Affaire Rebecca: ce qu'il faut savoir sur un litige explosif vieux de 13 ans
• L'affaire Rebecca est plus complexe que ce que la plupart des Camerounais croient.
• D'abord, l'on sait que l'entrepreneur est gardé en vue pour outrage à un magistrat.
• Mais au cœur de cette affaire se trouve un bras de fer judiciaire autour de l'héritage des enfants de Dr Henry Ndifor Abi Enonchong.
Dr Henry Ndifor Abi Enonchong est décédé en 2008. C'est donc à partir de cette année qu'est née le litige entre les fils et les filles de l'avocat.
D'abord, Rebecca Enonchong est une des protagonistes de la violente crise de succession qui secoue la famille Enonchong depuis la disparition de leur père qui aurait laissé derrière lui une entreprise et un patrimoine de plusieurs milliards de FCFA.
Plusieurs versions de l'affaire sont évoquées sur les sites et plateformes d'information de la place. Celle des proches de Charles et celle de Rebecca.
La version de Charles (Habeas)
Selon des sources qui seraient proches de Charles, Rebecca et quelques uns de ses frères auraient accusé leur frère consanguin, Prince Charles, de s’accaparer frauduleusement de la succession de leur père.
'Alors que Prince Charles Abi se présente avec l’aval du tribunal coutumier de Bayang et la haute cour de Manyu, dans le sud-ouest, comme fils aîné légitime, successeur et administrateur principal de la totalité des biens du feu Henry Ndifor, ses frères consanguins(issus de “relations adultérines” ) contestent, et l’accusent de faux et d'usage de faux. Il lui est notamment reproché d’avoir établi de faux documents, acte de naissance, carte d’identité, passeport, acte de mariage pour sa mère…en complicité avec de hautes autorités administratives, judiciaires, et sécuritaires, pour s’approprier la totalité de l’héritage', écrit une source qui semble proche de la famille.
'Un véritable bras de fer judiciaire est engagé, et de multiples procédures enclenchées. La haute cour du Wouri conteste la décision de la haute cour de Manyu, et désigne deux administrateurs supplémentaires, Rebecca Ebanga Enonchong et Richard Tarkang Enonchong. Prince Charles Abi conteste cette décision, et pense qu’elle n’a été possible qu’en raison de la proximité de sa sœur Rebecca avec le secrétaire général du ministère de la Justice George Gwanmesia. Il va plus loin en accusant M. Gwanmesia de participer au pillage des biens de sa famille. Notamment le retrait de plus d’un milliard d’un compte à la NFC Bank. C’est dans ces entrefaites que Prince Charles Abi se retrouve à la prison de New-Bell, et condamné à plusieurs années de prison pour faux, usage de faux et déclarations mensongères. Il n’en démord pas, convaincu que sa demi-sœur Rebecca, avec la complicité du SG du ministère de la Justice Gwanmesia et plusieurs magistrats de Douala, manipulent la justice et sont à l’origine de ses malheurs, avec pour but de spolier ses biens, il écrit plusieurs lettres retentissantes á Paul Biya. Depuis, la guerre reste ouverte, et les procédures pendantes des deux cotés', ajoute cette source.
La version de Rebecca
En 2018, Rebecca parlait de l'affaire sur son compte Twitter
'Je commence d’abord par vous expliquer le personnage que j’appelle ‘Habeas Corpus’ car comprendre ce monsieur est central à cette histoire. Mon père est décédé le 26 juin 2008. À cette date, ‘Habeas’ vivait au Nigeria, et ceux depuis plus de 25 ans. On avait peu de nouvelles de celui qu’on appelait ‘frère’ en dépit du faite que notre père ne l’ai jamais reconnu. Il était parti du Cameroun après une altercation avec mon feu père dans laquelle Habeas avait intenté à la vie de celui-ci avec une arme à feu. La plupart des ayants-droits d’ailleurs ne l’avaient jamais rencontré.
Le 1er juillet 2008, il réussit à se faire établir un laisser-passer pour sortir du Nigeria et venir au Cameroun (c’est lui qui nous a produit ces documents en justice et ils sont donc d’ordre public). Regardez bien la base sur laquelle on établit son identité. C’est un numéro de passeport. Voici une photo de ce passeport (encore une fois qu’il a présenté comme pièce en justice). Remarquez qu’il était périmé depuis 1993. Quelle identité assumait-il donc entre 1993 et 2008?
C’est le 8 juillet 2008 que ‘sa mère’ (qui est pourtant en Angleterre à cette date) va déclarer sa naissance au Tribunal. Le magistrat Forbang, aujourd’hui procureur a Bonaberi, signe et autorise cette déclaration.
Mais étrangement son acte de naissance est daté du jour avant, c’est à dire le 7 juillet 2008. Bref. Sur l’acte de naissance il est indiqué que son père est décédé. Je ne sais par quel miracle le mort viens reconnaître son enfant. Je pense que quelqu’un a du expliquer à Habeas qu’il fallait que les parents soient mariés sinon il fallait un jugement de reconnaissance. Mais est-ce que c’était compliqué? Lui même fait établir un acte de mariage le 1er septembre 2008, donc 3 mois après la mort de mon père.
Donc voici un acte de mariage entre un mort et une femme qui vit en Angleterre depuis 1960. Mais avec ces faux documents, Habeas a procédé à vider la succession de ses biens. Certains ayants-droits ont déposé plainte en octobre 2008 et Habeas a été arrêté. Il fut libéré quelques jours plus tard en promettant de ne pas se servir de ces documents. Mais sorti, il a recommencé.
On a du attendre d'octobre 2008 a juillet 2013 pour que le juge d'instruction chargé du dossier rende son ordonnance de renvoi en criminelle contre Habeas.
Cela prendra encore 1 ans et demi pour que le Tribunal le condamne a 10 ans de prison ferme pour ces faux documents. C'est donc enfin le 16 décembre 2014 qu'un collège de magistrats du Tribunal de Grande Instance du Wouri que le jugement 718/CRIM est rendu.
Mais à cette date, Habeas est en fuite. Ceci était déjà sa 3e condamnation à la prison ferme depuis son arrivée en 2008. En décembre 2013 il avait été condamné à 6 mois de prison ferme avec un de ses gros bras pour avoir expulsé une locataire illégalement...'
Quoi qu'il en soit, l'affaire reste complexe et les deux protagonistes pourraient manipuler l'information en leur faveur. Rebecca reste pour le moment en détention, en attente d'un jugement.