A Mvomeka’a: La colère de Paul Biya contre le gouvernement
DOUALA - 11 OCT. 2012
© Souley ONOHIOLO | Le Messager
© Souley ONOHIOLO | Le Messager
Alors
qu’il voulait porter en terre son frère aîné, Benoît Assam Mvondo en
toute modestie, dans la sobriété et sans flonflon, le chef de l’Etat
s’est senti étouffé par la trop grande présence des strates de son
appareil de pouvoir, divers apparatchiks et ferrailleurs de la
mangeoire.
Jeudi, 04 octobre dernier, tout le
département du Dja et Lobo, dans la région natale du Sud était en émoi,
mais surtout pris d’assaut par une masse importante des personnes,
venant de divers horizons. A Sangmélima, où il y a une insuffisance
criarde des structures et infrastructures d’accueil, il n’y avait pas
assez de place pour tout le monde. Dans l’arrondissement de Meyomessala,
où se trouve Mvomeka’a, le village natal du chef de l’Etat, président
de la République, Paul Biya, les soucis de logement et d’accueil étaient
encore plus denses. Le complexe agro-industriel et hôtelier «Rock-Farm
de Ndonkol» s’est senti débordé par la demande. Le grand monde qui a
fait le déplacement de la Région du Sud, avait une seule destination:
assister dans le recueillement, le chef de l’Etat, affecté par la
douleur, suite à la mort de son frère aîné, Benoit Assam Mvondo. S’il
est certes vrai que dans les circonstances de deuil, en Afrique, lorsque
le voisin est affligé, l’on n'attend point d’invitation, ni de vertus
protocolaires, il est à souligner que tout le monde n’était pas la
bienvenue à Mvomeka’a. A commencer par les Hommes de médias, les membres
du gouvernement et autres collaborateurs du chef de l’Etat…
« Vous n’êtes pas la bienvenue ici… Qui vous a accrédités ? On ne veut pas de journalistes à cette cérémonie… » Ainsi réagissait les cerbères et gardiens du Temple de Paul, lorsque approchés par la meute des journalistes qui a fait le déplacement de Mvomeka’a. Résultat des courses, les hommes de médias, mis à l’étroit face à l’hystérie des forces de sécurité, sont apparus comme un colis encombrant. Et pourtant celui qui les y a amenés a cru bien faire, en accordant les facilités de déplacement à la presse. Pour l’avoir fait par le passé, à d’autres évènements, il a été applaudi et félicité. D’où sort-il que cette fois-ci, son action soit réprimandée ? En grattant le verni, l’on s’aperçoit au regard de certains indices, que le chef de l’Etat, voulait inhumer son frère dans la modestie, la sobriété, l’honneur et le recueillement, dus aux hommes du rang du patriarche Benoit Assam Mvondo. Pas de tambour, ni trompettes ; aucune publicité médiatique, pas de foule immense. Quand les obsèques «privées» deviennent un deuil national Dans le vœu ardent de « Nnom Ngii » de porter en terre son frère aîné selon la notabilité, la grandeur et la sagesse de la tradition bulu, pour éviter quelque saupoudrage, il y a eu un ensemble d’obstacles : la marche à pieds imposée à tous (sauf aux prélats) sur une distance de près de quatre km; la non réservation des chambres de l’hôtel « Rock-Farm de Ndonkol », qui en pareille occasion sont mises à la disposition du cabinet civil… Mais il y a eu surtout la programmation des obsèques, pendant des jours ouvrables. Signe que Paul Biya ne voulait pas donner d’allure solennelle à l’évènement. Il est connu de tous, que les cérémonies d’enterrement sont organisées le week-end ; pour permettre la mobilité des personnes. Le chef de l’Etat lui-même, lorsqu’il arrive qu’il décrète les obsèques nationales ou officielles à l’honneur et à la dignité des personnalités de haut rang, celles-ci sont organisées le week-end. En programmant les obsèques de son frère un jour ouvrable (vendredi), le chef de l’Etat ne voulait pas en faire un deuil national. Plus grave, lui qui est souvent critiqué de favoriser le flagrant délit d’abandon de travail de ses collaborateurs, à l’occasion des fêtes du Rdpc, a voulu cette fois ci laisser les membres du gouvernement et autres, dans leur bureau. Hélas. Une fois de plus, une fois de trop, les collaborateurs du « Nnom Ngii » lui ont désobéi et l’ont pris au dépourvu. Plus grave, il y en a qui se sont mis en mission, ceux qui ont utilisé les moyens financiers et matériels de l’Etat, ont dilapidé la fortune publique, engagé des dépenses exorbitantes pour une cérémonie entièrement privée et pour laquelle, ils n’étaient pas attendus. Autant de choses qui d’après nos sources, irritent et provoquent le courroux de Paul Biya. Le chef d’Etat qui commence à étouffer, à s’indigner de la forte présence de ses affidés, mêmes pour des occasions d’extrême intimité, est-il à plaindre ? Dans son envolé et son désir de s’éterniser à la tête de l’Etat, à en juger par sa volonté de stériliser la vie politique à sa taille, sa propension à perpétuer l’autoritarisme, le président Paul Biya (qui gouverne le Cameroun depuis le 06 novembre 1982), s’est construit un labyrinthe, mieux, un système d’engrenage qui le prend en otage. Ne pouvant plus se défaire de ceux qui l’ont transformé en un totem, malgré de multiples transhumances, il est dans l’étau et la nasse des « dragons » qu’il a lui-même fabriqués. Si pour certains c’est la rançon de la gloire, au quartier, on dit que le « bandit » est tombé dans son propre piège. |
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