Une question: Le RDPC va-t-il survivre à Paul Biya ?

DOUALA - 23 MARS 2012
© François Bambou | La Nouvelle Expression

Le parti présidentiel, devenu un simple mouvement de soutien à Biya, ne semble pas se donner les moyens de survivre à son fondateur. Le manège avait désarçonné plus d’un militant du rassemblement démocratique du peuple camerounais.

Le parti présidentiel, devenu un simple mouvement de soutien à Biya, ne semble pas se donner les moyens de survivre à son fondateur. Le manège avait désarçonné plus d’un militant du rassemblement démocratique du peuple camerounais. Peu avant la présidentielle de 2011, les militants de ce parti répétaient à l’envie que le 3ième congrès ordinaire serait un grand moment, pour investir le président candidat, lui donnant ainsi la possibilité de déposer son dossier de candidature auprès d'Elections Cameroun (Elecam). Surprise : Paul Biya a préféré le chemin inverse. Il convoque le corps électoral, fait déposer son dossier de candidature Elecam, puis réunit son parti pour un congrès déjà vidé de toute substance. Le message du président du parti des flammes était clair : Snobant tout l’appareil, le président national a montré qu’il pouvait se passer de l’investiture du parti, qu’il pouvait, à tout moment, se passer du RDPC. Mais l’inverse est-t-il possible ? Le RDPC peut se passer, ou même survivre à Paul Biya. La question effraie nombre de cadres du parti, qui n’osent même pas y penser. Le RDPC sans Paul Biya, il faudrait pourtant y penser déjà. D’abord parce que Paul Biya n’est plus un jeune homme qui a tout son temps devant lui, mais aussi parce que le président pourrait à raison, songer à prendre une retraite politique bien méritée. Au sein du RDPC, on donne pourtant l’impression de tout faire pour éviter d’aborder avec lucidité ce sujet qui s’impose de lui-même, vu l’âge du capitaine.

Pourtant, cette formation politique qui domine la scène nationale depuis bientôt trente ans par des moyens plus ou moins loyaux, devrait songer plus que le reste des camerounais à préparer l’après Biya. Car, vingt-sept ans après sa création, le parti est toujours construit autour du président national, quasiment déifié. Le RDPC ne vit que par lui et pour lui. Aucune instance n’a de prise sur lui. Le comité central peut ne jamais se réunir pendant une bonne dizaine d’année, le bureau politique peut se contenter de conclaves aussi sporadiques qu’expéditifs selon le bon vouloir du tout puissant président. Le congrès peut attendre quinze ans pour se réunir si le président estime qu’il pourrait s’y ennuyer. Ainsi, il peut nommer un bureau politique incomplet comme c’est le cas actuellement, sans courir le moindre risque d’être interpellé par quelque structure du parti que ce soit. Or les expériences récentes, notamment au nord de l’Afrique, montrent que l’apathie du peuple, dans ces circonstances, n’est pas à confondre avec de l’empathie. La preuve, en Tunisie, le parti présidentiel a été dissous après la départ brutal de l’ancien président Ben Ali (dont le bilan à la tête de son pays est de loin élogieux, comparé aux promesses stériles proférées en boucle par le régime Biya depuis 30 ans).

Au final, le RDPC a davantage les allures d’un club de soutien à Paul Biya, que d’un vrai parti politique, dont l’existence est fondée sur la défense d’une manière d’espérer la société, sur une volonté des mutualiser, et pas seulement sur le soutien à un individu. On a vu avec quel acharnement certains hommes forts du parti se sont mobilisés pour neutraliser des candidats déclarés à la présidence du RDPC, alors même que les chances de ces derniers étaient quasi nulles. Saint Eloi Bidoung a par exemple été inutilement empêché de se présenter à une élection (à la présidence du parti) qu’il aurait certainement perdue. Au comité central, on ne voulait manifestement pas embarrasser l’inviolable président… dans le même registre, il faut voir la gêne des militants, intellectuels, universitaires accomplis tels que le professeur Jacques Fame Ndongo, qui doit se donner des contorsions pour toujours justifier à postériori, les actes manqués du président.

Mais le plus inquiétant, c’est que Paul Biya a réussi à brider l’émergence de figures consensuelles au sin de son parti, privant donc ce mouvement d’un leadership alternatif pouvant maintenir l’unité du parti en l’absence de son fondateur.





23/03/2012
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