En limogeant la direction de l’hôpital gynéco-obstétrique et pédiatrique de Yaoundé et le président du conseil d’administration, il est désormais patent que le président Biya sait ce qui s’est passé dans l’affaire Vanessa et qu’il est en train de tirer les mesures qui s’imposent. Mais la question est de savoir depuis combien de temps est-il au courant ? Et pourquoi a-t-il attendu si longtemps pour réagir ?
Inauguré avec faste le 28 mars 2002 par le président Biya, l’hôpital gynéco-obstétrique et pédiatrique de Yaoundé(Hgopy) est né de la volonté des gouvernements camerounais et chinois d'améliorer de manière significative, le système de prestations des soins de santé en faveur de la femme, de la mère et de l'enfant au Cameroun. Aujourd’hui, il est devenu le théâtre de l’un des plus gros scandales de ce début de septennat du président Biya. Ce qu’il est désormais convenu d’appeler l’affaire Vanessa Tchatchou, cette fille-mère de 17 ans, qui a vu son bébé disparaître l’année dernière après sa naissance.
Pour le gouvernement, deux versions contradictoires sont avancées : l’une du ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement qui a soutenu que l’enfant dit volé est mort et enterré, l’autre de Catherine Bakang Mbock, ministre des Affaires sociales. Selon elle, il n’y a pas eu vol de bébé. Cette cacophonie au plus haut niveau du gouvernement traduit le malaise dans lequel vit le pouvoir en général, dans une affaire qui a depuis franchi les frontières du Cameroun et qui restera dans la conscience collective tout en y laissant évidemment des séquelles.
La troisième version, celle-là, soutenue par la
fille-mère et les organisations de la société est celle selon laquelle
le bébé n’est pas mort. Mieux, on croit savoir qu’il est entre les mains
d’une magistrate en rupture de maternité, Caroline Mejang Ndikum Ateh,
substitut du procureur de la République près le tribunal de Mfou. Elle
est accusée « d’héberger actuellement le bébé soupçonné être celui
enlevé à l’Hgopy sur la base d’une adoption frauduleuse ».
Si la vérité n’est pas encore du domaine du public, force est de
constater que dans cette affaire, le pouvoir s’est planté du début à la
fin. Le début, c'est-à-dire le mépris pour cette fille-mère qui criait
sa douleur depuis août 2011 dans l’indifférence générale du personnel
hospitalier.
C’est ensuite le pouvoir qui a essayé de noyer le problème sous le couvert du vol de bébé comme on en a signalé un peu partout. Suivront alors des démarches malheureuses pour ne pas dire malhonnêtes, telles que le test Adn décrié, qui a tenté de conclure que le bébé volé n’est pas celui de la magistrate soupçonnée, mais on peu aussi penser que celui enterré n’est pas non plus celui volé, du moins tant que l’on ne peut pas faire de test Adn sur un corps en décomposition, comme l’a suggéré le procureur en charge de l’affaire.
Jusqu’au bout de l’action
Où est le bébé ? A qui appartient le bébé de la magistrate ? Pourquoi ces tergiversations alors que tout le monde « sait » désormais ? Assurément le pouvoir va essayer de s’en sortir, mais aucune pirouette n’est plus possible. Entre reculades et rebuffades, le président de la République doit prendre enfin ses responsabilités, afin que les complicités tapies dans l’ombre soient révélées au grand jour et que Vanessa Tchatchou récupère son enfant. Bien plus, que les têtes proches de ce vaste réseau de trafic d’enfants continuent d’être tranchées. Autant dire que Paul Biya devra aller jusqu’au bout en sanctionnant toutes les personnalités qui se seraient mouillées dans l’affaire.
Ce sera le procès d’une société qui a mal à sa gouvernance. Alors que le procès commence…et continue !