Abus: Gardé à vue pour s’être opposé à la surcharge dans un bus

DOUALA - 05 AVRIL 2013
© Blaise-Pascal Dassié | Le Messager

E. Lindou paie le prix de n’avoir pas apprécié, qu’en dehors des 70 passagers à bord, qu’il y ait plus d’une dizaine en plus. Voulant filmer la plaque d’immatriculation du bus, il est pris en partie par le chef d’agence qui appelle le commissaire spécial de la ville de Foumban. Lequel n’hésite pas à le jeter en cellule.

Lundi 25 mars 2013. Le jeune E. Lindou est à l’agence Super Confort de Foumban. Comme tous les voyageurs en partance pour Yaoundé, il s’achète un ticket de voyage au guichet. A l’heure du départ, outre 70 passagers, 13 autres sans tickets prennent également place à bord du gros porteur. Offusqué et ne pouvant voyager dans un bus en surcharge dans lequel certains passagers n’ont pas de places assises, le jeune homme descend du véhicule et va à la rencontre du chef d’agence à qui il exprime son refus d’embarquer dans de telles conditions. En réaction, « celui-ci m’a demandé d’aller me faire foutre, c’est alors que j’ai filmé la plaque d’immatriculation du bus afin d’avoir des éléments de preuve en ma possession », raconte-t-il.

S’étant rendu compte de ce que cela pouvait leur valoir des sanctions de la part de sa hiérarchie si jamais celle-ci venait à être au parfum de la situation, le chef d’agence s’en prendra à lui. « Il m’a demandé pourquoi j’ai filmé le numéro d’immatriculation du bus. Je lui ai répondu que je l’ai fait pour des raisons de sécurité. Paniqué, il a demandé à tous ceux qui étaient en surcharge de descendre et de récupérer leur argent », poursuit-il. Appelé quelque temps après, Raphaël Ndongo, le commissaire spécial de la ville de Foumban descend sur les lieux. « J’étais assis dans le bus et je ne sais pas ce qu’on lui a dit. Il m’a intimé l’ordre de descendre et m’a demandé pourquoi je m’oppose au départ du bus. Je lui dis que je décrie tout simplement la surcharge. Et il a rétorqué que si je ne veux pas voyager, que je prenne mes effets et que je descende du bus. Je lui ai répondu que j’ai un ticket qui me donne le droit d’occuper une place assise et de voyager à bord de ce bus ».


Trouble à l’ordre public

Il n’en faudra pas plus pour que le commissaire spécial interpelle E.Lindou. « Conduit au poste de police, j’y ’ai été gardé à vue sans être enregistré à la main courante aux environs de 23h. J’ai été gardé à vue jusqu’à 10h le lendemain. Lorsque mon père (Colonel à la retraite Ndlr) est arrivé, ordre est alors donné à l’officier Abdoulaye de préparer mon bon de relaxe », confie l’infortuné. Joint au téléphone, Raphaël Ndongo nie les faits et parle plutôt de trouble à l’ordre public. « J’ai été appelé, dit-il, pour une histoire de trouble à l’ordre public. Il n’a pas été gardé dans nos cellules. Lorsque je suis arrivé, les passagers ont témoigné qu’il les empêchait de voyager. Je lui ai demandé de monter dans le car et il a refusé d’obtempérer. Parce qu’un individu fut-il, le fils d’un colonel ne peut bloquer tout un bus sur place et empêcher les passagers de voyager. J’ai d’ailleurs découvert qu’il était doctorant. Ce qui m’a surpris parce que lorsqu’on a ce niveau d’études, on ne se comporte pas comme un analphabète. Je suis étonné qu’il soit venu vous en parler. Pourtant nous avons sympathisé avant notre séparation. Et je lui ai donné mon numéro de téléphone.» Selon Me Stéphane Djieyip, avocat au barreau du Cameroun, il s’agit, sur le plan du droit, d’une arrestation arbitraire avec séquestration. « Cet homme en tenue fut-il, commissaire de police, peut être poursuivi s’il y a des preuves où tout au moins si pendant qu’il était en cellule, il a pris la peine de prendre des images », pense-t-il.


05/04/2013
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