On le connaît peu avare en prises de paroles publiques. Mais depuis sa dernière communication sur l’arrestation de l’opposant Aboubakar Sidiki et Me Harissou, on dirait que le ministre Issa Tchiroma a avalé sa langue. Pourtant on l’a bien vu à l’aise lorsqu’il pérorait sur le maintien du Cameroun dans le cadre de l’Accord de partenariat d’étape avec l’Union européenne (UE) qui, disait-il, «impacte directement et positivement son commerce extérieur, la compétitivité de son économie et la sérénité de ses finances publiques».
En avril 2014, il a fallu à Issa Tchiroma environ 3000 mots pour
expliquer le succès du séjour du président de la République aux côtés
d’une cinquantaine d’autres chefs d’État et de gouvernement africains,
au Sommet Afrique/États-Unis, qui s’est tenu du 05 au 06 août 2014 dans
la capitale américaine. Ce qui n’a pas empêché le porte-parole de
fustiger peu après la réunion de Washington, au cours d’une conférence
de presse, l’attitude des Américains «Ce que nous n’acceptons pas, c’est
des dictées ou des diktats». En septembre dernier le porte-parole du
gouvernement a cru bon de réunir la presse pour «expliquer l’émergence
du Cameroun en 2035».
En septembre, il affirmait péremptoire: «Il n’existe pas de Boko Haram camerounais» et prenait position quelques jours après dans les querelles qui opposent les élites de la Lékié à celles du Grand-Nord : «Comme vous pouvez le constater, les allégations proférées au sujet d'une rébellion dans les régions septentrionales, sont clairement de vulgaires manœuvres de division et diversion dont personne n’est dupe.
Au regard des lourdes menaces que ces tentatives de stigmatisation d'une partie de la population de notre pays, font peser sur le socle unitaire de notre nation, j'adresse à ceux des médias nationaux en l'occurrence, qui ont choisi de se prêter à ce jeu macabre, une sévère mise en garde afin de leur rappeler les obligations de responsabilité républicaine qui leur incombent, en particulier lorsque l’intégrité territoriale de notre pays est en jeu et que les valeurs fondamentales de notre pays sont susceptibles d'être mises en péril» Le ministre de la Communication en a profité pour lever le voile sur les motifs officiels pour lesquels le notaire Me Harissou et l’homme politique Abdoulaye Siddiki, ont été mis aux arrêts. «Cette affaire, en l’état actuel de nos informations, n’a aucun lien avec la lutte contre Boko Haram.
Ils ont été interpellés par les services de sécurité dans le cadre d’une enquête en cours portant sur des menaces à la sûreté de l’Etat. Les intéressés sont notamment entendus pour des activités et contacts présumés avec des groupes armés centrafricains, dont certains sont responsables d’attaques contre le Cameroun». On se souvient qu’en juillet 2014 le ministre révélait : «ceux qui s’essayent à la distraction de la fortune publique sont cernés». Sur la même trame, en juin 2012, Issa Tchiroma est apparu devant les téléspectateurs pour répondre aux lettres ouvertes de l'ancien secrétaire général de la présidence de la République, Marafa Hamidou Yaya. Comme on le voit, le sieur Issa a réponse sur tout. Mais les dossiers s’accumulent : sauf pour le moment sur l’affaire Guerandi Mbara, une bien pénible épine dans le pied du gouvernement qui aura du mal à se démettre de ce que Me Alice Nkom appelait : « un Etat voyou »…