Affaire Paul Eric Kinguè, dénis de Justice: Une multitude d’erreurs de procédures et d’atteintes aux droits de l’Homme

PEK:Camer.beTenons-nous en seulement aux dysfonctionnements de la Justice camerounaise qui ont entaché l’affaire Paul Eric Kinguè, l'ancien maire de la commune Njombe Penja jusqu’à présent, sans revenir sur les innombrables atteintes aux droits de l’Homme qu’il a subies, lui, ses proches, ses amis, ses avocats. Sur le plan juridique, Paul Eric Kinguè a été poursuivi dans trois procès distincts dont voici une très brève synthèse :

Procès 1 (participation aux émeutes de février 2008)
- 19/01/2009 condamnation à 6 ans + 804 millions Fcfa de dommages
- 24/03/2011 condamnation en appel à 3 ans + 645.000 Fcfa de dommages
- Recours introduit en cours suprême

Procès 2 (détournement d’argent)
- 14.01.2011 condamnation à 10 ans
- 26/03/2012 en appel : acquittement

Procès 3 (détournement d’argent)
- 29.02.2012 condamnation à vie
- 14.11.2012 condamnation en appel à 10 ans
- + 3 402 551 Fcfa de dommages + 384 915 Fcfa de dépens
- Recours introduit en cours suprême

L’illégalité commence dès l’arrestation de PEK le 29 février 2008: arrestation spectaculaire sans mandat du procureur.

PEK est détenu dans des conditions tellement indignes que, le 23 juin 2008, les détenus observent une grève de la faim pour s’opposer à l’enchaînement de PEK ; finalement, pour calmer les esprits, deux détenus ont été enchaînés dans leur cellule à sa place.

Révocation du Maire : après une suspension qui est allée au-delà de 3 mois comme le prévoit la loi, PEK est révoqué de sa fonction de Maire pour irrégularité de gestion alors que l’information judiciaire n’est pas bouclée. (On constatera par la suite que PEK a été acquitté pour les motifs qui ont conduit à cette révocation).

Premier procès (émeutes de 2008) : 56 renvois.

Cette manœuvre dilatoire ayant pour but d’éloigner PEK de la vie politique le plus longtemps possible est contraire au Droit.

03 mars 2009 PEK réclame la requalification des faits de «coaction de détournement de deniers publics (Ddp)» en «irrégularité de gestion»… le ministère public la déclare irrecevable car hors délais. Or c’est faux, puisque les mémoires ont été déposés le 29 octobre 2008, dans les délais.

19 janvier 2009 : Procès N°1 : PEK est condamné à 6 ans de prison + 804 millions FCFA de dommages à PHP au terme d’un procès basé sur de simples témoignages.

En appel, le témoin-clé se rétractera : Ambomo Guy Modeste déclarait dans le Journal "Le Jour", N° 0647 du Vendredi 12 Mars 2010 ce qui suit :
« On m’a proposé cinq (05) millions pour accuser Paul Eric KINGUE. Ils [le Procureur du TGI du Moungo et le Lieutenant-colonel Ngueté Ngueté Moïse] se proposaient aussi de me protéger en m’envoyant en exil en Centrafrique. Tout ce que le Lieutenant-colonel Ngueté Ngueté Moïse disait, venait directement du Procureur. Ce Maire est un innocent … »

Alors que ce faux témoignage aurait dû suffire à lui seul pour casser le jugement, PEK est condamné à 3 ans.
De plus, la Php qui doit recevoir 100 millions Fcfa ne s’est jamais présentée au tribunal pour défendre cette somme.

PEK est condamné en appel le 24 mars 2011 à 3 ans de prison et 645.000 FCFA de dépens (+ 100.000.000 CFA à PHP) sans aucun témoignage direct.

Or : « … Tout témoignage provenant d’une source non révélée n’a aucune force probante » Selon le Code de procédure pénal camerounais, en son article 335 : « Pour être admis, le témoignage doit être direct ».

Pour la soi-disant incitation à la révolte des jeunes de Penja, aucun discours incriminé de Paul Eric KINGUE n’a été versé au dossier de procédure, mais alors aucun. Trahissant ainsi l’art. 310 al. 3 du Code de procédure pénale camerounais qui stipule ce qui suit : « La décision du juge ne peut être fondée que sur les preuves administrées au cours des débats ».

Pour en terminer provisoirement avec le 1er procès (puisqu’un recours en Cassation a été introduit), notons enfin cette déclaration édifiante de PEK :
Les Magistrats de ma collégialité n’ont pas manqué de déclarer publiquement et je cite : « on ne voulait pas faire perdre la face à l’Etat dans ce procès vide et sans preuves ».

14 janvier 2011 : procès N°2 (détournement d’argent, 1.4 million Fcfa pour la fête d’intronisation du maire) 10 ans de prison.

Dans cette décision, souvenons-nous, le juge reconnaissait au 9ème rôle du jugement que le crime commis par Paul Eric KINGUE repose sur un POSTULAT. Or, un postulat, par définition, est quelque-chose qui reste à démontrer.

Entre temps, PEK avait porté plainte le 31/05/11 contre Michel Ntyame Ntyame (président du Tribunal de grande instance du Moungo), Bifouna Ndongo [et] Obama Obama (procureur et substitut du procureur au Tgi du Moungo) pour suppression de preuves matérielles».
Le 26 mars 2012, PEK a été acquitté dans ce deuxième procès.

29 février 2012 : PEK est condamné à vie.

Réagissant, Me René Manfo conseil de l’accusé  avoue par ailleurs que ce qui est bouleversant dans cette troisième affaire est que son client n’a jamais été cité ni par le juge d'instruction ni par le tribunal pour se défendre. « Il n'y a pas eu information judiciaire pourtant obligatoire en cas de crime. Le détournement étant un crime, ses droits ont été viscéralement et barbarement violés dans cette procédure. Malgré sa demande à être cité pour présenter sa défense, il a été renvoyé au Tgi du Moungo, sans information judiciaire ». Sa requête en annulation pour défaut de procédure a été ignorée puis rejetée.
PEK est donc condamné à vie au terme d’un procès auquel il n’a pas été invité, sans avoir été entendu lors de l’instruction, sur base d’une loi abrogée et d’un article de cette loi qui n’a existé que dans l’imagination des juges.

En appel, le 14 novembre 2012, PEK est Condamné à 10 ans + 3 402  551 Fcfa de dommages et 384 915 Fcfa de dépens.

Ni la Spm, ni la mairie de Penja ne s'était constituées partie civile apprend-on. Joint au téléphone, le conseil de la mairie de Penja avait déclaré avoir été très surpris. Nous ne sommes pas constitués dans cette affaire».

Ayant demandé la nullité du procès pour défaut de procédure, la Cour d’Appel, juridiction de recours supposée avoir des magistrats d’un certain niveau, justifie le défaut de citation par le juge d’instruction, comme ayant été couvert par le mandat d’extraction que la cour, sans aucune honte, a qualifié de mise en demeure pour un accusé de comparaître. Une véritable invention juridique dont ne peut être "digne" qu’une Justice malade.

En première instance, le Tribunal avait omis de décerner un mandat d’incarcération. En appel, les juges ont « réparé » l’erreur, en toute illégalité puisqu’en aucun cas une peine en appel ne peut être augmentée. Ce qui fait dire à PEK et que nous retenons comme conclusion :
« Juridiquement donc, un mandat émis en violation totale de la loi est nul et de nul effet. C’est pour cette raison que dans les prochaines heures, mes conseils du Cameroun et occidentaux, vont traduire le Cameroun devant le Conseil des Droits de l’homme des Nations Unies, afin que cette organisation  se prononce sur ma détention arbitraire ou non.

A l’allure où vont les choses, le Cameroun qui ne vit pas en vase clos se trouvera dans l’obligation, tous les mois, à cause de ses multiples violations des droits humains, d’aller s’expliquer aux Nations Unies, mais pour quelle image ? Est-ce un Cameroun à l’image débridée à l’international que le Président Paul Biya veut nous laisser ? ».

© Source : http://paulerickingue.blogs.nouvelobs.com/


19/12/2012
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