l’Etat le savent, même s’il n’a jamais cessé de manoeuvrer pour conserver le pouvoir le plus longtemps possible, il est obsédé par l’image qu’il laissera de sa présidence.
Dès le 21 juillet 1990 dans une interview accordée à la Radio Monté Carlo( RMC), il déclare qu’il souhaite laisser à son pays l’image de celui qui a apporté la démocratie et la prospérité. Sortie d’un long sommeil de plus de 20 années, il sait qu’il en est à ses dernières années de pouvoir et conscient qu’il a échoué dans le domaine économique et politique, il appelle ses ministres à jeter toutes leurs forces dans la bataille.
Depuis près d’un an, le Président n’est pas sorti du pays et veut suivre personnellement le démarrage et l’avancement de certains grands travaux qui sont le coeur de ses grandes réalisations. Avec l’espoir que le début de réalisation de ces chantiers fera en sorte que le retard économique accusé par le Cameroun sous sa présidence soit rattrapé et ainsi, lui permettre de sortir la tête haute.
Le doute sur sa volonté de partir
Un chantier important sur l’apaisement entre le nord et le sud reste désormais sans progrès. C’est la question du rapatriement de la dépouille de son illustre prédécesseur qui n’avance pas et qui a pourtant laissé des blessures profondes entre le Chef de l’Etat et toute une partie du pays. Avec la récente incarcération du Ministre Marafa Hamidou Yaya, le Nord a de plus en plus l’impression que Biya ne leur veut pas du bien. Ceci alors que Germaine Ahidjo, encore vivante, attend toujours de livrer son dernier combat qui est celui de restituer l’honneur de son époux de Président.
Le Président Biya veut se reposer paisiblement pour le reste de ses jours chez lui à Mvomeka’a. Mais paradoxalement, il ne fait rien pour que les restes d’Ahidjo puissent, eux aussi, se reposer chez lui, dans son Garoua natal. Il y a en outre la question de l’incarcération de plusieurs de ses anciens collaborateurs qui sont pour la plupart riches et puissants, et certains très populaires.
Certains analystes estiment que Paul Biya est allé trop loin avec l’opération épervier parce qu’il est aussi comptable et ne saurait se dédouaner si facilement de toute cette gabegie.
Difficile fin de règne en perspective donc pour un président qui, d’une part est désormais lié par un deal avec les puissants du monde et, d’autre part, vit avec la pression de certaines urgences internes autant économiques que politiques. On peut comprendre pourquoi il a confié son mandat à Dieu.
Pourquoi il a intérêt à démissionner
Le fait de partir de luimême sera une très bonne chose pour lui, sachant que son successeur qu’il aura lui-même choisi assurera ses arrières et celles de sa famille nucléaire et politique. Il aura le mérite et l’estime de son successeur, celui-ci sachant que c’est grâce à sa volonté qu’il est aujourd’hui président de la République.
L’autre avantage très important peut être le fait qu’il pourra faire comprendre aux Camerounais que l’amendement de la constitution en mars 2008 pour faire sauter le verrou de la limitation des mandats n’était pas une volonté pour lui de s’éterniser au pouvoir. Pour lui, il était question de mettre un peu d’ordre dans la maison pour assurer une transition pacifique en éliminant certains acteurs politiques de la scène camerounaise qui pouvaient faire ombrage à ses choix politiques.
Rappelez-vous les paroles de Paul Biya dans une audience qu’il a accordée à Louis Tobie Mbida, président du Parti des Démocrates Camerounais. Il lui disait : « ils veulent tous que je parte, mais avant de partir, je veux laisser la maison en ordre ».
Contrairement à ce que certains pensent, notamment que sa démission sera la conséquence du printemps arabe qui a soufflé à travers l’Afrique et le Moyen-Orient à partir du mois de janvier 2011 sur des Chefs d’Etats ayant exercé le pouvoir pour trop longtemps, il pourra balayer cet argument du revers de la main, son seul souci étant de laisser un Cameroun gouvernable. D’où les propos tenus à l’ambassadeur américain tel que relevé plus haut: quelle fierté aurai-je à partir si je laissais le Cameroun dans cet état aujourd’hui ?
Cette même communauté internationale le traquera jusqu’à son dernier retranchement et veillera à ce qu’il soit humilié voire pire. C’est la dernière des choses qu’il pourrait souhaiter. Et connaissant le tact et la vision dont il a toujours fait preuve, il quittera les choses avant que les choses ne le quittent.
« Le Cameroun c’est le Cameroun ».