Affaire Etonde Ekoto/Cud: Le ministère public se pourvoit en cassation

DOUALA - 22 OCT. 2012
© Edouard KINGUE | Le Messager

Selon des informations de source judiciaire, le ministère public a initié un pourvoi en cassation de la décision intervenue le 12 octobre dernier, qui acquittait Etonde Ekoto, Lamine Mbassa, Djem Jean et Jacques Manyinga poursuivis par la Communauté Urbaine pour détournement de fonds publics.

On sait que pour diffusion de fausses informations sur le marché et procuration d’avantages injustifiés à un operateur non agréé sur le marché, le colonel Etonde Ekoto et Lamine Mbassa, ex-directeur financier de la Cud ont été condamnés à deux ans de prison. Cette sanction de deux griefs sur les 15 chefs d’accusations initiaux a été retenue par le tribunal au titre d'infractions à la réglementation du marché financier, relativement aux opérations de l'emprunt obligataire Cud en 2005. En clair, si le colonel Etonde Ekoto reste en détention provisoire dans le cadre de l’affaire Pad où il a été condamné en appel à 15 ans de prison, le 15 octobre dernier, ses co-accusés dans l’affaire communauté Urbaine ont été libérés pour avoir déjà passé 5 ans de détention.

Difficile pour l’instant de dire ce qui amène le ministère public à envisager un pourvoi en cassation contre la décision de la collégialité présidée par Samuel Fogaing assisté des juges Vieux Eyicke et Louis Beula. Interrogé, Me Dime, un des conseils du colonel Etonde Ekoto se contente d’affirmer : « Je confirme que le ministère public a très mal pris la déculottée et formé pourvoi ». Il est vrai qu’au vu de l’âpreté des débats, l’accusation a manqué de répondant pour soutenir les faits qui se sont diluées d’eux-mêmes face au faisceau implacable de preuves apportées par la défense. Me Happi Dieudonné a salué ce verdict inédit dans l’histoire de l’Opération Epervier. S’adressant aux juges, il a déclaré : «Vous venez de rendre justice et non un jugement. Par cette décision de justice que vous venez de rendre, vous venez d’entrer dans l’histoire. Que vous le vouliez ou non, vous avez fait votre travail, rien que votre travail et alors tout votre travail…». Hommage du vice à la vertu, la partie civile a reconnu que « la Communauté urbaine de Douala n’a souffert d’aucun préjudice par rapport aux délits qui ont été commis par conséquent nous n’avons rien à demander ».


Preuves falsifiées

Il était reproché aux accusés le détournement de l’argent de l’emprunt obligataire ; de l’assurance maladie versée à la société Samiris assurance ; de l’agent de la construction du cercle municipal de Bonabéri ; de l’argent destiné au recasement des déguerpis pour la construction de la route Bépanda-Bonamoussadi. Signalons déjà qu’à l’audience du 24 mai dernier, on voyait venir ce dénouement quand le ministère public a présenté et lu au tribunal une correspondance signé de l’actuel délégué du gouvernement auprès de la Cud, Ntonè Ntonè Fritz, dans laquelle il reconnaîssait l’existence des preuves falsifiées des faits reprochés aux accusés, que ces travaux ont été normalement faits, que l’argent n’a pas été détourné.

Pour l’instant donc, après cinq longues années de détention pour les co-accusés, seul Etonde Ekoto est resté en prison dans le cadre de l’affaire Pad dont il était le président du conseil, et qui attend toujours le jugement définitif au niveau de la Cour suprême où le vieux colonel a introduit un pourvoi. Notons qu’il y est poursuivi pour « coaction de détournement de la somme de 5 millions Fcfa ; de la somme de 2.5 milliards Fcfa ; et de la somme de 2.574 milliards Fcfa, aussi poursuivi pour coaction de détournement de la somme de 320 millions Fcfa », accusations en attente de jugement définitif. Selon des observateurs, « on ne doute pas un seul instant que la partie ne sera pas une simple formalité puisque l’Epervier lâche difficilement sa proie ». Mais rien ne sera plus comme avant, pense un avocat pour qui l’acharnement judiciaire contre Etonde Ekoto et ses co-accusés s’est terminé par un flop retentissant, grâce à la perspicacité des juges.

Selon Me Happi Dieudonné, « ces magistrats ont abattu un travail inimaginable. Nous avons clairement senti en eux une réelle volonté de comprendre. La collégialité a, dans la gestion des débats, fait preuve d'une grande impartialité et de sérénité ». Et d’ajouter : « Tant pis pour les juges qui ne sauront pas prendre le train de l'histoire en ce moment car tous ceux qui ont la charge de ce type de dossier en particulier entreront forcément dans l'histoire de notre pays, qu'ils le veuillent ou pas. Ils y entreront positivement ou négativement, par la grande porte ou par la fenêtre. Ce sont des dossiers qui seront enseignés à l'Université, qui feront l'objet des sujets de travaux dirigés, et les décisions qu'ils rendent portent leurs noms. Voyez-vous, on étudie encore aujourd'hui des décisions qui ont été rendues il y a des siècles ».


22/10/2012
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 299 autres membres