Affaire Mebe Ngo’o : voici ce qu'on reproche à Victor Menye
S’il est des choses empreintes d’une curiosité incompréhensible dans l’actualité judiciaire au Cameroun en général et dans l’affaire déférée au Tcs, appelée « Affaire Mebe Ngo’o », c’est l’inculpation de Victor Emmanuel Menye. Décryptage.
Après les réquisitions intermédiaires de l’avocat général le 10 mai 2021 dernier, il a été, une fois de plus, question de
savoir : que fait monsieur Victor Emmanuel Menye dans cette affaire ? Que lui reproche-t-on vraiment ? Un rappel de certains faits et un essai d’analyse juridique a semblé convenir pour peut-être comprendre la présence de haut cadre de banque à la réputation assise sur ses compétences absolument irréprochables, car hautement qualifié, d’ailleurs cela lui a valu d’être choisi par l’Etat du Cameroun pour l’occupation du poste de directeur général adjoint de la Scb-Cameroun.
L’ordonnance de renvoi qui a circulé dans les réseaux sociaux indique que Victor Emmanuel Menye est accusé de : complicité du crime de détournement reproché à Edgar Alain Abraham Mebe ngo’o, de la somme de 18 699 567 085 Fcfa à travers ses concours dans la passation et l’exécution des marchés spéciaux de fourniture des effets Hcca au ministère de la Défense ; complicité du crime de blanchiment aggravé des capitaux reproché à Mebe Ngo’o, à travers la facilitation à lui apportée dans l’acquisition de cinquante-trois (53) immeubles tant à l’intérieur du territoire national qu’à l’étranger, la détention et l’utilisation de nombreux biens mobiliers de valeur, parmi lesquels plusieurs dizaines de véhicules et engins lourds, dont le montrant avoisine 20 000 000 000 Fcfa (vingt milliards de Fcfa), provenant des infractions de détournement et de corruption.
Avant de parvenir à ces accusations, il est important de souligner ce qui suit : d’après le parquet général du Tcs, c’est le rapport n°3566/18/Anif/D du 13 août 2018 qui est la base de l’ouverture de l’enquête judiciaire dans cette affaire. Ce rapport de l’Anif évoqué par le ministère public, non seulement ne fait nulle part mention du nom de Victor Emmanuel Menye, mais parle bien de 23 comptes du couple Mebe ngo’o au Cameroun dont 4 à la Scb-Cameroun.
Alors question : où sont passés les préposés des banques où sont ouverts les autres 19 comptes ? De nombreux analystes estiment aujourd’hui que la réponse à cette question devrait avoir été donnée tant au niveau de l’enquête préliminaire, qu’au niveau de l’information judiciaire. Mais hélas, il n’en a rien été et pourquoi ?
Pour la petite histoire et en guise de rappel, avant que Victor Emmanuel Me-nye ne comparaisse devant le Tcs, voici en raccourci ses douloureuses pérégrinations : il est convoqué par les Opj du tcs le 18 février 2019 comme témoin. Et ceci, sur la base des déclarations de personnes impliquées dans la procédure. il répond aux questions de routine et s’envole à Libreville au Gabon le 25 février 2019 pour une réunion de la COBAC. Seulement à son retour le 5 mars 2019, il est convoqué par les Opj du Tcs comme suspect et placé en garde à vue.
Le 8 mars 2019, il est placé en détention provisoire par le juge d’instruction qui l’a inculpé pour complicité et coaction de deniers publics et complicité et coaction aggravé de blanchiment de capitaux avec Mebe Ngo’o et Robert Franchetti à hauteur de 1,3 milliards de Fcfa. Et pourtant, les conclusions des enquêteurs ne relèvent rien de probant. Du coup dans certains milieux judiciaires l’on va indiquer que c’est une inculpation sans le moindre rapport avec les conclusions des enquêteurs.
D’ailleurs apprend-on, aucun support ne lui a jamais été présenté tant lors de l’enquête préliminaire que par le juge d’instruction pour établir l’existence de ces infractions qui lui sont ainsi reprochées. Alors pourquoi tout ceci ? Plus grave, indiquent nos sources, le juge d’instruction refuse toute possibilité de garantie de représentation ou de caution bancaire à celui qui est encore mandataire social de la Scb-Cameroun, il est encore Dga de cette banque.
Budget
Le 5 septembre 2019, soit 6 mois plus tard, la détention provisoire est renouvelée sans avoir interrogé Victor Emmanuel Menye. Le 17 octobre
2019, il est enfin interrogé sur des questions professionnelles qui ne posaient pas de problème particulier. Le 30 janvier 2020 même scénario. Bien plus, se souviennent nos mêmes sources, le juge d’instruction laisse croire qu’il ne sera pas interrogé sur les marchés ne faisant pas partie du Mindef. Justice par embuscade ? Certains observateurs ont tôt fait de franchir le pas pour le subodorer. Le 5 mars
2020, la détention provisoire est renouvelée pour 6 mois. Le 30 juin 2020, lors de la confrontation générale, ni le directeur du budget du Mindef, ni le chef de service des affaires générales, ni le témoin dit expert présent n’évoquent le nom de Victor Emmanuel Menye. Mais curieusement le 26 août 2020, il est renvoyé devant le Tcs pour des faits pour lesquels il n’a pas été interrogé et lesquels faits sont bien loin du réquisitoire introductif qui lui a valu son incarcération.
Du coup certains analystes soutiennent que ce procès connaît une incongruité notoire dès son entame : le ministère public présente l’accusation uniquement à l’aide des pièces. Les documents relatifs aux marchés dits fictifs et/ou surfacturés sont produits pour soutenir l’infraction de détournement et nulle part dans ces documents ne figure le nom d’Emmanuel Victor Menye comme signataire, bénéficiaire direct ou indirect, membre de quelque commission que ce soit dans les procédures de passation et d’exécution.
Bien plus aucun de ces marches n’est paye par le compte du Mindef a la Scb-Came-roun mais tous depuis les comptes du trésor public. Dans ses réquisitions intermédiaires du 10 mai 2021, qui sont sans rapport avec les éléments produits pour soutenir la présentation de l’accusation, le ministère public dans un tour de passe-passe magique incrimine Victor Emmanuel Menye dans une série d’approximations, d’incohérences, d’affirmations sans la moindre preuve et tout ceci avec un manque absolu de fondement et de démarche juridique conséquente.
Notamment cette accusation de la Scb et du groupe Attijariwafa Bank transformé par Victor Emmanuel Menye comme plaque tournante du blanchiment, sans produire le moindre document qui aurait pu faire croire que cela pourrait exister vraiment. En tant que parquet qui se veut un tant soit peu sérieux dans la recherche de la vérité, nos analystes estiment que le minimum aurait été dans ce cas d’inculper la Scb et du groupe Attijariwafa Bank en complicité.
Harcèlement
Si, d’après les dispositions de l’article 311 du Code de procédure pénale, « le tribunal ne peut fonder sa décision sur la déposition d’un co-prévenu, à moins qu’elle ne soit corroborée par des témoignages d’un tiers non impliqué dans la cause ou par tout autre moyen de preuve », comment peut-on se retrouver à renvoyer une personne devant un tribunal en basant l’accusation sur des déclarations d’une autre personne impliquée depuis l’enquête préliminaire, déclarations qui ont été essentiellement usitées par le juge d’instruction, sans leur corroboration par un tiers non impliqué dans cette cause ou par tout autre moyen, tel un document ? il est rappelé que le 30 juin 2020, lors de la confrontation générale organisée par le juge d’instruction, ni le directeur du budget du Mindef, ni le chef de service des affaires générales, encore moins le témoin dit expert présent, n’ont évoqué le nom de Victor Emmanuel Menye dans quelque implication que ce soit, à quelque niveau que ce soit relativement aux accusations portées contre lui. On lui reproche clairement sa complicité.
Ce sont les dispositions de l’article 97 du Code pénal qui parlent de la complicité. Elle se décline en deux types : la complicité par provocation ou fourniture d’instructions ; la complicité par aide ou assistance. L’on pourrait alors se demander : quels sont les éléments rassemblés à l’encontre de l’an Dga de la Scb-Cameroun tant lors des enquêtes préliminaires que lors de l’information judiciaire qui montrent l’existence de la complicité en se deux types sus présentés ? Rien, rien et rien !
Pour les observateurs avertis, la conclusion qui s’impose est qu’il y a une main noire dans cet acharnement et ce harcèlement judiciaire destructeur et dévastateur derrière Victor Emmanuel Menye. Voilà comment la vie d’un homme qui a bâti sa carrière pendant 35 ans et un professionnel reconnu bascule, est vouée aux chiens. Une campagne médiatique sans la moindre analyse s’abat sur lui et les réseaux sociaux sont abreuvés d’informations erronées. il est temps que tout ça s’arrête et que le droit soit dit, que justice soit rendue à l’ancien Dga de la Scb-Cameroun, indique-t-on dans les milieux judiciaires.