Abidjan :Ouattara accentue la pression sur Gbagbo
Écrit par Source : Afp |
Jeudi, 16 Décembre 2010 08:25 |
Journée à risque jeudi en Côte d’Ivoire: le président-élu reconnu par l’Onu, Alassane Ouattara, appelle ses partisans à marcher sur la télévision d’Etat pour installer un nouveau directeur à la tête de l’institution, au risque d’une confrontation avec les forces loyales au chef de l’Etat sortant Laurent Gbagbo.
Reconnu vainqueur de la présidentielle du 28 novembre par les Nations unies, les Etats-Unis, la France et l’Union africaine, M. Ouattara a appelé les Ivoiriens à accompagner son gouvernement jusqu’au siège de la RTI (radio-télévision) jeudi en vue d’installer son nouveau directeur.
Il souhaite également organiser une autre marche vendredi pour prendre le contrôle du siège du gouvernement, où il espère tenir un conseil des ministres. Les bâtiments de la RTI et du gouvernement sont gardés par les forces de sécurité de Laurent Gbagbo et toute tentative de prise de contrôle pourrait déclencher des violences.
Alphonse Djédjé Mady, président du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), coalition de partis qui soutient M. Ouattara, a appelé les Ivoiriens à s’engager dans la bataille pour “rétablir l’Etat de droit, garantir les libertés fondamentales et assurer la paix et la cohésion sociale”.
Le camp Ouattara veut également déstabiliser le gouvernement de plus en plus isolé de Laurent Gbagbo en lui coupant l’accès aux fonds publics pour l’empêcher de payer les fonctionnaires et soldats et les dépenses courantes de l’Etat.
La confusion et la tension règnent en Côte d’Ivoire depuis le second tour de la présidentielle. Le 2 décembre, M. Ouattara a été déclaré vainqueur du scrutin par la Commission électorale indépendante (Cei), mais le lendemain le Conseil constitutionnel, acquis au président sortant, a invalidé des résultats et proclamé la victoire de M. Gbagbo.
La Côte d’Ivoire compte ainsi deux présidents et deux gouvernements. La crise politique fait craindre de nouveaux troubles après la guerre civile de 2002-2003, qui avait coupé le pays en deux. “Nous allons tout faire pour éviter un conflit”, a promis Amadou Coulibaly, un conseiller de M. Ouattara.
Mais le secrétaire général des Nations unies n’a pas caché son inquiétude. Ban Ki-moon “est profondément préoccupé par l’impasse politique qui persiste en Côte d’Ivoire”, a fait savoir son porte-parole Martin Nesirky dans un communiqué. “La situation prend une tournure inquiétante en raison des événements qui se déroulent actuellement et qui pourraient aboutir à une violence généralisée”.
Ban Ki-moon met en garde contre les “conséquences imprévisibles, y compris le retour à la guerre civile” que pourraient avoir ces actions. Le secrétaire général de l’ONU a appelé de nouveau Laurent Gbabgo “à respecter la volonté du peuple ivoirien” et “se retirer afin que le Président élu Ouattara puisse assumer son mandat”.
La France, dont les 900 soldats sur place (force Licorne) appuient les troupes de l’ONU, n’a “aucune intention d’intervenir militairement” dans la crise ivoirienne, a assuré de son côté le ministre de la Défense Alain Juppé. Paris se tient toutefois prêt à utiliser son contingent pour évacuer les ressortissants français si nécessaire. “Nous avons un dispositif en alerte pour évacuer le cas échéant, si des violences apparaissaient, nos ressortissants, qui sont nombreux”, a précisé M. Juppé mercredi sur France Inter.
Notant que jeudi était “une journée à risque”, le ministre de la Défense a appelé les deux parties en Côte d’Ivoire au “sang froid” et a réaffirmé qu’aux yeux de la France, M. Ouattara était le vainqueur de l’élection. “La légalité est du côté de Ouattara”, a souligné Alain Juppé. “Il faut que Gbagbo accepte le verdict des urnes et s’efface.”
Si la victoire d’Alassane Ouattara est reconnue par de nombreux gouvernements, Laurent Gbagbo garde le contrôle des médias, de l’armée, du palais présidentiel et du siège du gouvernement. Dans un communiqué lu à la télévision lundi soir, la ministre de la Fonction publique de M. Gbagbo, Jeannie Dagbo, a assuré que l’Etat était opérationnel et a appelé les fonctionnaires à reprendre le travail.
De son côté, le camp Ouattara a appelé les employés de la fonction publique et les officiers de l’armée à se ranger derrière le président reconnu par l’ONU. Premier ministre désigné de M. Ouattara, Guillaume Soro leur a demandé de cesser de “collaborer avec le gouvernement illégal mis en place par l’ancien président Laurent Gbagbo”.