Accident Vasculaire Cérébral : Un mal foudroyant
- Détails Publié le Mercredi 10 octobre 2012 09:59
- Écrit par Nadine Guepi
Le nombre de victimes va grandissant et la seule arme contre cette maladie reste la prévention.
En
2009, Jeannette Temfang*, 29 ans, rejoint son mari à Paris dont elle
est séparée depuis deux ans déjà. Elle a eu à peine le temps de profiter
pleinement des joies des retrouvailles qu’elle est victime d’un Avc.
Très vite admise en soins intensifs, elle sort du coma les jours
suivants. Mais encore, c’est le début d’une longue prise en charge. Dès
lors, son mari, *Gilbert Temfang prend une année sabbatique pour
s’occuper de sa femme, désormais paralysée du côté gauche
(hémiplégie).Une année de rééducation va permettre à Jeannette de
retrouver partiellement l’usage de ses membres. Un vrai coup de chance
pour elle et sa famille étant donné que les Avc tuent autant que les
accidents de circulation.
L’alerte lancée une énième fois par la
fondation camerounaise du cœur et la société Aes sonel a ainsi provoqué
un grand engouement chez les camerounais durant la 7ème édition de la
semaine du cœur organisée du 24 au 30 septembre dernier. L’évènement a
attiré en majorité des adultes qui se bousculaient dans les rangs pour
se faire dépister et connaître l’état de leur cœur, de leur tension et
de leur glycémie. Le profil des candidats au dépistage était aussi
différent que les raisons de leur présence à l’esplanade de l’hôtel de
ville de Yaoundé. « Moi je souffre de l’hypertension artérielle depuis
plusieurs années. Si je suis ici, c’est beaucoup plus par curiosité. Et
les résultats des examens que j’ai faits ici ne m’ont pas surpris. En
plus, j’ai des antécédents familiaux. Mon frère est mort des suites d’un
arrêt cardiaque», indique, M. Tchamgwé, enseignant d’Université
quinquagénaire. «J’ai des problèmes cardiaques et je suis permanemment
sous traitement pour cette maladie. Je suis ici refaire des examens»,
explique Dalida Moutcheu, 21 ans.
Tabac
Si ce
n’est pour confirmer leur statut, les prétendants aux dépistages
aspirent à profiter de la gratuité des examens. «Dès que j’ai su que
c’était gratuit, je me suis jetée sur l’occasion», clame Briget Mokom,
la trentaine passée. Cette raison est partagée par plusieurs personnes
encore dans les rangs. «Je sentais la nécessité de me faire dépister.
Puisque la possibilité s’est présentée, je me suis dit pourquoi pas.
Toutefois, les médecins m’ont demandé de réduire ma consommation en
alcool mais ce n’est pas possible. Je suis camerounais donc c’est
génétique», indique Kamgam Marius, 28 ans. Pourtant la consommation
abusive d’alcool, l’hypertension artérielle, le tabac, l’obésité et le
diabète, les problèmes cardiaques sont des portes d’entrée à un accident
vasculaire cérébral (Avc), qui lui, est fatal.
«L’avc est un
accident neurologique soudain, renseigne le Dr. Jean-Jacques Pik,
pratiquant de la médecine interne à l’hôpital de Creil, dans la banlieue
nord-parisienne. Soit une artère est obstruée par un caillot : on parle
d’accident ischémique ou alors la pression exercée par le sang peut
rompre une artère: on parle d’accident hémorragique. Dans un cas comme
dans l’autre, le cerveau est privé d’oxygène et de sang, c’est très
grave», poursuit-il. Pour se prémunir de ce mal, la prévention est de
mise. «Il faut prendre des précautions pour éviter la sédentarité.
Manger beaucoup de fruits et de légumes. Car en Afrique comme en Europe,
la science ne garantit pas la guérison dans le cas d’un Avc», prévient
le Dr. Pepouomi Mama Nourdi, cardiologue. Cependant, l’hypertension
artérielle est la cause la plus importante de risque d’Avc. «La pression
du sang agresse les parois des vaisseaux qui peuvent finir par se
rompre», ajoute le Dr. Pepoumi Mama Nourdi.
Attitudes
Les
conditions de vie des camerounais n’arrangent pas les choses. Dans la
mesure où, la sécurité sociale est presque inexistante et que la
majorité des personnes ne consomment que le premier aliment qu’ils ont
sous la main. Les fruits et les légumes ne sont manifestement pas à
porter de main. «J’ai sept enfants. Si tous doivent manger cinq fruits
et légumes par jour comme le conseillent l’Oms, je crois qu’ils
n’iraient plus à l’école», ironise Mme Tchialeu. Certains par contre ont
la possibilité de se payer un tel mode de vie. Cependant ils ne s’y
conforment pas non plus. «Il ya quelques fruits dans mon réfrigérateur
mais je n’ai pas pris l’habitude de servir les repas avec ces desserts.
En plus, les enfants n’aiment pas trop ces fruits il n’y a que mon mari
qui consomme ces aliments», explique Mme Mouna. A côté des attitudes
opportunes à l’installation de l’Avc, la génétique est aussi un facteur
de risque.
En effet, «une étude récente a prouvé que les Africains
éliminent moins le sel que les européens. C’est la raison pour laquelle,
ils sont plus exposés à l’hypertension et aux maladies cardiaques»,
révèle le Dr. Pik. Par ailleurs, les hommes sont plus touchés par les
avc que les femmes «même si à la ménopause, les statistiques tendent à
s’équilibrer», insiste le Dr. Pepoumi Mama Nourdi. Selon Dr Pik, les avc
sont plus présents chez les sujets de 65 ans et plus. Cependant, au
Cameroun, révèle-t-il, les hommes de 40 ans sont plus visés. Pourquoi
une telle avancée?
Les médecins pointent du doigt le mode de vie. «La
modernisation a favorisé la sédentarisation. La marche n’est plus
d’actualité. Les uns et les autres ne prennent plus la peine de faire le
sport pourtant il faut faire le sport 30 minutes, trois fois par
semaine», conseille François Ngoumou, président de la fondation
camerounaise du cœur. D’autre part, «il faut manger beaucoup de fruits
et de légumes qui apportent le calcium dont le corps a besoin»,
préconise Jean-Jacques Pik, avant de se lancer dans l’énumération des
signaux précurseurs de la maladie. Perte de la motricité et de la force
d'un bras, d'une jambe, de la moitié du visage (déviation de la bouche)
ou de la totalité d'un côté du corps (hémiplégie), perte de la
sensibilité d'un bras, d'une jambe, de la face ou de tout le côté d'un
corps, difficulté soudaine à trouver les mots ou à les exprimer: les
phrases ou les mots sont incompréhensibles (aphasie sensitive dite de
Wernicke ), difficulté soudaine à parler, à bouger la langue,
impossibilité d'avaler la salive (aphasie motrice dite de Broca ),
trouble soudain de l'équilibre et de la marche, pouvant conduire à la
chute.
Des signes qui ne durent que quelques secondes mais qui
peuvent conduire à la mort ou laisser de graves handicaps. 75 % des
survivants d’un Avc gardent des séquelles définitives. D’après des
sources internet, 33 % deviennent dépendant toute leur vie et 25 % ne
reprennents jamais d'activité professionnelle. Ainsi les uns et les
autres gagneraient à adopter des comportements sains.