Albatros: Michel Meva'a M'Eboutou, l'autre passager manquant de l'avion

YAOUNDÉ - 24 Avril 2012
© Anatole Bihina | L'Anecdote

En première classe du vol de l'Albatros, des sièges restent encore vides. Parmi les passagers VIP on attend, avec impatience, l'ancien ministre de l'économie et des finances Michel Meva'a M'Eboutou, d'alors. Il ne saurait rater ce vol, étant celui qui a décaissé l'argent du... vol.

La tradition bantoue nous enseigne que l'on est toujours mieux trahi que par son propre frère. Paul Biya, élevé il y a quelques mois au rang de «Nnom Ngui», maître suprême et gardien de la tradition, apprend à le savoir. La tristement célèbre et incomplète «affaire Albatros» est une suite de trahisons, de perfidies, de vol et de concussions commis a des degrés insoupçonnables. Le cas Michel Meva'a M'Eboutou et son rôle dans l'affaire est un cas pertinent de trahison à l'encontre de Paul Biya, son frère.

L'histoire nous rappelle encore que le tout nouveau deuxième président de la République, accédant au pouvoir le 06 novembre 1982, a voulu s'entourer du maximum de sécurité et de confiance dans tous les secteurs de la République. C'est ainsi qu'il Confiera le secrétariat général du Ministère de la défense à son propre frère, un certain Michel Meva'a M'Eboutou. Pour contrôler l'armée camerounaise encore acquise à Amadou Ahidjo. Pourtant en août 1983, soit quelques mois seulement après son accession au pouvoir, Paul Biya est la cible d'une révolte de militaires restés aux ordres de l'ancien Président Ahmadou Ahidjo. Michel Meva'a M'Eboutou, par incompétence, n'avait rien vu venir. Mais on découvrira plus tard que par trahison qu'il avait choisi de tenir son frère loin de l'information sécrète sur les velléités de certains militaires qui voulaient attenter à sa vie. Il voulait moins que la sécurité de Paul Biya, ayant toujours déclaré qu'il ne comprenait pas comment Ahmadou Ahidjo avait préféré Paul Biya, pour lequel lui Michel Meva'a M'Eboutou nanti de plusieurs doctorats d'Etat n'avait aucune considération. Des histoires entre frères bien sûr, mais le pays manquera de chavirer quelques mois plus tard, le 06 avril 1984, avec la tentative de putsch de triste mémoire. Alors que Michel Meva'a M'Eboutou n'était pas très loin des militaires.

Son parcours dans l'administration depuis près d'une trentaine d'années prouve que Paul Biya a toujours souhaité faire confiance à Michel Meva'a M'Eboutou. Comme à l'ensemble des citoyens d'ailleurs. Après le feuilleton sur la tentative de distraction d'une somme d'argent importante, le ministre Meva'a est à nouveau impliqué dans une affaire d'apurement des bons de commande sur le budget 2003. Les rapports avec ses proches collaborateurs du Ministère de l'économie et des finances plutôt compétent et fiers de l'être, notamment Titi Pierre, alors au budget et Ze Akam, à la comptabilité matière sont si exécrables que l'économie et les finances en souffrent. Et l'on n'oubliera jamais que c'est sous son ministère que le Cameroun se retrouvera en cessation de paiement.

Pire, c'est à cette époque fatidique que le Cameroun se heurtera à la plus grave crise économique de son histoire. Pourtant, Paul Biya n'avait fait que donner la confiance à son frère qui se targuait d'être le meilleur économiste du Cameroun, brandissant ses cinq diplômes en monnaie, finances et économie. Un pédant dont pourtant le seul haut fait d'armes est qu'il fustigeait de l'aube au coucher les autres frères du Sud, en particulier Edouard Akame Mfoumou dont la proximité avec Paul Biya l'agaçait même dans les réunions du village. Il n'a rien vu venir; mieux il n'a rien pu face à la déroute de l'économie camerounaise. Disons même la vérité: ce fut une trahison contre Paul Biya. Son passage au secrétariat général de l'assemblée nationale révèle des accointances douteuses avec certains députés de l'opposition dans le but secret de perturber le travail de Paul Biya, à une époque où l'occident adoubait les changements de régime tous azimuts.

Dans la turbulente «affaire Albatros», il est celui qui a autorisé l'octroi de la somme de 1 milliards FCFA à GIA. Les deniers de Judas. A l'insu de Paul Biya. ll affirme avoir agi sur instruction de son patron, le secrétaire général de la Présidence de la République d'alors, un certain Marafa Hamidou Yaya. Pourtant Michel Meva'a M'Eboutou, en tant que ministre de l'économie et des finances, grand argentier de la République, était l'homme et le ministre le plus régulièrement consulté et le plus proche de Paul Biya. Il aurait pu dire au Chef de l'Etat, même autour d'un plat de vipère, à Mvo-meka’a, comme lui-même le raconte, ce qui se tramait et quelles pouvaient être les conséquences d'une telle transaction aux contours si douteux et dangereux. Michel Meva'a M'Eboutou a choisi de trahir son frère. Au tribunal, où il a été auditionné quatre fois, il a toujours voulu se tenir dans la position d'un simple exécutant d'ordre. Alors que l'argent est parti, à l'insu du président de la République, grâce à la signature de Michel Meva'a M'Eboutou. Depuis sa chute, il est devenu l'homme par qui le scandale arrive au sein de l'élite de Meyomessala et du Dja et Lobo. Après avoir régulièrement agit sur le dos de Paul Biya, il pollue les rapports de ce dernier avec les autres boulous.

L'Albatros, ce tas de zinc rouillé qu'il a acheté avec l'argent de l'Etat sachant qu'il ne pouvait voler, et dont il a caché la nature à Paul Biya son propre frère l'attend pour l'embarquement vers des horizons horribles. C'est lui que l'on attend désormais pour le décollage. Il y retrouvera ses comparses et complices dans le vol du siècle au Cameroun. Heureusement, pour Michel Meva'a M'Eboutou, à Kondengui, il aura de quoi tuer le temps le soir. Il est l'auteur d'un recueil de contes: «les aventures de Koulou la tortue». Un recueil d'histoire des ruses de la tortue. Des histoires de ruses, pour tuer le Président Biya, comme celles de Michel Meva'a M'Eboutou, qu'il racontera tous les soirs, au coin du feu dans la cour de la prison. De sombres jours s'annoncent également pour une centaine de hautes personnalités de la République: Nous y reviendrons.



25/04/2012
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