8 AOUT 1914...JOURNEE NOIRE AU PAYS KAMERUN ! EXECUTION, PENDAISON, TRAHISON, PLEURS, DESOLATION...NOUS N'AVONS RIEN OUBLIE !!!
8 AOUT 1914...JOURNEE NOIRE AU PAYS KAMERUN ! EXECUTION, PENDAISON, TRAHISON, PLEURS, DESOLATION...NOUS N'AVONS RIEN OUBLIE !!!
PAR Tétè Mandjombè II on Aout 08,2010
Il est une heure du matin, je n’arrive point à dormir.
Demain, c’est le « Tet’Ekombo ». Je me revois trente ans plus tôt assis à
côté de ma grand-mère Kwin. C’est elle qui la nuit tombée avait
l’habitude de me plonger dans un monde de joies mais aussi de peines
avec des contes dont elle seule maitrisait l’art. Elle disait
:”Engingilayé !” et je répondais avec ma voix de jeunot : “ Ewessé !”.
Je me souviens bien de certains des personnages comme je me rappelle
aussi que dans mes rêves, je continuais de vivre ces scènes et même
parfois d’en devenir acteur. Je me souviens du colosse Malobè et de
Ngomninga. Je voulais avoir la force du deuxième, je voulais être ce
héros, justicier d’un temps méconnu par beaucoup. Tiens, il y avait
aussi l’Interminable épopée de Jeki la Njamb’a Inono avec des
personnages de légende comme Jeki-olo, Ise, Engomè vivant des mondes
d’une violence inouïe et d’autres par contre, d’une beauté inégalable.
Mais de toutes les histoires terribles que Ma’ Kwin’a Mandjomb’Eyango m’a racontées, une seule est restée figée dans mon cerveau à la manière d’un clou enfoncé dans un mur. Oui, une seule et je crois savoir pourquoi. En plus du fait qu’elle la racontait avec une rare émotion, c’était la seule histoire vraie de son répertoire. Une histoire parlant d’un membre de la famille, un homme d’une puissance et d’un courage hors du commun. Cet homme là, que je m’étais promis de venger à l’âge de huit ans en découvrant sa vie étalée devant moi grâce aux mots magiques de ma grand-mère etait nommé par cette derniere: Tete nya ngum Douala Manga ma Ndoumb’a Lob’a Beb’a Bell !!!!
Impossible donc de fermer l’œil cette nuit, l’image de Ma’ Kwin et celles de mon enfance auprès d’elle défilent. J’essaie d’imaginer ce qui s’est passé ce 8 Août 1914 sur les berges du Wouri. J’imagine le procès de mon Ancêtre et de son sécrétaire Ngosso Din. J’imagine le peuple en attente et apeuré pendant le jugement de son Roi. J’imagine les pleurs, les cris et les évanouissements quand enfin tombe le verdict : Condamnation à mort par pendaison. Quelle histoire que celle d’un Roi condamné à mort sur ses propres terres par des étrangers venus de la lointaine Europe !
Douala Manga Bell était de ces hommes-là qui voyaient en l’humain, quelqu’un d’essentiellement bon. Il a cru que la présence des Allemands venus quelques années plus tôt s’établir sur la côte Kamerun était salutaire pour les échanges commerciaux entre les communautés locales et ces derniers. Un traité de protectorat a même été signé entre les Roi Sawa et ceux qui allaient se comporter quelques temps plus tard comme de véritables agresseurs bravant les termes du Traité et montrant ainsi à leurs interlocuteurs Kamerunais, leurs véritables visages de criminels endurcis.
En effet, l’intention première de ces vampires germanisants d’un autre type n’était point de commercer, de protéger ou encore moins de civiliser la horde de sauvages comme bien souvent annoncé, mais plutôt d’envahir la totalité du Pays en passant d’un statut de Protectorat à celui de Propriété. Ces envahisseurs voulaient selon certains historiens créer un véritable apartheid sur nos terres, calqué sur le modèle de leurs cousins Boers de triste renommée implantés en Afrique du Sud.
Apres ce constat amer, Sa Majesté Douala Manga Bell envoie son Secrétaire Ngosso Din porter une lettre de protestation devant le Reichtag à Berlin. Ngosso Din sera arrêté à sa descente de bateau et reconduit manu-militari à Douala sans pouvoir faire entendre la voix de son Peuple trompé, opprimé et pillé. S.M. Douala Manga organise alors ce qui entrera dans l'histoire comme le premier acte nationaliste et révolutionnaire dans le pays Kamerun. Il entre en contact avec les autres autorités traditionnelles à l'intérieur du Pays pour les mettre en garde contre ce qu'il convient de qualifier comme étant une agression contre l'intégrité de la Terre héritée de ses valeureux Ancêtres et dont il est bien sur le garant en tant que Roi !
Les Dignitaires saisis vont dans leur quasi-totalité répondre favorablement à son appel et le sursaut nationaliste devient dès lors une ferveur révolutionnaire. Martin Paul Samba, Roi des Boulou au Sud du Pays et Madola le Roi des Batanga organisent une opposition armée farouche à l'endroit des vampires allemands. A Maroua, le Lamidat se défend à son tour. Malheureusement, l'élan de ces grands hommes animés par l'amour immense voué à leurs terres est stoppé lorsque les occupants sont mis au parfum des stratégies et des plans conçus par S. M. Douala Manga et ses compères décidés à les bouter hors du Pays Kamerun.
Le 8 Août 1914, après un procès aussi abject qu’expeditif, Douala Manga et Ngosso Din sont pendus par l'armée négrophobe allemande. Le même jour, Madola et Martin-Paul Samba sont passés devant le peloton d'exécution. Cinq dignitaires de Maroua le seront egalement quelques temps après. Douala Manga et ses frères d'armes inaugurent ainsi la longue liste des martyrs nationalistes Kamerunais que les Um, Moumié et autres Ouandié viendront rallonger lorsque les colons tueurs français que j'emmerde royalement au passage remplaceront les vampires allemands sur nos terres gracieuses.
La partie la plus poignante de l'histoire de S.M. Douala Manga est celle de la scène surréaliste de la veille de son exécution. L'officier allemand chargé de la détention de ce dernier, reconnaissant la justesse de son combat, le "libère" afin qu'il aille faire ses adieux à sa ravissante femme Engom'a Dayas mais aussi au reste du Clan Bell. S.M. Douala Manga se rend donc en pleine nuit auprès des siens qui bien entendu sont surpris de le voir arriver mais surtout d'apprendre sa volonté ferme de regagner le camp allemand avant l’aube et d’y attendre son exécution !!! Ma grand-mère à ce niveau du récit écrasait une larme et entonnait une chanson du regretté Lottin'a Samè dont les paroles me hantent jusqu'à ce jour (A sango’a mboa...Bila be ma jamba...nya mila...nya mila...)
Douala Manga a décidé de mourir en martyr digne afin que le monde sache qu'aucune injustice cruelle ne devrait pousser les plus forts à se saisir des biens des opprimés. Son Secrétaire, Tete Ngosso Din âgé seulement de 33 ans l'a accompagné dans ce voyage qui les mènera dans cet endroit mystique et mythique où vivent les Esprits des Ancêtres Divinisés : Sodibenga !
Avant d'aller rejoindre les Dooh la Makongo et autres Tet'Ewala Mbed'a Mbongo a Sodibenga, mon Ancêtre bien-aimé prononça les mots prophétiques suivants en guise de testament : « Vous pendez un innocent, vous me tuez pour rien. Mais les conséquences de cet acte auront une suite mémorable. Maintenant, je quitte les miens ; mais maudits soient les Allemands. Dieu que j'implore, écoute ma dernière volonté : que ce sol ne soit plus jamais foulé par les Allemands !!! ».
Ainsi fut dit, ainsi fut ACCOMPLI !
A l'heure où certains vendent, dilapident et piétinent l'honneur de notre Pays, quel souvenir nous reste t-il de ceux-là qui sont morts pour que nous soyons libres, unis et jouisseurs de nos biens?
A l'heure où nous célébrons une indépendance bancale, que faisons-nous au quotidien de la mémoire de ces Dignitaires grandioses morts sur le champ de bataille pour nous?
A l'heure où enfin, les descendants des tueurs de nos martyrs et pilleurs de nos ressources devant l'eternel continuent de nous narguer en nous maintenant au plus bas de l'échelle humaine, quelle leçon tirons-nous du combat à armes inégales livré par ces martyrs de classe exceptionnelle ?
L'heure est à la réflexion, à la prise de conscience et à la mise en pratique des idéaux de liberté et de sacrifice légués par ces Dignes Fils du Pays Kamerun.
Que Nyambé continue de faire briller leurs Esprits dans le Pays des ombres et que cette lumière nous guide en nous rappellant l'amour o combien immense qu'ils avaient et continuent d'avoir pour nous depuis le Sodibeng'a Batete Ba'asam (le Monde des Grands Ancêtres) !
Je vous remercie.
Mais de toutes les histoires terribles que Ma’ Kwin’a Mandjomb’Eyango m’a racontées, une seule est restée figée dans mon cerveau à la manière d’un clou enfoncé dans un mur. Oui, une seule et je crois savoir pourquoi. En plus du fait qu’elle la racontait avec une rare émotion, c’était la seule histoire vraie de son répertoire. Une histoire parlant d’un membre de la famille, un homme d’une puissance et d’un courage hors du commun. Cet homme là, que je m’étais promis de venger à l’âge de huit ans en découvrant sa vie étalée devant moi grâce aux mots magiques de ma grand-mère etait nommé par cette derniere: Tete nya ngum Douala Manga ma Ndoumb’a Lob’a Beb’a Bell !!!!
Impossible donc de fermer l’œil cette nuit, l’image de Ma’ Kwin et celles de mon enfance auprès d’elle défilent. J’essaie d’imaginer ce qui s’est passé ce 8 Août 1914 sur les berges du Wouri. J’imagine le procès de mon Ancêtre et de son sécrétaire Ngosso Din. J’imagine le peuple en attente et apeuré pendant le jugement de son Roi. J’imagine les pleurs, les cris et les évanouissements quand enfin tombe le verdict : Condamnation à mort par pendaison. Quelle histoire que celle d’un Roi condamné à mort sur ses propres terres par des étrangers venus de la lointaine Europe !
Douala Manga Bell était de ces hommes-là qui voyaient en l’humain, quelqu’un d’essentiellement bon. Il a cru que la présence des Allemands venus quelques années plus tôt s’établir sur la côte Kamerun était salutaire pour les échanges commerciaux entre les communautés locales et ces derniers. Un traité de protectorat a même été signé entre les Roi Sawa et ceux qui allaient se comporter quelques temps plus tard comme de véritables agresseurs bravant les termes du Traité et montrant ainsi à leurs interlocuteurs Kamerunais, leurs véritables visages de criminels endurcis.
En effet, l’intention première de ces vampires germanisants d’un autre type n’était point de commercer, de protéger ou encore moins de civiliser la horde de sauvages comme bien souvent annoncé, mais plutôt d’envahir la totalité du Pays en passant d’un statut de Protectorat à celui de Propriété. Ces envahisseurs voulaient selon certains historiens créer un véritable apartheid sur nos terres, calqué sur le modèle de leurs cousins Boers de triste renommée implantés en Afrique du Sud.
Apres ce constat amer, Sa Majesté Douala Manga Bell envoie son Secrétaire Ngosso Din porter une lettre de protestation devant le Reichtag à Berlin. Ngosso Din sera arrêté à sa descente de bateau et reconduit manu-militari à Douala sans pouvoir faire entendre la voix de son Peuple trompé, opprimé et pillé. S.M. Douala Manga organise alors ce qui entrera dans l'histoire comme le premier acte nationaliste et révolutionnaire dans le pays Kamerun. Il entre en contact avec les autres autorités traditionnelles à l'intérieur du Pays pour les mettre en garde contre ce qu'il convient de qualifier comme étant une agression contre l'intégrité de la Terre héritée de ses valeureux Ancêtres et dont il est bien sur le garant en tant que Roi !
Les Dignitaires saisis vont dans leur quasi-totalité répondre favorablement à son appel et le sursaut nationaliste devient dès lors une ferveur révolutionnaire. Martin Paul Samba, Roi des Boulou au Sud du Pays et Madola le Roi des Batanga organisent une opposition armée farouche à l'endroit des vampires allemands. A Maroua, le Lamidat se défend à son tour. Malheureusement, l'élan de ces grands hommes animés par l'amour immense voué à leurs terres est stoppé lorsque les occupants sont mis au parfum des stratégies et des plans conçus par S. M. Douala Manga et ses compères décidés à les bouter hors du Pays Kamerun.
Le 8 Août 1914, après un procès aussi abject qu’expeditif, Douala Manga et Ngosso Din sont pendus par l'armée négrophobe allemande. Le même jour, Madola et Martin-Paul Samba sont passés devant le peloton d'exécution. Cinq dignitaires de Maroua le seront egalement quelques temps après. Douala Manga et ses frères d'armes inaugurent ainsi la longue liste des martyrs nationalistes Kamerunais que les Um, Moumié et autres Ouandié viendront rallonger lorsque les colons tueurs français que j'emmerde royalement au passage remplaceront les vampires allemands sur nos terres gracieuses.
La partie la plus poignante de l'histoire de S.M. Douala Manga est celle de la scène surréaliste de la veille de son exécution. L'officier allemand chargé de la détention de ce dernier, reconnaissant la justesse de son combat, le "libère" afin qu'il aille faire ses adieux à sa ravissante femme Engom'a Dayas mais aussi au reste du Clan Bell. S.M. Douala Manga se rend donc en pleine nuit auprès des siens qui bien entendu sont surpris de le voir arriver mais surtout d'apprendre sa volonté ferme de regagner le camp allemand avant l’aube et d’y attendre son exécution !!! Ma grand-mère à ce niveau du récit écrasait une larme et entonnait une chanson du regretté Lottin'a Samè dont les paroles me hantent jusqu'à ce jour (A sango’a mboa...Bila be ma jamba...nya mila...nya mila...)
Douala Manga a décidé de mourir en martyr digne afin que le monde sache qu'aucune injustice cruelle ne devrait pousser les plus forts à se saisir des biens des opprimés. Son Secrétaire, Tete Ngosso Din âgé seulement de 33 ans l'a accompagné dans ce voyage qui les mènera dans cet endroit mystique et mythique où vivent les Esprits des Ancêtres Divinisés : Sodibenga !
Avant d'aller rejoindre les Dooh la Makongo et autres Tet'Ewala Mbed'a Mbongo a Sodibenga, mon Ancêtre bien-aimé prononça les mots prophétiques suivants en guise de testament : « Vous pendez un innocent, vous me tuez pour rien. Mais les conséquences de cet acte auront une suite mémorable. Maintenant, je quitte les miens ; mais maudits soient les Allemands. Dieu que j'implore, écoute ma dernière volonté : que ce sol ne soit plus jamais foulé par les Allemands !!! ».
Ainsi fut dit, ainsi fut ACCOMPLI !
A l'heure où certains vendent, dilapident et piétinent l'honneur de notre Pays, quel souvenir nous reste t-il de ceux-là qui sont morts pour que nous soyons libres, unis et jouisseurs de nos biens?
A l'heure où nous célébrons une indépendance bancale, que faisons-nous au quotidien de la mémoire de ces Dignitaires grandioses morts sur le champ de bataille pour nous?
A l'heure où enfin, les descendants des tueurs de nos martyrs et pilleurs de nos ressources devant l'eternel continuent de nous narguer en nous maintenant au plus bas de l'échelle humaine, quelle leçon tirons-nous du combat à armes inégales livré par ces martyrs de classe exceptionnelle ?
L'heure est à la réflexion, à la prise de conscience et à la mise en pratique des idéaux de liberté et de sacrifice légués par ces Dignes Fils du Pays Kamerun.
Que Nyambé continue de faire briller leurs Esprits dans le Pays des ombres et que cette lumière nous guide en nous rappellant l'amour o combien immense qu'ils avaient et continuent d'avoir pour nous depuis le Sodibeng'a Batete Ba'asam (le Monde des Grands Ancêtres) !
Je vous remercie.