Téléphonie mobile: Eto’o Telecom n’est point le troisième opérateur

DOUALA - 10 JAN. 2012
© Hervé B. Endong | La Nouvelle Expression

L’entreprise de l’attaquant camerounais va plutôt revendre le crédit de communication d’Orange, comme le font les «call-box». Mais avec son appellation commerciale personnalisée. La précision vient de l’Agence de régulation des télécommunications (Art).

Le régulateur a publié un communiqué qui coupe l’appétit dans Cameroon Tribune du 5 janvier 2012:

« L’agence a pris connaissance de la campagne promotionnelle engagée par la société Eto’oTelecom Sa pour la fourniture des services de téléphonie mobile. A ce titre, il convient de souligner que la société Eto’o Telecom a reçu de l’Art un récépissé transitoire de déclaration pour la fourniture des services à valeur ajoutée, l’activité envisagée par le requérant relève du régime de la déclaration, conformément aux dispositions de l’article 15 (1) de la loi n°2010/13 du 21 décembre 2010 régissant les communications électroniques au Cameroun »,

écrit le directeur général de l’Art. D’après Jean-Louis Beh Mengue, l’activité principale d’Eto’o Telecom consistera à la revente de trafic téléphonique au travers des réseaux des opérateurs concessionnaires de téléphonie, à savoir, Camtel, Orange Cameroun et Mtn Cameroun. «Une soixantaine de sociétés disposent de titres d’exploitation similaires au Cameroun. Cette activité consiste à acheter du trafic en gros, en marque blanche et à le commercialiser au grand public sous enseigne ou appellation commerciale personnalisée », précise Jean-Louis Beh Mengue dans ce communiqué.

Ce dernier dévoile le vrai visage d’Eto’o Telecom dans le dernier paragraphe. «Aussi, du fait que les activités d’Eto’o Telecom s’appuient sur les réseaux des opérateurs concessionnaires de téléphonie suscités, il s’agit bien de la revente de trafic téléphonique et non de l’établissement et/ou l’exploitation d’un nouveau réseau de téléphonie mobile», tranche Jean-Louis Beh Mengue.

Eto’o Telecom n’est donc pas un troisième opérateur du mobile, mais plutôt un revendeur de crédit. La sortie du régulateur vise à remettre les pendules à l’heure et, surtout, éviter des « problèmes » avec la hiérarchie, apprend-on. « L’Art a divulgué ce communiqué parce que les différentes communications d’Eto’o Telecom font état de ce que la société est un troisième opérateur du mobile. Ce qui n’est pas le cas », explique un cadre du ministère des Postes et Télécommunications (Minpostel). « La société a demandé une licence pour travailler en tant qu’un opérateur virtuel. Il se trouve que les textes sont encore en signature à la présidence de la République. Mais, pour lui permettre de travailler, l’Art lui a remis un récépissé transitoire de déclaration et l’a mis dans le segment des revendeurs de crédit. Ce n’est pas le même cheminement pour un opérateur du mobile », poursuit notre source. Cette dernière apprend ainsi que le processus est plus compliqué. Et demande une surface financière qui se conjugue en centaines de milliards de francs Cfa. « Pour le mobile, le dossier n’est plus au niveau du Minpostel, mais du président de la République qui signe un décret d’approbation. Et il faut au moins 50 milliards F Cfa pour cela », précise notre informateur. Ce n’est pas tout.


« Eto’o ne peut pas s’en sortir ! »

Après la licence qui absorbe déjà plusieurs milliards, il faut maintenant se tourner vers les équipements. C’est également une hydre à mille têtes, au regard de la cherté des équipements. On apprend ainsi qu’un seul pylône à construire coûte au moins 125 millions F Cfa hors taxes. Le Minpostel révèle qu’Orange Cameroun dispose de 900 dans tout le Cameroun, soit un peu plus de 81 milliards d’investissement. C’est sensiblement la même chose pour Mtn Cameroun. « C’est un domaine qui demande beaucoup de moyens et Eto’o ne peut pas s’en sortir », conclut notre informateur, en reprécisant la nature de l’activité d’Eto’o Telecom. «L’opérateur virtuel n’est pas un opérateur mobile. Il n’a pas d’équipements, ainsi qu’un réseau propre. Il achète les minutes en gros et les revend à ses abonnés», insiste-t-il.

On apprend ainsi que l’entreprise de l’attaquant camerounais a jeté son dévolu sur Orange Cameroun, l’entreprise pour laquelle il a été longtemps ambassadeur. C’est donc le crédit de l’entreprise française qu’Eto’o Telecom va revendre dans un premier temps. Pour l’instant, aucune précision sur la revente du crédit des deux autres opérateurs. Encore moins sur la quote-part à gagner dans la revente du crédit. Cette quote-part sera-t-elle suffisante pour faire tourner une entreprise dont l’ambition se place au-delà des frontières ? C’est la question de fond.

La sortie de l’Art vient ainsi apporter une contradiction de taille aux propos servis par le top management d’Eto’o Telecom. Au cours de la conférence de presse de présentation de la marque Set Mobile, le 22 décembre 2011, l’administrateur directeur général (Adg) de la société n’est pas allé du dos de la cuiller. Sur la question de savoir si Eto’o Telecom fera dans le mobile, le Français, qui a d’ailleurs travaillé pour le groupe France Telecom au Togo, s’est voulu direct. « On sera opérateur de téléphonie mobile au même titre qu’Orange et MTN », a réagi Charles Gueret. « Au Cameroun, plusieurs personnes ont encore les puces des deux opérateurs. Cela veut dire qu’elles ne sont pas totalement satisfaites. Donc, notre entreprise va miser sur la qualité, et se distinguera par des tarifs avantageux et une gamme de terminaux accessibles à tous », a-t-il ajouté. Autant de déclarations qui ont sans doute amené plusieurs Camerounais à acheter la puce Set Mobile. En effet, on parle d’un peu plus de 50.000 unités dont les propriétaires n’attendent que leur activation prévue le 21 janvier 2011. Donc, la semaine prochaine. Avec l’assaut lancé par l’Art, l’engouement restera-t-il le même ? C’est la seconde grande inconnue.



10/01/2012
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