300 mots/maux et noms (pas toujours) propres qui ne nous ont pas échappé....B COMME BIYA...BAFOUSSAM : bastion célèbre de l’opposition camerounaise. Le 15 Février 1971, l’état fasciste néocolonial y faisait abattre, sur le « théâtre de ses opérations » précisait-il, le président du Comite Révolutionnaire de l’UPC, Ernest Ouandié. Devant une foule de paysans bamilékés muets, traumatisés par la brutalité d’une répression meurtrière vieille de plus de 15 ans. Le successeur d’Aminou Oumarou au gouvernorat de la province a gardé de l’époque un souvenir si nostalgique qu’il s’est permis l’effronterie de lancer, lors de son tout premier ''foule contact'', un méprisant : ''Je vais mettre de l’ordre''. Sous-entendu : ''vous mater, vous les bamilékés là'', oubliant superbement que la machine à remonter le temps pour vivre au passé (décomposé) de l’époque Andzé-tsouguienne n’existait plus. Ainsi est-il un nouveau spécimen de gouverneur pour lequel les décibels des sirènes des forces de l’ordre sont systématiquement doublés à chacune de ses sorties. Afin de couvrir un max les lourds et honteux '' hou ! hou ! '' que lui décochent les masses au passage de son cortège.
BAMENDA : chef-lieu de province rebelle à l’ordre RDPC, fief des opposants du Social Democratic Front (SDF), où il est hérétique de se réclamer d’une opposition autre que celle incarnée par le chairman John Fru Ndi.
BAMILEKE : nationalité de l’Ouest-Cameroun réputée laborieuse et dynamique – ce sur quoi certains fieffés tribalistes ont vite fait de tirer la couverture pour la porter sur le terrain mendélien, le dynamisme des Bamilékés étant, insinuent-ils, quelque chose de congénital -, mais dont le grand mérite est d’avoir massivement lutté contre l’administration coloniale et le régime Ahidjo pour l’indépendance. C’est en effet dans le pays bamiléké que la lutte nationaliste fut la plus âpre, la plus sanglante et la plus longue. Au lieu d’en tirer la fierté la plus légitime, on voit de nombreux bamilékés, plus ou moins réactionnaires il est vrai, reléguer cet épisode exaltant de leur mémoire collective à l’arrière-plan, conseillant même à leurs homologues une ardeur plus tempérée dans la lutte contre le ''zéro d’Etoudi''. L’incroyable justification alors avancée est celle-ci : la lutte indépendantiste, faite de sacrifices surhumains n’a en rien profité à l’ethnie, bien au contraire, appuient-ils. Dieu merci, ce son de cloche-là, la jeunesse Bamiléké ne l’entend pas de cette oreille (ni de l’autre non plus d’ailleurs), à voir sa détermination dans les luttes actuelles pour l’avènement d’un Cameroun nouveau.
BARONS : désigne, dans la religion du parti unique, la caste des ''intouchables'' du parti. Cette caste a connu son apogée sous le régime de l’UNC d’Ahidjo. La toute puissance des barons de l’UNC-RDPC s’étend encore, à l’heure du multipartisme truqué, dans tous les domaines de la vie nationale. (Nota Bene. : par contre - et soit dit en passant -, les baronnes du régime n’étaient point des ''intouchables''. C’est du moins ce qu’en avait décidé le très musulman pourtant El Hadj, président de la république).
BASSEK (BA KOBHIO) : étonnant intellectuel, tout à la fois cinéaste, écrivain et politologue. La grande presse n’a jusqu’ici parlé de lui qu’a l’occasion de ses films, préférant couvrir ses colonnes de vedettes qui ont certainement beaucoup moins de bonnes choses à faire part que cet anarchiste convaincu. En Février 1991, il dénonçait l’UPC-DIKA en ses termes : '' seul parti historique a avoir survécu, l’UPC a connu ces derniers mois des querelles byzantines opposant les chefs de ses différentes tendances à l’extérieur du pays, comme cela a souvent été le cas depuis son bannissement illégal, il y a près de trente ans. Ces dissensions, faisant le jeu du pouvoir qui traqua ses militants, ont favorisé l’émergence récente, à l’intérieur des frontières, d’une UPC étonnante, conglomérat de nationalistes sincères et de citoyens douteux, manifestement opportunistes : la plupart de ces derniers sont d’anciens militants de l’UNC devenue RDPC, battus parfois aux élections internes du parti et donc des citoyens très peu populaires. La seule caution historique de l’UPC, l’attachement sentimental de millions de camerounais à un mouvement qui donna au pays son indépendance, ne peut valoir à des hommes suspects, de mériter de revêtir le manteau des nationalistes qu’ils revendiquent. La tendance opportuniste de ce conglomérat se manifeste d’abord dans une exclusion suspecte de nombre de ceux qui, pendant trente ans, ont entretenu la flamme, souvent au prix d’un exil frustrant. '' Ce que Bassek saisissait ainsi dès Février 1991, la plupart des journalistes qui brodent sur les divisions de l’UPC ne l’ont toujours pas compris aujourd’hui.
BETI : nationalité du Sud-Cameroun qui, du fait de l’incapacité proverbiale de l’un de ses fils parachuté accidentellement à la tête de l’Etat, porte l’opprobre des maux qui accablent le Cameroun. Les tribalistes de tous poils tentent de faire endosser aux Bétis la responsabilité de la faillite actuelle du système néocolonial mis en place par la France avec, comme tête de pont, Ahidjo. Sous le prétexte (tribaliste évidemment) que ''le bétis ne savent pas gérer’’ (Moumé Etia). Préjugé tenace ? Les tribalistes anti-bétis s’en défendent, arguant comme les tribalistes ''bamis'' ou ''nordistes'' que ''ces gens-là ne sont pas comme nous''. Les campagnes tribalistes anti-bétis, développées dans tout le pays à la faveur de l’impopularité extrême de Biya, ont tant et si bien essaimé dans la psychologie collective qu’il sera difficile qu’un candidat béti, même progressiste, ait des chances d’être plébiscité lors de prochaines élections présidentielles. C'est-à-dire si l’image cauchemardesque de la gestion-Biya planera encore longtemps…
BETI (MONGO) : écrivain et pamphlétaire célèbre, qui n’aura pas manqué de faire ployer sous sa plume des plus virulentes les deux premiers présidents-dictateurs camerounais. Sous le régime du ''petit peuhl'', Mongo Béti s’est il illustré avec ''Main Basse sur le Cameroun, autopsie d’une décolonisation'', un réquisitoire sans appel contre le régime franco-Ahidjo, exécuteur froid d’un patriote héroïque comme Ernest Ouandié. '' Main basse…'' fit si bien mouche contre la dictature et ses parrains qu’il fut interdit en France et son auteur menacé d’expulsion vers le Cameroun pour offrir sa tête à Ahidjo. L’exclusion, quelques années plus tard, de Mongo Béti de la Section Française d’Amnesty International (1978) illustrait une autre péripétie du combat que mène l’écrivain dans la dénonciation des responsabilités scandaleuses de la France-terre-des-droits-de-l’homme dans le maintien des dictatures francophiles d’Afrique noire. Mongo béti a tiré à boulets rouges sur Paul Biya dès 82-83 (en le traitant de ''dictateur-stagiaire''), lui ôtant d’emblée le préjugé favorable que lui accordait bon nombre. Biyidi Alexandre Awala, de son vrai nom, est l’auteur d’œuvres engagées remarquables (Perpetue et Remember Ruben notamment) que les jeunes camerounais n’étudieront au lycée qu’une fois Mongo Béti mort, bien entendu, et… déterré par un décret de réhabilitation au cynisme bien de chez nous.
BAYART (Jean-François) : politologue français célèbre, spécialiste (comme on dit) de la politique camerounaise. Ancien collaborateur à la Revue française d’études politiques africaines dirigée par Pierre Biarnes et Philippe Decreane, on ne sait pas s’il y subit l’influence ''analytique'' des deux spécialistes de la page africaine du journal Le Monde. Toujours est-il qu’en 1983, Bayart se grille aux yeux de l’intelligentsia progressiste Camerounaise en taxant de ''pamphlet exécrable'' le célèbre ''Main Basse''… de Mongo Béti, dans Le Monde. Dans un article sur Ernest Ouandié paru (sous pseudonyme) en décembre 86/janvier 87 dans Le Messager, nous nous interrogions '' sur ses prétentions à apprécier la sensibilité des Camerounais mieux que les Camerounais eux-mêmes. Car bien que l’auteur de ''Main Basse…'' n’ait pas bénéficié des mêmes facilités de recherches que Bayart dans '' L’Etat du Cameroun'', ''Main Basse…'' restera pour les camerounais un des ouvrages qui auront le plus fait mouche à l’époque de l’apogée du pouvoir d’Ahidjo.'' Plus grave encore, en 1986, dans la revue Politique Africaine, Bayart raille le discours (d’après lui en porte-à-faux) des exilés, qu’il réduit à des '' marxistes standardisés ''. '' La fièvre de l’argent et de la consommation, écrit Bayart, qui a saisi le pays est bien éloignée de tout puritanisme révolutionnaire ; l’attestent, par exemple, le développement des ''grands mariages'' à Douala, la prolifération des voitures de luxe ou des magnétoscopes, la construction et l’aménagement de villas fastueuses-sans même parler de la consommation de champagne, ''l’eau de pays'' dont le Cameroun est un importateur impressionnant. La trajectoire d’un Jean-Jacques Ekindi, de la vice-présidence de l’UNEK à la présidence provinciale de l’Union nationale des entrepreneurs du Cameroun, colle mieux a ces préoccupations que le mirage de la clandestinité. '' Bayart avait donc choisi son camp : ce n’était pas celui des patriotes révolutionnaires qui, dans la clandestinité, luttaient pour que le pays suffoquant de champagne, de villas fastueuses et de grosses cylindrées ne sombre pas dans la crise, en dépit de la terreur d’une police politique que Bayart décrit (en se délectant apparemment) comme ''puissante, contrant facilement les clandestins subversifs, démantelant les petits réseaux de distribution de tracts''. Non, le camp qu’avait choisi Bayart c’était celui de ceux qui composent avec le régime. L’histoire récente de notre pays a finalement montré qui était en porte-à-faux avec elle et qui ne l’était pas.
BIYA (Paul) : homme d’Etat célèbre né en 1933. Il prit peur de mourir en 1991 à la Conférence Nationale Souveraine qu’il se garda bien de la convoquer. Parachuté par accident à la plus haute charge politique, Paul Biya n’a jamais demandé à se faire indemniser par la sécurité sociale : c’est son seul acte connu d’abnégation. En attendant, les autres payent les frais.
L’infirmité politique du Chef de l’Etat
Camerounais aurait dû, depuis, attirer l’attention des spécialistes en
la matière sur les graves défaillances de 4 de ses sens :
- politique a courte vue ou carrément aveugle,
- insensibilité totale à la senteur de son régime pourri,
- surdité notoire face aux doléances populaires,
- manque manifeste de volonté à toucher du doigt les réalités vraies du pays.
En établissant une petite synthèse informative plus ou moins confidentielle sur l’homme de Mvomeka’a, on a pu établir ce qui suit :
- jeu favori : discours provocateurs ;
- danse préférée : ''tcha tcha tcha'' (politique du « un pas en avant, deux pas en arrière ») ;
- palmarès : meilleur élève de la démocratie avancée (à six pieds sous terre) ;
- salaire : compte hors budget (CHB) ou hors sujet, vu le caractère tabou du salaire du chef de l’Etat;
- coupe vestimentaire favorite : gilet pare-balles ;
- numéro de compte bancaire : 007 (ultra secret).
BOULAGA (EBOUSSI Fabien) : un des trois grands nationaux à faire rayonner (avec Towa et Mouellé), au milieu des années 70, la pensée philosophique au-delà des frontières. BOULAGA seul aujourd’hui est resté debout, les deux autres s’étant prostitués à l’idéologie dominante : celle du pouvoir néocolonial. Si Fabien Eboussi Boulaga s’est montré d’une profondeur contestatrice remarquable dans ses prises de position politiques, notamment à l’université de Yaoundé, on doit avouer que sa première grande intervention dans la presse nationale (ses propositions de solutions au président Biya pour sortir le Cameroun de la crise) fut d’un hermétisme déroutant, bien propre aux philosophes cependant, qui laissait à penser que Boulaga ravalait le politique à l’arrière-plan des préoccupations fondamentales.
BRADERIE (Grande) : synonyme de recolonisation. Dans un article paru dans La Voix du Kamerun en fin 90 et titré : ''La Grande Braderie : Kamerun, pays à vendre'', Ebelle Tobbo parlait déjà de la frénésie avec laquelle le patrimoine est livré au pillage organisé par ceux-là même qui ont confisqué sa gestion (…). Il écrit plus loin : '' Au nom du ''Libéralisme communautaire'', on brade ce que le libéralisme planifié avait tenté de créer. Il faut privatiser !!! C’est l’air du temps. '' Ebelle Tobbo parle de ''Balladurisme tropical imposé'', de ''massacre économique de racket''. Il ajoute : '' On nous a autrefois menti que la version totalitaire de l’Etat-UNC avait pour finalité de bâtir un système fort et généreux, soucieux avant tout de justice sociale et de progrès ; cet objectif n’a pas été atteint. On cherche maintenant à nous convaincre que c’est en cédant tout le patrimoine de la Nation à des LAUGIER GILOT que nous sortirons de la crise. Notre souveraineté sera bientôt réduite à celle des bantoustans, où notre seule propriété se limitera à notre force de travail. Les sirènes du multipartisme ne doivent pas nous faire perdre de vue que notre pays est entrain de devenir une république bananière progressivement. A LAUGIER GILOT, les libero-communautaires abandonnent tout notre potentiel économique. Economiquement, nous avons cessé d’exister en tant que Nation, puisque ce cartel d’investisseurs franco-kamerunais prendra bientôt possession de notre appareil de production. Les mots ne trompent pas, investir est synonyme de nous occuper, assiéger. Les investisseurs étrangers sont des agresseurs et lorsqu’ils sont précédés par une solide réputation de voyous sans scrupules comme LAUGIER GILOT, il y a de quoi parier que le simple code du travail devant protéger l’ouvrier kamerunais sera bientôt un simple chiffon de papier. ''