Afrique: Les enjeux cachés de la présence des troupes sud-africaines en RDC
La présence visible des soldats sud-africains dans le Nord de la province de l’Equateur, après la débâcle du régime Bozizé à Bangui, fait jaser. Repli stratégique ? Soudaine base arrière pour une reprise des hostilités ? Les commentaires vont dans tous les sens et l’on rappelle en passant l’hécatombe qui a suivi l’entrée massive des Interahamwe dans l’Est du Congo en 1994. L’agenda est hétéroclite et dégagerait le by Text-Enhance">parfum d’un peu de tout : Brigade spéciale d’intervention, formation des FARDC, pétrole et diamant centrafricains, lesquels diviseraient Francophones et Anglophones.
Les derniers événements en Centrafrique ont déversé à l’intérieur des frontières congolaises hommes, femmes et enfants mais aussi des militaires centrafricains et sud-africains ayant emporté dans leur déplacement armes, munitions et autres matériels militaires. Ils sont concentrés dans les territoires de Zongo et Gemena, district du Nord-Ubangui.
Pour la petite histoire, le corps expéditionnaire sud-africain a essuyé de cuisants revers de la part du nouveau pouvoir à Bangui, à savoir l’ex-rébellion Séléka appuyée par des alliés visibles et invisibles. Le bilan macabre continue de faire l’objet de controverse. Selon le gouvernement de Jacob Zuma, 13 morts étaient enregistrés parmi les boys, dépêchés à Bangui pour défendre l’ex-président Bozizé. Des sources de RFI font état de 36 morts, voire 55, alors que d’autres sources confirment la mort de 72 militaires sud-africains au by Text-Enhance">cours des affrontements qui ont conduit, le 24 mars 2013, au départ de François Bozizé et à l’arrivée de Michel Djotodia.
La victoire de la Séléka a contraint les militaires sud-africains défaits à trouver refuge en RDC, leur « home » étant situé à plusieurs milliers de kilomètres de la capitale centrafricaine. Dans un premier, cela pouvait paraître normal. Sauf que, quelques jours seulement après le premier lot, plusieurs rotations d’avions sud-africains ont débarqué à Gemena et Zongo des hommes des troupes et du matériel sans que l’on sache pour quelles raisons. En moins de 24 heures, l’accumulation d’armes et matériel militaire à l’aéroport de Gemena a poussé des sources sur place à se poser des questions.
Cette présence inquiète dans la mesure où, le désir de vengeance pourrait habiter les Sud-Africains après ce cuisant échec ayant abouti à la honteuse défenestration de François Bozizé. La revue Jeune Afrique s’interroge avec la presse sud-africaine : « Est-ce uniquement pour des raisons mercantilistes ? ». Pour preuve ces quelques révélations : « le Chancellor House, un holding financier du Congrès national africain (ANC) a négocié avec le pouvoir centrafricain l’accès à ses mines de diamant ». Les exigences de l’ex-président centrafricain sont pour le moins étonnantes, à en croire la revue panafricaine : « En échange, François Bozizé voulait du by Text-Enhance">cash et des armes ». Lointains souvenirs d’autant plus que le président Bozizé a dû fuir et laisser derrière lui tous ces arrangements avec Jacob Zuma.
L’odeur du pétrole
L’odeur du pétrole aurait fait également courir les Sud-Africains qui ont tenté un coup de force dans le pré-carré français. Le by Text-Enhance">pari n’était-il pas trop osé ? « Et il n’y a pas que les pierres précieuses : l’an dernier, la compagnie pétrolière Dig Oil, dirigée par la femme d’affaires sud-africaine Andrea Brown, a décroché un permis d’exploitation sur le bloc très promoteur au Sud-ouest de Bangui, à la frontière du Congo-Brazzaville et du Cameroun », peut-on encore lire dans la dernière édition de Jeune Afrique.
La prétention sud-africaine de planter ses pénates dans les plates-bandes de la France n’aurait pas laissé l’Hexagone indifférent. Selon des sources crédibles, Paris aurait sollicité l’allié Idriss Deby Itno pour « exécuter l’ingrat Bozizé ». La tâche n’était pas difficile dans la mesure où, c’est le même Deby qui avait aidé Bozizé à chasser Patasse, … pour placer Bozizé. A en croire des sources, l’ANC aurait décidé de chasser « les Français de l’un de leurs bastions d’Afrique centrale ; et sortir Bozizé de l’étreinte étouffante de son « ami » tchadien Idriss Deby Itno ».
Le fait pour Bozizé d’avoir tourné le dos à ses alliés d’hier ne pouvait conduire qu’à cette catastrophe. N’Djamena ne s’est pas fait prier pour consolider son nouveau leadership militaire. Le pétrole centrafricain ne court plus le risque d’échapper aux Français. La Séléka va y veiller désormais.
Toutefois, la concentration des troupes sud-africaines dans le Nord de la RDC pourrait constituer tôt ou tard le déclic d’éventuels affrontements entre la France et la RSA, cette dernière étant donnée pour représenter les intérêts anglo-saxons sur la scène centrafricaine.
En attente de l’intégration à la Brigade spéciale
L’autre raison évoquée pour justifier la présence militaire sud-africaine est le prochain déploiement de la Brigade spéciale d’intervention décidée par les Nations unies aux termes de la Résolution 2098 du Conseil de sécurité. Là aussi, des interrogations fusent. Improvisation ou coïncidence de calendrier des parties prenantes à l’Accord-cadre d’Addis-Abeba ? Et même alors, pourquoi, dans ce cas, choisir des militaires défaits pour intégrer la Brigade spéciale ?
Une question en appelant une autre, pourquoi ces militaires destinés à la Brigade spéciale d’intervention s’installent-ils dans la province de l’Equateur au lieu de se rendre directement dans le Nord-Kivu où ils doivent remplir leur mission de traque et neutralisation des forces négatives ? A la rigueur, ils devraient se déployer à Goma, par exemple pour en attendant l’arrivée sur le terrain des troupes restantes ?
Selon le porte-parole du gouvernement, les militaires sud-africains basés actuellement dans le Nord du pays auraient reçu la mission de former des militaires congolais ! Là aussi, rien ne résiste à une analyse rigoureuse : « Comment Gemena ou Zongo seraient-ils transformés tout de go en sites d’entraînement pour militaires ? ». Par ailleurs, pourquoi faire deux poids deux mesures, en laissant entendre que les militaires centrafricains ont été désarmés tandis que leurs compagnons d’armes venus de la lointaine RSA n’ont pas été soumis à la même discipline ?
L’opinion reste préoccupée, même si des sources diplomatiques tentent de calmer les esprits en arguant que les enjeux seraient plutôt économiques que militaires et tourneraient autour du contrôle des gisements pétroliers découverts en RCA.
Malgré tout, l’on devrait éviter de faire de l’Equateur un nouveau foyer de déstabilisation du pays. Aucun Congolais n’est disposé à revivre cette situation qui perdure.