Une réunion s’est tenue mercredi à Yaoundé pour organiser un plan de communication au moment où des voix s’élèvent pour demander que la lumière soit faite.
L’affaire Gueérandi Mbara embarrasse le pouvoir de Yaoundé au plus haut point. Selon des informations exclusives du Jour, une réunion s’est tenue mercredi à Yaoundé avec tous les services concernés. Un mémo a été rédigé par les auteurs de l’opération ayant abouti au rapt de l’ancien capitaine, et un plan de communication a été élaboré et devrait être déployé dans les prochains jours.
L’embarras du gouvernement vient de ce que, soutiennent certaines sources proches du dossier, Guérandi Mbara serait mort. Plusieurs doses de sédatif lui auraient été administrées entre Sofia et Douala afin d’empêcher qu’il se réveille en plein vol. L’officier rebelle n’a pas pu tenir et a succombé à une overdose. La source du Jour confirme une hypothèse qui était déjà avancée par Jeune Afrique, qui suggérait que le capitaine Guerandi était mort entre Edéa et Pouma et enterré à la hâte par les hommes de la Dgre venus récupérer le « colis » à l’entrée de la ville de Douala. Toutes ces informations ont non seulement été livrées à JA, mais en plus aux services secrets français par José Fernandès Abrantes, le mercenaire portugais recruté pour la mission et qui n’avait pas été totalement payé.
Si cette source se veut formelle, une autre croit savoir que Guerandi serait détenu en lieu sûr. Quoiqu’il en soit, le plan de communication élaboré pour cette délicate affaire devrait permettre d’en avoir le coeur net. En attendant, certains hommes politiques commencent à lever le ton et exigent d’avoir des preuves que le capitaine putschiste est vivant. La première salve est venue du député Sdf, Jean-Michel Nintcheu. Dans un texte parvenu à la rédaction du Jour, il affirme que, connaissant les accointances passées entre Jeune Afrique et le régime, « il est difficile de donner du tort à ceux qui pensent que l’information relative à l’assassinat de M. Guérandi Mbara est crédible ».
Il s’étonne que le gouvernement n’ait pas cru bon de devoir communiquer ou tout au moins donner sa version des faits au sujet de « l’enlèvement assassinat de ce compatriote qui, comme bien d’autres, a pourtant bénéficié de la loi d’amnistie de 1990 ». « Le silence assourdissant des rossignols habituels du régime est fort inquiétant », ajoute Nintcheu.
Violation des droits de l’Homme
plus loin : « (…) Si par extraordinaire il a été exécuté par les tortionnaires du régime, les responsables de ce crime d’Etat doivent être immédiatement traduits devant les tribunaux du pays. Dans les deux cas de figure, le régime de M. Biya a violé de façon flagrante et intolérable la Constitution de notre pays qui dispose dans son préambule que : la liberté et la sécurité sont garanties à chaque individu dans le respect de ses droits ; tout prévenu est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité soit établie au cours d’un procès conduit dans le strict respect des droits de la défense ; toute personne a le droit à la vie et à l’intégrité physique et morale. Elle doit être traitée en toute circonstance avec humanité.
En aucun cas elle ne doit être soumise à la torture, à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. » Dans une autre tribune adressée au Jour et à d’autres médias, le comité exécutif du Conseil national pour la résistance - Mouvement Umnyobiste (Cnr-Mun), qui dit entretenir « depuis de nombreuses années des relations individuelles et politiques avec le Capitaine Guerandi et les Nouvelles forces patriotiques (NFP) dont il est le président-fondateur », reconnait avoir effectivement perdu ses traces depuis la première quinzaine du mois de janvier 2013.
Sous la plume de Tené Sop, le comité exécutif du Cnr-Mun formule des exigences non seulement au gouvernement camerounais, mais français également : « Nous exigeons du gouvernement liberticide de Paul Biya qu’il sorte de son mutisme suspect pour répondre des graves accusations sur l’enlèvement et l’assassinat d’un patriote camerounais dont il est accusé. Nous réclamons du gouvernement français, l’arrestation de Georges Starckmann, l’homme par qui tout a commencé, et de clarifier son propre rôle dans la disparition du docteur Guérandi.
Nous appelons tous les démocrates camerounais de l’intérieur et de l’extérieur, de même que tous les amis du Cameroun, à se mobiliser pour exiger la lumière et situer les responsabilités sur la disparition inacceptable de notre compatriote Guerandi Mbara Goulongo. » En rappel, Guérandi Mbara, 60 ans est un ancien capitaine de l’armée camerounaise. Il avait participé au coup d’Etat manqué du 6 avril 1984 contre le président Biya avant de se réfugier au Burkina Faso où il vivait depuis 30 ans, sous la protection du président burkinabé, Blaise Compaoré dont il fut le camarade de promotion à l’école militaire de Yaoundé.
Selon les révélations faites par le magazine Jeune Afrique dans son édition de lundi, l’ex-putschiste serait tombé dans un traquenard tendu par les services secrets camerounais, grâce à un ancien colonel portugais du nom de José Fernandès Abrantes. Celui-ci a fait croire à Guerandi qu’il le conduisait de Sofia en Bulgarie à Moscou en Russie où ils étaient supposés acheter des armes de guerre... Mais, en plein vol, le mercenaire a injecté du sédatif à sa cible pour ensuite la livrer pieds et poings liées à la Dgre. C’était en janvier 2013.