Abus de pouvoir: André Sohaing en rébellion contre la justice

DOUALA - 25 JUIL. 2013
© Guy Modeste DZUDIE | Le Messager

Condamné par le tribunal de première instance de Bandjoun à libérer un espace qu’il occupe illégalement au nom de la commune de Bayangam, le maire refuse de s’exécuter. Le 22 juillet dernier, les plaignants ont saisi le Minpostel pour l’inviter à surseoir à l’inauguration d’un centre télé centre-communautaire édifié sur le site litigieux.


I- Empiétement sur des propriétés foncières privées

La majorité des voyageurs qui passent par la nationale n°4 à Bayangam s’aperçoivent de l’implantation, au niveau de l’ancien péage, d’une installation de vente de produits pétroliers sous le label de « Total Cameroun Sa ». L’ouvrage en question a été initié depuis des mois par André Sohaing, maire de la localité. Et nonobstant une décision de justice lui demandant de libérer le site en question, pour atteinte à la propriété foncière de particuliers, le magistrat municipal ne s’est point exécuté. Et pourtant l’ordonnance rendue le 29 mai dernier par le Tribunal de première instance (Tpi) de Bandjoun est claire dans son libellé :«… L’arrêt des travaux entrepris par sieur Sohaing André et/ou la commune de Bayangam sur la parcelle objet des titres de propriété appartenant aux requérants sous astreintes de 100.000 francs par jour de retard à compter du prononcé de la décision.» A s’en tenir à cette injonction, le maire de Bayangam serait appelé à verser à ce jour près de six millions de francs Cfa aux plaignants.

M. Sohaing, en plus de la station service, a fait construire un télé centre communautaire sur le site litigieux. Le conseil du maire de Bayangam, Me Bopda, soutient que ce magistrat municipal se trouve dans son bon droit. Il brandit à cet effet, l’arrêté n°226/y2.5/D230 signée le 4 septembre 2000 par le ministre chargé des domaines et portant autorisation à gérer une parcelle de terrain du domaine public routier sise à Bayangam. Pour lui, cet arrêté qui accorde en concession à la commune de Bayangam les terres sur lesquelles les travaux ont été entrepris ne souffre d’aucune irrégularité.

Cette situation n’est pas sans susciter le courroux des plaignants. Il s’agit notamment de Paul Chedjou, Abraham Chedjou, Emmanuel Kom, Mathieu Tchuenté, Josué Noutsa et de la succession Jérémie Tchassem représentée par Jacques Djoko Tamnou. Ils sont autant déterminés à faire prévaloir leurs droits que le 22 avril 2002, le ministre chargé des Domaines, répondant à une correspondance à lui envoyer au sujet de l’arrêté dont se prévaut André Sohaing, leur a fait savoir: « … Vos titres fonciers n’ont pas été inclus dans la parcelle du domaine public routier dont la gestion a été confiée à la commune rurale de Bayangam ». Une manière de dire que le maire de la commune de Bayangam a empiété sur des propriétés foncières de ces particuliers.

Toute chose qui a emporté la conviction de la présidente du tribunal de première instance de Bandjoun, Josette Wonga Tiako Deumeni. C’est pourquoi saisie par assignation de référé d’heure à heure par les plaignants, elle a jugé recevable la demande visant André Sohaing et la commune de Bayangam. Car suivant exploit d’huissier établi en by Savings Wave">date du 13 février 2013 par Me Emmanuel Youmssi, huissier de justice près la Cour d’appel de l’Ouest à Bafoussam, André Sohaing a été informé au sujet des reproches formulés contre sa personne et l’entité communale placée sous sa responsabilité depuis janvier 1996. Une gestion municipale dans laquelle, selon de nombreux habitants de Bayangam, le maire n’a cessé de s’illustrer dans les batailles foncières contre ses administrés ou l’élite extérieure désireuse d’investir pour le développement économique, social et culturel de la localité. Tête de proue du Front social démocrate (Sdf en anglais) et plusieurs concurrents d’André Sohaing pour le contrôle de la commune de Bayangam, Bernard Puepi et ses proches se trouvent aussi dans de batailles similaires avec M. Sohaing.


II- Interpellation du Minpostel

Par le canal de leur conseil, Me André-Marie Tassa, les adversaires du maire de Bayangam dans cette affaire, tiennent à empêcher l’inauguration du télécentre communautaire de Bayangam en saisissant la justice pour son expulsion et l’exigence des dommages-intérêts, au cas où il y a des résistances. Ils viennent en effet de faire parvenir une correspondance datée du 22 juillet 2013 au ministère des Postes et télécommunications (Minpostel) à Yaoundé. A travers cette lettre, Jacques Djoko Tamnou et ses alliés demandent au ministre des Postes et télécommunication de ne point répondre favorablement à l’invitation du maire de Bayangam qui tient à sa présence à l’inauguration du télécentre communautaire construit sur un espace litigieux.

«Comme vous pouvez-vous rendre compte excellence monsieur le ministre, comme le projet de la Station Total, le Télécentre du Minpostel est situé dans les titres fonciers de nos familles. Autrement dit-il se trouve dans notre propriété privée. Il est judicieux de prendre langue avec nous pour trouver une solution même préalablement à l’inauguration. Nous nous réservons le droit d’ester en justice pour solliciter l’expulsion basée sur le titre foncier et les dommages intérêts. Mais cette solution ne sera envisagée qu’au cas où vous n’apportez pas une issue préalable meilleure », prévient l’auteur de la correspondance.

Surtout que ce n’est pas la première fois qu’il est rappelé à l’instance gouvernementale que cet ouvrage a été édifié sur une propriété privé. « En effet au moment de l’implantation du télécentre nous avions rappelé à la commune de Bayangam et même au Minpostel que c’est à tort qu’elle entendait pénétrer sur ledit terrain qui est l’objet des titres fonciers de nos familles. Les travaux se poursuivant, nous avons saisi le président du Tribunal de première instance de Bafoussam, juge des référés pour solliciter l’arrêt des travaux. La décision de cette juridiction a déclaré que le télécentre est situé dans notre propriété privée mais qu’en l’état du fait de l’achèvement des travaux elle ne pouvait plus ordonner son arrêt (Confère ord. N° 131/2011 du 27 décembre 2011) », rappelle Jacques Djoko Tomnou.

Et de conclure : « Il ne fait donc l’ombre d’aucun doute que le télécentre se trouve dans notre propriété privée et que nous avons la possibilité légale de solliciter son expulsion et solliciter des dommages intérêts. Nous sommes conscients que le Minpostel, la Camtel, etc., sont induits en erreur par sieur Sohaing André et la commune de Bayangam qui brandit chaque fois un Arrêté du Mindaf pour prétendre qu’il s’agit du domaine public routier. »


III- Des enjeux économiques et politiques camouflés

En cette période pré-électorale, André Sohaing, maire de la commune de Bayangam et tête de liste du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), tient à rempiler en dépit d’un bilan mitigé, du moins comparativement à celui de son homologue milliardaire et maire de Bandjoun, Victor Fotso. Ainsi, dans l’optique de flatter son électorat, il aurait entrepris, d’après des sources dignes de foi, des démarches afin que le ministre des Postes et télécommunications (Minspostel) se rende personnellement à Bayangam pour l’inauguration du télécentre communautaire construit et aménagé par ses soins au niveau de l’ancien péage à Kouopou. De même, la mise en fonctionnement d’une station service sur un espace concédé à Total Cameroun-Sa lui permettrait de produire un discours électoral dans lequel, il affirmerait son rôle d’ « unique catalyseur » du développement économique de la commune qu’il dirige depuis des années, comme « premier maire élu ».

Relativement au projet de construction d’une station d’essence à Bayangam, André Sohaing est accusé d’avoir plagié cette initiative de Jacques Djoko Tomnou, riverain de Kouopou et protagoniste dans le conflit foncier en question au nom de la famille Jérémie Tchassem. Car, en date du 3 novembre 2003, celui qui avait fait parvenir, contre décharge, une correspondance au maire de la commune de Bayangam pour solliciter l’obtention d’un permis de construire d’un poste de vente de produits pétroliers, « dans le but de contribuer au développement de [leur] arrondissement ». Dans cette correspondance, l’investisseur en partenariat avec la société Petrolex, mentionnait que le poste en question devrait être établi au bas du lot objet du titre foncier n°7320 du département du Koung-Khi. Sans répondre à l’intéressé, le maire se serait approprié du projet, cette fois en partenariat avec Total Cameroun Sa. D’où sa mise en œuvre parallèlement à la construction du télécentre communautaire en dépit de l’ordonnance d’arrêt de travaux n° 131/2011 rendu le 27 décembre 2011 par la justice. Une forme de rébellion, souligne-t-on dans les milieux judiciaires lorsqu’une personne s’oppose ou refuse de se plier à une décision De justice.



25/07/2013
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