Un vieux dictateur toujours aux affaires !

un vieux dictateur toujours aux affaires !

Biya:Camer.bePartie 1: de l'ingratitude et des réseaux. A/- Du séminaire aux réseaux Aujoulat. Né vers 1933, celui qu’un instituteur surnomma « le roi Salomon camerounais », se fit renvoyer du petit séminaire d'Édéa en classe de seconde. Jeune et issu d'une famille pauvre, l’originaire de Mvomeka’a aimerait continuer ses études. Prenant son courage, ce fils de catéchiste ira se lamenter auprès d'André-Marie Mbida, un catholique fervent, grand leader charismatique et futur premier ministre de l'Etat autonome du Cameroun. Bien que le lycée Général Leclerc affichât complet, Mbida réussira malgré tout à l’y intégrer. Comme cela est de coutume chez les fang-bëti (peuple bantu habitant le sud camerounais), les Mbida deviendront par la même occasion sa famille adoptive. D'ailleurs, des patriarches fang-bëti se souviennent encore du jeune, devenu un octogénaire, qui passait régulièrement ses vacances vers Obala (région d'origine de la famille Mbida).

Comme la majorité de jeunes diplômés camerounais de sa génération, après avoir obtenu son diplôme de baccalauréat, il ira continuer ses études universitaires en France. Pendant ses études en hexagone, bien que l'on ne sache toujours pas qui, de Louis-Paul Aujoulat ou de l’ancien séminariste, fit le premier pas vers l'autre, le jeune homme deviendra un proche des réseaux Aujoulat au même titre qu'Ahmadou Ahidjo. Il se fera ainsi parrainer à la présidence de la république en 1962 par Aujoulat.

B/- Qui était Aujoulat ? Ses rapports avec Mbida

Pied-noir d'Oran, c'était un docteur et politicien français qui participa à plusieurs gouvernements sous la IVème république française. Il était député de la troisième circonscription du Cameroun au Palais Bourbon. En 1951, il fonda le Bloc démocratique camerounais (Bdc) où militèrent Ahidjo et Mbida. Après s'être, entre autre, opposé avec succès à la présidence d’Aujoulat à l'Assemblée territoriale du Cameroun (Atcam), Mbida démissionne avec fracas du Bdc en 1953 et fonde son propre mouvement : le Comité de coordination du Cameroun (Cococam).

Les gouvernements français sont instables sous la IVème république et les sièges au Palais Bourbon doivent être fréquemment renouvelés. En 1956, Mbida va défier Aujoulat et rempoter brillamment les élections législatives dans troisième circonscription du Cameroun. Ces élections sonnent officiellement le glas de la carrière politique d'Aujoulat. Il ne s'en remettra jamais même s'il continue de tisser, dans

l'ombre, des ficelles. Il a des hommes fidèles et sûrs à disposition : André Fouda, Ahmadou Ahidjo, Charles Awono-Onana, Ngo’o Mebe le géniteur de l’autre, etc.

Aujoulat est aussi celui qui aurait initié de jeunes hommes comme Ahidjo au système de morale illustré par des symboles, leur prodiguant un enseignement ésotérique à l'aide de rituels très anciens. Ceci pourrait expliquer pourquoi Mbida a toujours arguer que ses déboires des années soixante avaient un dénominateur commun : Aujoulat et ses réseaux. Lui Mbida, il a refusé l'initiation.

Compte tenu de l'humanisme et en particulier du sentiment de reconnaissance qui animent les bantu, une question légitime dont nous n'avons jamais eu réponse est de savoir si l’ancien élève du lycée Général Leclerc, devenu secrétaire général à la présidence puis premier ministre sous Ahidjo, a rendu une seule visite à Mbida entre 1962 et 1980 ? Il convient de noter que Mbida est décédé pour mauvais traitement médical après avoir été en prison puis en résidence surveillée de 1962 à 1972. Pourrait-on parler d’ingratitude ? Ce fils de catéchiste a-t-il déjà un tant soit peu manifesté la bonté de cœur ? Ancien séminariste, il se rappelle à coup sûr de ces paroles écrites par le roi Salomon : « la chose désirable chez l’homme tiré du sol, c’est sa bonté de cœur ».

C/- Une carrière peu enviable basée sur des réseaux

Lorsque François Mitterrand arrive au pouvoir en 1981, il n'a certainement pas fini de digérer l'affront subi en 1962 en compagnie de Tixier-Vignancour lors d'une mascarade de procès au Cameroun : le démocrate André-Marie Mbida et le socialiste Charles Okala sont accusés de subversion et Ahmadou Ahidjo les empêche, en même temps, de plaider pour ces derniers. En fait, Mbida, Okala, Bebey Eyidi et Mayi Matip opposants au régime dictatorial d'Ahidjo venaient de publier une déclaration commune où ils exprimaient avec force leur refus d'adhérer au projet de parti unique en gestation; affirmant qu'un parti unique conduirait inévitablement à la dictature. La dictature, nous y sommes depuis, on dirait une prophétie ! À l’exception d’André-Marie Mbida et de Marcel Bebey Eyidi qui connaîtront un triste sort, Charles Okala et Théodore Mayi Matip trouveront par opportunisme un arrangement à l’amiable avec Ahmadou Ahidjo. Ils adhéreront au parti unique et seront récompensés par le tyran venu du nord. D’ailleurs, ils finiront paisiblement leur vie dans l’opulence. Ces deux hommes ont certainement oublié que « la pauvreté dans la liberté est préférable à la soumission dans l'opulence ». La santé de Mbida et de Bebey Eyidi s’est considérablement détériorée dans des camps de concentration de l’Etat UC/UNC/RDPC. À la sortie des camps, Mbida est aveugle et Bebey Eyidi décède trois mois plus tard. Ces deux derniers n’ont jamais adhéré au parti unique.

François Mitterrand et Tixier-Vignancour sont deux avocats de renom. Le premier est un homme politique de gauche et le second de droite. Aussi, Tixier-Vignancour a soutenu François Mitterrand face à Charles de Gaulle. Par ailleurs, en 1981, François Mitterrand trouve dans les tiroirs de la Vème république française un projet de Valérie Giscard d'Estaing sur le renouvellement des chefs des régimes policiers et anti-démocratiques dans les ex colonies et territoires assimilés sous le giron de la France. Bien que n'ayant jamais bénéficié d'un seul mandant électif, l’ancien séminariste devenu premier ministre depuis 1975 notamment grâce à son appartenance à de mystérieux réseaux clandestins et secrets est le successeur constitutionnel direct d'Ahidjo. Il profitera de cette situation lorsque le « petit derviche » du nord paiera les frais du projet Giscard et/ou subira la revanche impitoyable d'un Mitterrand humilié quelques années plus tôt. Bien que les deux raisons soient liées, la deuxième est la plus plausible dans la mesure où d'autres dictateurs comme Omar Bongo, Gnassingbé Eyadema ou Félix Houphouët-Boigny resteront aux commandes. Quoi qu'il en soit, l’ancien séminariste venait encore d'être parachuté par la faveur des réseaux !

En 1990, pendant les années de braise, il recevra grâce à des réseaux occultes une aide intellectuelle, matérielle et financière précieuse pour se maintenir au pouvoir. Sous l'iceberg, l'élection de 1992, le duel entre John Fru Ndi et l’autre est aussi un duel des réseaux : les deux hommes sont des initiés, Fru Ndi est par ailleurs au Lions Club International et il l'a dirigé; l’autre est un spéculatif, il a un faible avec la lettre « G » et la richesse de son symbolisme (l'équerre et le compas, le maillet et le ciseau, le niveau et le fil à plomb, la règle et le levier, la truelle), aussi il est proche de Raymond Bernard, grand maître d'un mouvement philosophique, initiatique et traditionnel.

En 2011, toujours par le biais de ses réseaux, l’octogénaire réussira à trouver un dernier souffle auprès du P5+1 animé par le très tonitruant Nicolas Sarkozy gonflé à bloc. Quoi de plus normal, le vieux locataire d’Etoudi a toujours si bien sauvegardé les intérêts (i) des forces obscurantistes et exécrables, (ii) de la nébuleuse néocolonialiste connue sous le nom de « françafrique » et (iii) de la mafia qui exploite abusivement les richesses de l’océan, du sol et du sous-sol camerounais.

Homme des réseaux, arrivé et maintenu au pouvoir par des réseaux, toutes ses nominations ne prennent pas en compte des compétences intrinsèques d'un individu mais de la soumission et de l'appartenance du futur promu à des réseaux, des réseaux certifiés par le clan d'un homme dont le chiffre symbolique est le 13. Son dernier gouvernement illustre encore une fois ce particularisme. Il compte de nombreux ésotériques et initiés dont un échantillon aléatoire est donné ici à titre illustratif : Martin Belinga Eboutou, Jacques Fame Ndongo, René Sadi, Grégoire Owona, Pierre Moukoko Mbonjo, Edgar Alain Mebe Ngo'o, Laurent Esso, Peter Agbor Tabi, etc.

De ces hommes cités, les deux premiers ont particulièrement retenu notre attention : le Directeur du cabinet civil et le Ministre de l’enseignement supérieur. Hommes de confiance, ils sont très écoutés de l’octogénaire.

Le premier, de couleur marron foncé, aime le noir. De corpulence élancée au ventre bedonnant, sa bonté de cœur est très étroite. La transparence, la probité, la sagesse, l’humanisme, la liberté ou l’amour sont des termes dont il ne connaît plus la teneur, il s’agit des qualités très anciennes pour lui. Il est cité dans plusieurs histoires sacrificielles et semblerait être impliqué dans la traque et la décapitation du communiste Castor Osendé Afana. Des camerounais de sa trempe, cet homme n'est certainement pas gourmand, mais très friand des secrets magico-spiritistes. Si un classement existait, présentement, il ne fait l'ombre d'aucun doute que l'on rangerait inéluctablement cet ancien séminariste (aussi) dans le trio des hommes les plus dangereux ou du moins, des infréquentables du Cameroun. Peu recommandable, ce fils de catéchiste (aussi), coopte aux fonctions ministérielles, influencerait non seulement le calendrier des arrestations mais aussi et surtout la liste des candidats retenus à des compétitions électives, pour ne citer que ces quelques exemples. Pour faire simple, Belinga anë mbët mõt, satan'e yá si ndõn.

Intellectuel prolifique, en un certain sens, dans son domaine d'expertise, le second est un libre penseur qui se dit spéculatif et s'auto-sublime. Pour lui, tout est relativisme. Il exhibe avec une fierté déconcertante, à la limite de l'arrogance, sa chevalière signe d'un certain aboutissement spirituel, enfin avec sa cohorte d'amis. Il ne passe pas par quatre chemins pour affirmer à qui veut l'entendre qu'il n'a jamais rendu visite à son parent Pierre Désiré Engo emprisonné depuis de nombreuses lunes au Sed. Engo est un ancien collaborateur du vieux homme d'Etoudi. Au Cameroun, l'appartenance à des sociétés secrètes ou initiatiques étant taboue, le second a le mérite d'avouer que ses camarades et lui même, collaborateurs du chef du régime anti-démocratique, sont des créatures, des esclaves du vieux homme féru d’ésotérisme. Tous sont des fabrications de celui qu'un instituteur qualifia à tord, à une époque lointaine, de « roi Salomon camerounais ». De ces hommes, aucun ne bénéficie d'un mandat électif juste et crédible. Leur ascension professionnelle et sociale, ils la doivent avant tout aux réseaux et au pouvoir du décret présidentiel.

Par voix de conséquence, nombreux sont des camerounais qui donnent à voir le patron de l’Etat RDPC comme « le chef et guide spirituel de la nation camerounaise ». D'ailleurs, le premier et le second pour ne citer que ces deux fabrications, ont décidé de passer à l'acte au mois de janvier 2011 en intronisant le vieux homme, roi fainéant à perpétuité, « Nnom Ngui ». Notons que le Nnom Ngui est un totem négatif faisant partie des démons dans la culture fang-bëti. Assez invocateur quand on sait que le second intronisa aussi le premier comme « homme singulier à même de jouer un rôle d'intermédiaire, entre les

vivants et les morts ». Au rythme où vont les choses au Cameroun et sur la scène internationale, tout porte à croire que le triste destin de « Beyegue a Nkula » vers 1961 pourrait bien être le même pour Nnom Ngui.

© Correspondance : Alexandre MANGA ZOA


04/06/2012
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