Afrique,Maladie des chefs d’Etat: A quand la fin de l’imposture ?
Afrique,Maladie des chefs d’Etat: A quand la fin de l’imposture ?
La péricardite et la mort du président nigérian Umaru Yar’dua ont remis en débat la maladie de nos princes. Pour le cas présent, de nombreux analystes s’accordent sur le fait que tout le sérail politique du Nigeria était au parfum du mal qui rongeait Yar’dua, y compris son mentor, Olesegun Obasanjo, et ce, même avant qu’il ne soit proposé à ce haut poste.En Afrique, la santé des présidents est un sujet tabou, un sujet sur lequel se risquent très peu de commentateurs. Qui s’y frotte s’y pique. Notre confrère Pius Njawé au Cameroun en sait quelque chose, concernant le président Biya par exemple.
Ces chefs d’Etat, biologiquement pourtant jusqu’à preuve du contraire, sont comme Monsieur tout-le-monde : ils tombent malades, vieillissent et meurent. Même si souvent ils semblent immortels, tant l’opinion les sait rarement malades. Cela s’explique aussi par le fait que lors d’un séjour privé ou officiel en Occident, ils font des check-up, bref, ils ont les moyens de leur santé, bénéficiant des médicaments dernier cri et des meilleurs médecins. Le problème se situe surtout avant l’entrée dans la fonction : comment peut-on comprendre que les médecins chargés de vérifier la bonne santé d’un présidentiable puissent, le sachant gravement malade, avaliser sa candidature ?
Certes après la prise de service, on peut tomber malade, mais savoir avant qu’on a un mal handicapant et accepter cette fonction hyper-prenante est une imposture à l’égard de ses compatriotes. Bien sûr, en la matière, l’Afrique n’est pas le seul lieu où s’exerce cette omerta totale.
En France, le docteur Gubler a bien caché la maladie de la prostate de François Mitterrand, qui se savait malade dès le début de son septennat en 1981. C’est vers la fin du second mandat que, n’en pouvant plus, le “dieu” de la politique française est passé aux aveux. Il avait néanmoins gouverné la France pratiquement 14 ans durant.
Sur le continent noir, il faut qu’on cesse de ruser avec cette donnée fondamentale : un président gravement malade, ou carrément grabataire, comme le fut Lansana Conté les dernières années de son règne, c’est tout le pays qui trinque. Jouons un peu la transparence ; si un simple travailleur malade prend un congé-maladie, pourquoi un président se sachant gravement souffrant s’agripperait-il à son fauteuil pour diriger le pays en invalide ?
© L'Observateur : Rabi Mitbkèta