Affaire Afrique Média : Les représailles de Canal+ qui ternissent l'image de la France


La gestion de la crise avec la presse est un banal cas d’école gérable par tout responsable de la communication. Parmi toutes les options possibles, on ne note pas la rupture de contrat. Cette option choisie par Canal+ Overseas ne peut qu’impliquer au sein de l’opinion africaine qu’il existe des intentions inavouées commandées par des gens tapis dans l’ombre.

La gestion de la crise avec la presse est un banal cas d’école gérable par tout responsable de la communication. Parmi toutes les options possibles, on ne note pas la rupture de contrat. Cette option choisie par Canal+ Overseas ne peut qu’impliquer au sein de l’opinion africaine qu’il existe des intentions inavouées commandées par des gens tapis dans l’ombre.

En effet, à la lecture de la correspondance de Monsieur Jacques du Puy, président de Canal+Overseas, adressée à Monsieur Justin Tagouh, Président d’Afrique Média, en date du 29 avril 2014 et portant « dénonciation de notre contrat de référencement », on apprend que Canal+ accuse Afrique Média de diffamation.  Dans le monde de la presse, cela est de nature à faire sourire puisqu’aucun groupe de presse dans le monde n’échappe à ce genre d’accusation, même pas le groupe Canal+ lui-même. Et en cas de diffamation, il existe bel et bien des mécanismes de réparation des préjudices « graves » commis à l’image de marque de l’organisation et de la personnalité victime.  Canal+ le sait. 

Tout d’abord, il faut dire que l’erreur est humaine et que le journaliste, pensant détenir le scoop de l’année, peut se tromper car, ce qu'il retranscrit ou exprime est généralement (voire exclusivement) ce qu’il a compris ou a cru avoir compris. L’on peut être étonné que le journaliste n'interprète pas les faits comme l’on aurait souhaité. En général, le (bon) journaliste a (toujours) plusieurs sources d’information. Par conséquent, il faut considérer qu’il a dû avoir d’autres éléments d’interprétation. Ce qu’un responsable de la communication institutionnelle doit faire en permanence, c’est de se rassurer de la disponibilité et de l’existence d’une transparence autour des informations concernant son institution. Ce n’est pas la faute du journaliste si des zones d’ombre persistent et modifient l’interprétation des faits. 

Canal+ Overseas n’a pas été suffisamment transparent sur le brouillage du signal d’Afrique Média. Les précisions contenues dans la correspondance susmentionnée sont la version des faits de Canal+ qui était susceptible d’intervenir dans le processus d’information reconnu à la presse. Les personnes qui estiment que le journaliste ne les a pas bien compris ou qu'il les a diffamés, ont généralement les options suivantes à explorer :

- Interpellation personnelle du journaliste « fautif » (à ce stade, même pas besoin d'interpeller sa rédaction) pour obtenir des éclaircissements ou des explications ;

- Expression du désaccord ou apport de précision à reprendre dans le prochain article ou la prochaine édition ;

- Demande d'un rectificatif si la correction s’impose vraiment, preuves à l'appui. A ce point, Canal+ ne peut ne pas savoir que c’est la mesure qu’il fallait prendre. 

- Rédaction ou enregistrement d'une mise au point et demande de publication ;

- Proposition au journaliste de réparer son erreur en consacrant un autre article ou un autre reportage à votre société ou institution ;

- Rédaction d'une lettre de protestation à son rédacteur en chef en cas de mauvaise foi et de volonté de nuire du journaliste;

- En cas d'échec des démarches précédentes, utilisation du droit de réponse (lettre recommandée avec accusé de réception) et engagement éventuellement des poursuites pour diffamation.

Dans le cas d'espèce, Canal+ a rédigé une lettre de protestation à Afrique Média, non pas pour demander la réparation de « l’erreur » supposée, mais pour demander la rupture du contrat de référencement sans avoir épuisé les démarches de recours existantes notamment, l'utilisation du droit de réponse. Il s'agit purement et simplement d'une mesure de représailles contraire aux pratiques en vigueur dans le domaine de la communication publique. Toutes les grandes organisations et personnalités du monde entier subissent, en raison de la rareté et/ou du manque de transparence sur les informations concernant leurs activités, des attaques de presse. Elles trouvent toujours de moyens de faire réparer le préjudice sans porter atteinte à la liberté de presse. Canal+ n’a pas su s’en tirer par le haut.

S’il est de coutume de dire que l’exemple vient d’en haut, dans ce cas, l’exemple ne vient pas de la France qui a l’habitude de donner des leçons de liberté en Afrique. L’arrogance souvent reprochée aux organisations et personnalités françaises a encore frappé dans ce cas. Sauf que les temps ont changé. Les choses ne pourraient plus être comme avant avec la nouvelle génération d’élite africaine. Après avoir sacrifiée les espoirs de liberté avec des leaders comme Moumié, Um Nyobé, Kadhafi, Lumumba, etc., et après avoir fait ses preuves avec les réseaux Foccart, l’opinion ne pourra que se demander si ce n’est pas toujours la France qui est tapie dans l’ombre dans l’affaire Afrique Média. Quel que soit le cas, c’est l’image de la France qui en pâtira. 

Que se passera-t-il maintenant? En effet, l'attaque de la presse laisse toujours des traces dans la qualité des relations avec l'organe incriminé, le journaliste et même avec les autres confrères. L’organisation ou la personnalité qui attaque gratuitement la presse peut faire l’objet d’une cabale légitime de la part de la presse. Cette organisation ne s’en sortira que discréditée. Afrique Média semble décidé à écorcher l'image de marque de Canal+ en Afrique. Cela se passe dans un contexte africain où le sentiment anti-français évolue de façon exponentielle. En voulant abattre Afrique Média, ses ennemis l’ont rendu plus fort. Il se développera une solidarité africaine autour de cette cause en marge de « l’erreur » qu’aurait commise le groupe de presse. C’est peut-être bizarre mais, c’est ainsi. 

Louis-Marie Kakdeu, PhD

Afrikcom Sarl

Louis-Marie Kakdeu




11/08/2014
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