Affaire Marafa: Pourquoi le juge Magnaguémabé doit se décharger de l'instruction
DOUALA - 01 Juin 2012
© Edouard KINGUE | Le Messager
Pour une Justice sereine, les explications de Me Albert Nguend Dime, avocat au barreau du Cameroun.
Cela frise le grotesque. L’ex-ministre d’Etat, hier encore tout puissant patron de la préfectorale qui s’enferme dans la salle d’eau de sa cellule pour éviter de rencontrer le juge d’instruction chargé de son affaire. Il faut dire que sa demande de récusation de ce juge n’a pas prospéré, car jugée infondée, ainsi que nous le signalions dans notre édition du mercredi 30 mai dernier.
Soulignons que Marafa Hamidou Yaya, mis en détention le 16 avril pour détournement de deniers publics, avait refusé deux fois déjà, de déférer à la convocation du juge d’instruction, qui de guerre lasse, a fait en vain le déplacement à Kondengui et maintenant au Sed, afin de l’entendre. On se souvient que Marafa Hamidou Yaya avait rendu publique une demande d'audience formulée par Pascal Magnaguémabé, en vue d'obtenir ses faveurs. Selon l'ex ministre, aujourd'hui en détention provisoire, le juge d'instruction souhaitait obtenir une promotion en grade et c'est à cet effet qu'il s'était rendu au cabinet du ministre. L'ancien secrétaire général de la présidence de la République croit dur comme fer que ses ennuis viennent de son refus de «collaborer» avec ce juge.
Partant de cet antécédent, Marafa Hamidou Yaya avait alors sollicité la récusation de Pascal Magnaguémabé. Estimant que ce juge n'hésiterait pas à prendre sa revanche dans l'instruction. C'est lui qui a instruit les dossiers de Jean-Marie Atangana Mebara, ancien Secrétaire général de la présidence de la République, d'Ephraïm Inoni, ancien Premier ministre, Marafa Hamidou Yaya, ancien ministre de l'Administration territoriale, Jérôme Mendouga, ancien ambassadeur du Cameroun aux Etats-Unis, Yves Michel Fotso, ex-administrateur directeur général de la Camair et Pdg de la Commercial Bank of Cameroon (Cbc), Titus Edzoa, ancien secrétaire général de la présidence de la République et l'homme d'affaires Thierry Michel Atangana.
Que risque le détenu qui accuse le juge d’instruction de partialité? Selon Maître Dime, avocat au barreau du Cameroun, «la loi a prévu l'hypothèse de la récusation du juge par un justiciable; en attendant la solution à donner par l'instance appelée à connaître de cette récusation, l'instruction est suspendue. Dans ces conditions évidemment, il ne peut pas être envisagé de convocation ni de comparution pour l'inculpé, faute d'instruction en cours en l'état». Dans le cas d’espèce justement, la récusation du juge d’instruction, selon nos sources, n’a pas prospéré car elle serait «non fondée». Dans l'hypothèse de rejet de la demande de récusation, il revient au même juge de poursuivre l’instruction; «il se trouve cependant que la procédure de récusation peut être assortie d'une condamnation à des dommages-intérêts au profit du magistrat ainsi outré dans son honorabilité. Auquel cas, il devient difficile d'envisager une procédure sereine entre les mêmes protagonistes du dossier. Le souci du procès équitable invite dans ces conditions le juge à se déporter, c'est à dire à se décharger volontairement du dossier».
Il n’en est pourtant rien. Le juge Magnaguémabé voulant manifestement aller jusqu’au bout de l’instruction du cas Marafa, qui se retrouve nécessairement dans un inconfort, qui ne peut plus lui garantir un procès équitable. Mais souligne l’avocat, c'est une hypothèse qui n'est pas prévue par le Code de procédure pénale. Il pourrait donc avoir un risque certain que l’instruction de l’affaire Marafa soit totalement à décharge, donc alourdisse le cas du détenu, l'atmosphère n’étant plus très sereine pour une bonne justice. Toutefois, croit savoir un juriste, les charges ne sont pas sensées se fabriquer artificiellement par la volonté d'un juge. «Il y a toujours un moyen de contrecarrer ses initiatives qui seraient mues par l'ego personnel, y compris par le recours devant la chambre de contrôle de l'instruction de la Cour d'appel». Mais en définitive, la meilleure solution pour la justice serait que le juge se décharge du dossier, quitte à solliciter des dommages intérêts, s'il s'estime outragé dans son honneur et considération.
© Edouard KINGUE | Le Messager
Pour une Justice sereine, les explications de Me Albert Nguend Dime, avocat au barreau du Cameroun.
Cela frise le grotesque. L’ex-ministre d’Etat, hier encore tout puissant patron de la préfectorale qui s’enferme dans la salle d’eau de sa cellule pour éviter de rencontrer le juge d’instruction chargé de son affaire. Il faut dire que sa demande de récusation de ce juge n’a pas prospéré, car jugée infondée, ainsi que nous le signalions dans notre édition du mercredi 30 mai dernier.
Soulignons que Marafa Hamidou Yaya, mis en détention le 16 avril pour détournement de deniers publics, avait refusé deux fois déjà, de déférer à la convocation du juge d’instruction, qui de guerre lasse, a fait en vain le déplacement à Kondengui et maintenant au Sed, afin de l’entendre. On se souvient que Marafa Hamidou Yaya avait rendu publique une demande d'audience formulée par Pascal Magnaguémabé, en vue d'obtenir ses faveurs. Selon l'ex ministre, aujourd'hui en détention provisoire, le juge d'instruction souhaitait obtenir une promotion en grade et c'est à cet effet qu'il s'était rendu au cabinet du ministre. L'ancien secrétaire général de la présidence de la République croit dur comme fer que ses ennuis viennent de son refus de «collaborer» avec ce juge.
Partant de cet antécédent, Marafa Hamidou Yaya avait alors sollicité la récusation de Pascal Magnaguémabé. Estimant que ce juge n'hésiterait pas à prendre sa revanche dans l'instruction. C'est lui qui a instruit les dossiers de Jean-Marie Atangana Mebara, ancien Secrétaire général de la présidence de la République, d'Ephraïm Inoni, ancien Premier ministre, Marafa Hamidou Yaya, ancien ministre de l'Administration territoriale, Jérôme Mendouga, ancien ambassadeur du Cameroun aux Etats-Unis, Yves Michel Fotso, ex-administrateur directeur général de la Camair et Pdg de la Commercial Bank of Cameroon (Cbc), Titus Edzoa, ancien secrétaire général de la présidence de la République et l'homme d'affaires Thierry Michel Atangana.
Que risque le détenu qui accuse le juge d’instruction de partialité? Selon Maître Dime, avocat au barreau du Cameroun, «la loi a prévu l'hypothèse de la récusation du juge par un justiciable; en attendant la solution à donner par l'instance appelée à connaître de cette récusation, l'instruction est suspendue. Dans ces conditions évidemment, il ne peut pas être envisagé de convocation ni de comparution pour l'inculpé, faute d'instruction en cours en l'état». Dans le cas d’espèce justement, la récusation du juge d’instruction, selon nos sources, n’a pas prospéré car elle serait «non fondée». Dans l'hypothèse de rejet de la demande de récusation, il revient au même juge de poursuivre l’instruction; «il se trouve cependant que la procédure de récusation peut être assortie d'une condamnation à des dommages-intérêts au profit du magistrat ainsi outré dans son honorabilité. Auquel cas, il devient difficile d'envisager une procédure sereine entre les mêmes protagonistes du dossier. Le souci du procès équitable invite dans ces conditions le juge à se déporter, c'est à dire à se décharger volontairement du dossier».
Il n’en est pourtant rien. Le juge Magnaguémabé voulant manifestement aller jusqu’au bout de l’instruction du cas Marafa, qui se retrouve nécessairement dans un inconfort, qui ne peut plus lui garantir un procès équitable. Mais souligne l’avocat, c'est une hypothèse qui n'est pas prévue par le Code de procédure pénale. Il pourrait donc avoir un risque certain que l’instruction de l’affaire Marafa soit totalement à décharge, donc alourdisse le cas du détenu, l'atmosphère n’étant plus très sereine pour une bonne justice. Toutefois, croit savoir un juriste, les charges ne sont pas sensées se fabriquer artificiellement par la volonté d'un juge. «Il y a toujours un moyen de contrecarrer ses initiatives qui seraient mues par l'ego personnel, y compris par le recours devant la chambre de contrôle de l'instruction de la Cour d'appel». Mais en définitive, la meilleure solution pour la justice serait que le juge se décharge du dossier, quitte à solliciter des dommages intérêts, s'il s'estime outragé dans son honneur et considération.