Réponses aux questions des journalistes/“Que la Cedeao se donne les moyens de cette force légitime” - De quelle force disposez-vous M. le Premier Ministre, pour déloger M. Gbagbo ?

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Réponses aux questions des journalistes/“Que la Cedeao se donne les moyens de cette force légitime” - De quelle force disposez-vous M. le Premier Ministre, pour déloger M. Gbagbo ?
(Le Nouveau Réveil 04/01/2011)


Je suis Premier Ministre, ministre de la Défense. Je dis bien ministre de la Défense de l'armée de Côte d'Ivoire. L'exercice ici pour le gouvernement est de mettre en cohérence l'usage de la force et le droit international, le droit international et la légalité internationale. Que comptent faire les institutions sous régionales, ou continentales ou mondiales ? C'est pourquoi il y a quelques semaines ou quelques jours, j'ai lancé un appel à la Cedeao, à l'Union Africaine, à l'Union Européenne et à l'Onu pour adopter le principe de la force légitime pour instaurer la démocratie en Côte d'Ivoire. Parce que, sachez-le, l'enjeu en Côte d'Ivoire dépasse les frontières de notre pays. Ce sont bien tous les Africains depuis leurs hameaux, leurs villages, leurs villes, qui observent l'attitude de la communauté internationale dans notre pays. Ou on réussit à faire admettre le résultat des urnes dans notre pays, donc l'instauration de la démocratie, ou alors on échoue à mettre la démocratie en Côte d'Ivoire et ça devient une jurisprudence pour toute l'Afrique. Donc, l'enjeu n'est pas le territoire ivoirien. L'enjeu qui est là, c'est soit on assiste à la mise en œuvre de la démocratie en Côte d'Ivoire, ou on reste indifférent face à l'assassinat de la démocratie en Côte d'Ivoire. ça pose la question du droit international. Comment faire en sorte que la souveraineté du peuple qui s'exprime par le suffrage et le taux de participation à cette élection, soit reconnue en Côte d'Ivoire ? Voici l'enjeu ! La démocratie sera ou ne sera pas en Côte d'Ivoire selon que la communauté internationale aura la détermination de mettre en cohérence le souci du respect du verdict des urnes et le droit international. Et je pense que sur la question, il ne faut pas hésiter. C'est pourquoi, nous pensons qu'aujourd'hui, la démocratie doit s'imposer par une force légitime. C'est ce que nous attendons de la Cedeao. Et le ministre de la Défense de la Côte d'Ivoire mettra l'ensemble des troupes ivoiriennes républicaines à la disposition de toute institution qui décidera, bien entendu, de faire usage de la force légitime pour asseoir la démocratie dans notre pays.

Votre gouvernement a rappelé depuis quelque temps, un certain nombre d'ambassadeurs. On est toujours curieux de savoir à quand la nomination des nouveaux ambassadeurs.
En ce qui concerne la question des ambassadeurs, je vais appeler le ministre des Affaires étrangères pour donner des éléments de réponse.
Le ministre des Affaires Etrangères : Merci M. le Premier Ministre. Pour répondre à cette question, je dois dire que pour procéder à la nomination d'un ambassadeur, il y a un certain nombre d'actions à mener. D'abord il faut obtenir l'agrément du pays hôte. C'est tout un processus. Et en plus, il faut attendre la réponse du pays hôte et procéder à la nomination de cet ambassadeur. S'il est déjà ambassadeur, aucune nomination gouvernementale n'est faite, mais s'il ne l'est pas, il faut indexer tout cela. C'est pour vous dire qu'il s'agit d'un processus et que cela ne se décide pas du jour au lendemain. Il nécessite un certain temps. Il y a cependant une différence avec les nominations auprès des institutions internationales comme l'Onu. Il suffit, là, tout simplement d'informer le Secrétaire Général. Donc, nous avons paré au plus pressé en nommant notre ambassadeur aux Nations Unies dans les conditions urgentes que vous savez. Il a été agréé et il est aujourd'hui à New York reconnu des 187 pays membres de l'organisation. D'autres nominations sont en cours. Vous le saurez, dès que nous aurons reçu les agréments. Je ne saurai vous dire maintenant quelles sont ces nominations, d'autant plus que nous n'avons pas encore reçu les agréments de pays hôtes où ces personnes sont nommées. Je vous demande un peu de patience. Le moment venu, je suis sûr que le Premier Ministre lui-même vous annoncera ces nominations. Je peux ajouter que les ambassades ne sont pas vides. Pour les 26 ambassadeurs que nous avons rappelés, dans ces ambassades, il y a des agents. Et dès qu'un ambassadeur est déplacé, l'ambassade continue avec un chargé d'affaires à l'intérim. C'est ce à quoi nous avons procédé, donc, n'ayez aucune crainte. Les ambassades continuent de tourner jusqu'à ce que les nominations soient faites.
La fin de la diplomatie est liée forcément à la réponse que M. Gbagbo donnera. Mais, je dis que le Président de la République a laissé la possibilité pour M. Gbagbo de se retirer ce 31 décembre pour pouvoir lui accorder les avantages d'ancien chef de l'Etat et toutes les autres facilités que vous connaissez. La Cedeao a donc dépêché une mission en Côte d'Ivoire que le Président de la République a reçu dans cette même salle. Donc évidemment, nous avons souhaité que la prochaine venue de cette mission soit la dernière et que la Cedeao se donne les moyens de l'usage de cette force légitime. Je crois que le communiqué de la Conférence des chefs d'Etat était très clair sur cette question. Nous attendons que la Cedeao mette en œuvre les mesures qu'elle-même a préconisées. Je vous rappelle MM. les journalistes, que les chefs d'état-major, conformément au communiqué de la Cedeao, se sont déjà réunis et ont déjà commencé à esquisser de façon plus précise la mise en œuvre de l'usage de la force légitime. Je crois que c'est quelque chose qu'il faut encourager et saluer. Et nous l'avons fait directement ou indirectement. Maintenant, nous attendons que ce dispositif se mette en place conformément à la décision des chefs d'Etat.

Deux avocats volent en ce moment au secours de M. Gbagbo. Il s'agit de Me Verges et de Me Dumas. Ils sont en pleine offensive. Est-ce que votre gouvernement a les moyens d'engager la contre-offensive ?
Premièrement, je vous pose une question à deux sous. Qui est l'avocat des causes perdues ? Vous me donnerez un nom ! Cela veut dire que c'est quand on est perdu, qu'on choisit cet avocat. Donc, ce sont des signes évidents que M. Gbagbo est désemparé. Une fois de plus, tous les dictateurs se ressemblent parce qu'ils choisissent toujours le même avocat. Rappelez-vous, Verges était l'avocat de Milosevic ! Il était l'avocat de Pol Pot. Tous des dictateurs. Donc, ça ne fait que confirmer le caractère dictatorial du régime que nous subissons en Côte d'Ivoire. Deuxièmement, à propos de M. Roland Dumas, je vais citer François Mitterrand qui disait qu'il a deux avocats. Pour le droit, il avait Robert Badinter. Et pour le tordu, il avait M. Roland Dumas. Gbagbo qui n'aime pas l'intervention de la communauté internationale est obligé de s'attacher les services de deux avocats français. C'est contradictoire. Mais, c'est aussi à la hauteur du désespoir qui l'habite. Pour nous, de toutes les façons, c'est fini ! Le gouvernement continue son offensive diplomatique et médiatique. Nous avons envoyé une délégation dirigée par l'un des plus grands constitutionnalistes africains, le professeur Vangah Wodié pour expliquer la situation dans les pays de la sous-région. Pour occuper les plateaux de télévision. Et ceci nous suffit ! Nous pensons donc que la crise en Côte d'Ivoire est une crise entre Ivoiriens. C'est pourquoi notre choix s'est porté sur le grand constitutionnaliste qu'est le professeur Francis Vangah Wodié. Pour terminer sur la question, parce qu'il ne faut pas accorder plus d'importance à ça, je pense que M. Verges et M. Roland Dumas, c'est la françafrique qu'on a voulu dénoncer à la télévision. Ils font leur fortune sur la sueur et le sang des Africains. Parce qu'après, c'est une facture qu'on présente à Gbagbo. Il y a que M. Verges était allé au Libéria, à Moronvia, quand M. Taylor était à quelques semaines de son départ pour le TPI. Et la facture qu'il avait proposée à M. Taylor était de 2 millions de dollars. Je ne sais pas combien lui propose Gbagbo, mais, c'est encore le contribuable ivoirien, le sang et la sueur des Ivoiriens qui permettra de remplir les comptes bancaires de deux avocats dépassés. L'un a 85 ans et l'autre 88 ans. Certains m'ont dit qu'ils ont oublié les notions de droit. Pour être plus sérieux, en ce qui nous concerne, le gouvernement continue son offensive. Je veux envoyer les Ivoiriens à remarquer qu'au 5 décembre, M. Gbagbo avait tous les pouvoirs, mais que nous sommes au 31 décembre et c'est M. Alassane Dramane Ouattara qui est le président de la République de Côte d'Ivoire. C'est ce qui est important à faire remarquer.

Il était annoncé ces jours-ci, la nomination d'un chef d'état-major de l'armée. Qu'en est-il ? Des informations nous parvenant font état de ce que des personnes auraient été contactées dans l'armée pour assumer cette fonction et qu'elles auraient refusé. Vous confirmez ou infirmez ces informations ?
Sur la nomination d'un probable Cema (Chef d'état-major), je vous rappelle que je suis le ministre de la Défense. Et cela n'a jamais été inscrit dans mon agenda. Nous continuons de travailler avec les Forces armées ivoiriennes. Des personnes se seraient désistées ? Je suis surpris ! Bien au contraire, tous les coups de fil que j'ai montrent bien la sympathie qu'ils ont pour notre gouvernement. Et, ils ne manquent pas de nous rappeler que 3 généraux à eux seuls cumulent l'artillerie lourde de notre armée (…)

Une inquiétude entretenue par le camp Gbagbo est relative à l'envoi des forces de l'Ecomog. Il se dit que dans certains pays où l'on a envoyé ces troupes, cela a laissé des traces douloureuses. Que pouvez-vous dire pour rassurer les Ivoiriens ?
(…) S'agissant de la force légitime, j'insiste sur le mot légitime. C'est légitime ! La volonté populaire s'étant manifestée, cette force ne vient que conformément à ce souhait populaire des Ivoiriens pour mettre en place le gouvernement reconnu, légal et légitime de la Côte d'Ivoire. Des craintes ? Je n'ai pas les mêmes craintes. Parce que les rapports de force au niveau de nos forces armées est simple. Vous avez des forces républicaines ici en Côte d'Ivoire aussi bien à Abidjan qu'à Bouaké motivées, prêtes à faire le basculement. Et en face vous avez des mercenaires et des putschistes. Entre ces mercenaires/putschistes et une force organisée de notre communauté sous-régionale, je ne sais pas qui pourrait faire plus de torts à la Côte d'Ivoire. Je veux même vous dire ma conviction personnelle que cette affaire ne prendra pas autant de temps. En réalité, les forces militaires républicaines n'attendent qu'un simple coup de pouce pour faire l'économie de vies humaines en Côte d'Ivoire, et vous le savez. La preuve, le 16 décembre, les forces armées des forces nouvelles étaient à Tiébissou et à Duékoué. Elles voulaient faire une progression lorsque par souci de préserver des vies humaines et de ne pas emmener deux forces à s'entredéchirer, à s'entretuer, nous avons intimé l'ordre aux Forces nouvelles de ne pas faire de progression et de rester sur leurs bases. C'est cela la différence entre le président élu, soucieux et préoccupé par la vie des citoyens de ce pays et quelqu'un qui fait appel à des mercenaires pour procéder à des tueries, à des exécutions, à des charniers dans son propre pays. Il ne faut pas se faire trop d'inquiétudes. C'est quelque chose qui sera savamment bien organisé et bien coordonné. Vous me permettrez de profiter pour dire un mot sur un autre sujet. Parce que j'entends ça et là dire que si Gbagbo quittait le pouvoir, ce sera le chaos en Côte d'Ivoire. Mais, le chaos est déjà là ! Gbagbo, c'est le chaos. Il s'agit de stopper le chaos. C'est ça ! Donc Gbagbo, c'est le chaos et il s'agit de stopper ce chaos. Je suis convaincu que si l'on stoppe le chaos, ce ne sera même pas la réjouissance du peuple de Côte d'Ivoire, mais du continent africain. Je rétorque pour dire que la Côte d'Ivoire c'est déjà le chaos. Si lui il croit encore que c'est la sérénité et la tranquillité, je dis, 200 morts, c'est le chaos. Nous sommes dans le chaos, il s'agit de stopper le chaos et de permettre au président élu de procéder à la réconciliation entre les filles et les fils de ce pays.

M. le Premier Ministre, les Ivoiriens ont besoin de savoir où nous allons-nous . Quelles sont les perspectives à court terme ? A quand la fin du cycle infernal dans lequel nous sommes plongés ?
Où allons-nous ? Comparaison n'étant pas raison, j'éviterai de prendre des exemples ça et là. Mais, le combat contre la dictature n'a jamais été un combat facile. L'histoire l'enseigne, ce type de combat nécessite abnégation, détermination et, quelquefois, sacrifices. C'est pourquoi je voudrais commencer par saluer les Ivoiriennes et les Ivoiriens qui ont souffert ces dernières semaines dans leurs chairs, dans leurs cœurs et dans leurs âmes, des tueries et des exécutions. Le Président de la République l'a fait. Nous profitons pour rendre hommage à toutes ces victimes et profitons pour souhaiter un prompt rétablissement aux blessés. Nous sommes engagés dans un combat. Le combat, il ne faut pas se leurrer, c'est de faire partir Gbagbo. Faire partir une dictature, ce n'est jamais de la sinécure. C'est pourquoi je veux demander aux Ivoiriens de s'armer d'abord moralement de patience, mais surtout de rester déterminés et d'avoir de la vraie abnégation. Comme je le dis, il nous faudra beaucoup plus pour déboulonner la dictature qui s'est incrustée en Côte d'Ivoire depuis 10 ans. Beaucoup avaient pensé que le Saint-Esprit l'aurait visité au lendemain des élections. Mais, déjà que le Saint-Esprit ne visite pas de grands guides religieux, ce n'est pas lui qu'il viendrait visiter. Donc, je demande aux Ivoiriens de s'armer de courage. Vous avez noté que nous avons suspendu le mot d'ordre pour quelques jours pour permettre aussi aux Ivoiriens de fêter dans la tranquillité cette fin d'année. Si nous pouvions, nous aurions épargné aux Ivoiriens toutes les difficultés, les misères et les souffrances que nous vivons en ce moment. Mais, nous n'avons pas le choix. Au nom de nos principes et des principes démocratiques, dans l'intérêt de nos familles, de nos enfants… nous sommes obligés de nous battre pour faire en sorte que la dictature parte. C'est à ça que je veux convier les Ivoiriens. L'histoire peut s'accélérer. On l'a vu dans certains pays, chez certains peuples. Mais, l'histoire ne s'accélère que par la capacité des peuples à résister et à se battre. Donc, c'est ce message que je veux lancer aux Ivoiriens. Je sais que ce n'est pas facile. Mais, en même temps, à vaincre sans périr on triomphe sans gloire. Il y aura plus de mérite pour le Président de la République et l'actuel gouvernement, bien qu'ayant été élu par le peuple de Côte d'Ivoire, de se donner les moyens d'avoir le pouvoir effectif. Et c'est ce à quoi nous sommes engagés.

Guillaume Soro (premier ministre) : “Quand M. Gbagbo est obligé de recruter des miliciens, c`est parce que son armée ne le soutient pas”

Mon intervention s'inscrit dans le droit fil du discours du Président de la République, qui, hier, s'est adressé aux Ivoiriens. Aujourd'hui, au nom du gouvernement de la République de Côte d'Ivoire, je voudrais m'adresser aux Ivoiriennes et aux Ivoiriens. L'objectif de cette conférence de presse, c'est, à la veille du 1er janvier de l'année 2011, de faire le point de l'action que le gouvernement a menée en quelques semaines ou, je dirai, en quelque 25 jours. Vous me permettrez seulement de rappeler que le second tour de l'élection s'est tenu le 28 novembre 2010. Election qui a vu la victoire du président Alassane Ouattara à un large score, soit plus de 54%.
Nous avions tous espéré que les institutions de notre République, dans la sincérité puissent travailler et donner des résultats conformes de cette élection. Je rappelle aux journalistes que moi-même j'ai été chargé de la conduite du processus de sortie de crise. J'ai été le maître d'ouvrage de l'organisation de cette élection. La Cei en étant le maître d'œuvre. Il avait été convenu que l'élection devrait se dérouler de façon démocratique. Et nous avons pris des dispositions pour que cette élection se déroule dans les meilleures conditions.
Au plan sécuritaire, c'est autour de 4.000 éléments des Forces de défense et de sécurité de Côte d'Ivoire qui ont été déployés. Je dis bien 4.000. Notamment, 2.500 policiers et gendarmes plus 1.500 Fanci (Forces armées nationales de Côte d'Ivoire) qui ont été déployés dans les régions du Nord. Ce qui fait autour de 4.000 hommes qui ont été déployés spécifiquement au Nord pour assurer la sécurité pendant le scrutin. Les rapports du CCI (Centre de Commandement Intégré) sont là. Ils sont clairs sur la question. Mais, mieux, pour garantir la transparence du scrutin, j'ai décidé, avec le président de la Commission électorale indépendante (Cei), de demander expressément aux observateurs internationaux, d'axer leurs efforts sur deux régions de la Côte d'Ivoire : Le Nord et les régions de l'Ouest. Donc, environ 2/3 des observateurs internationaux, je dis bien 2/3, ont été envoyés au Nord. Ce sont des mesures que nous avons prises en tant que maître d'ouvrage du processus pour assurer la transparence du scrutin. Evidemment, vous l'avez constaté, tous les observateurs ont salué le caractère démocratique de l'élection au Nord. C'est le premier élément qu'il faut relever.
La deuxième chose, c'est l'administration publique. Vous savez bien que le président de la République et le gouvernement sont représentés dans ces régions depuis 2007 qu'on a redéployé le corps préfectoral. Nous les avons expressément chargés de faire le suivi du déroulement du scrutin sur l'ensemble du scrutin. Les rapports sont sans appel : le scrutin a été démocratique et transparent au Nord. J'ai décidé pour toutes ces raisons, de mettre à la disposition de la presse, le rapport du CCI dirigé par le général Kouakou Nicolas. Il fait un rapport précis et succinct de tous les faits et évènements violents qui se sont déroulés sur l'ensemble du territoire ivoirien. Vous pouvez noter que, s'il y a bien eu violences, ces violences étaient principalement concentrées dans les régions de l'Ouest et du Sud-Ouest. C'est écrit noir sur blanc dans le rapport du CCI qu'il y a eu bel et bien empêchements de vote dans les régions de l'Ouest et du Sud-Ouest. Ce qui n'est pas le cas au Nord.
C'est pourquoi nous avons été choqués d'apprendre que le Conseil constitutionnel procédait à cette forfaiture. Certains se sont demandé pourquoi le Premier ministre a pris cette décision. C'est simple : Quand nous avons vu des généraux aller faire allégeance à Monsieur Laurent Gbagbo à sa résidence, non pas au palais, sans même qu'il ait prêté serment, à supposer qu'il ait gagné. Pour nous, c'était le coup de force. A partir de là, tout républicain et démocrate ne pouvait pas l'accepter. L'armée ne fait pas allégeance à un candidat à sa résidence. L'armée républicaine, celle qui se respecte, attend les formes pour faire allégeance. Si l'armée avait même été, à supposer, perturbée par les deux résultats différents de deux institutions de la Côte d'Ivoire, en avait appelé à la rescousse le maître d'ouvrage de l'élection, peut-être que nous aurions eu une autre posture. Mais, à partir du moment où on était dans le coup d'Etat, tous les démocrates, tous les républicains ne pouvaient pas hésiter à prendre leurs responsabilités. C'est ce que nous avons fait. C'est pourquoi, aujourd'hui, il est important qu'au nom du gouvernement, nous puissions donner un certain nombre d'informations aux journalistes.
Le Président Alassane Dramane Ouattara, dès qu'il a été élu, a mis en place, le 5 décembre, le gouvernement de mission que vous voyez.
Dès ce 5 décembre, le gouvernement a décidé de se mettre au travail pour faire en sorte que la mission qui nous a été confiée soit remplie. C'est donc dans cette démarche que nous avons décidé d'aller nous installer à la Primature et d'installer le Directeur général de la Rti. Etant entendu que malheureusement, la Radio télévision ivoirienne est utilisée à des fins de propagandes totalement inacceptables.
Evidemment, vous avez suivi la répression qui s'est abattue sur la Côte d'Ivoire. Le bilan est lourd. Des incitations à la haine, des exactions sur les populations, les viols de femmes, les violences et voies de faits, les exécutions extrajudiciaires et les assassinats, qui se chiffrent à ce jour à plus de 200 personnes assassinées. Plus de 1000 personnes blessées par balles.
La Côte d'Ivoire est aujourd'hui en état de guerre. Je pèse mes mots. Dans un pays, quand il y a plus de 100 morts, 200 morts, 19.000 réfugiés, le pays est en guerre. Et c'est ce que nous vivons.
Aujourd'hui, il s'agit de stopper la guerre en Côte d'Ivoire. Aussi, voudrais-je, ici, au nom du gouvernement, saluer le président de la République et lui présenter nos admirations pour le travail remarquable qui a été fait.
Le président de la République, dis-je, s'est aussitôt, avec son gouvernement, mis au travail. Au lendemain de l'élection, On peut considérer que du 29 novembre jusqu'au 5 décembre, Gbagbo avait plein pouvoir sur l'Etat de Côte d'Ivoire. Il avait les ambassadeurs, il avait les finances, il avait l'administration, il avait l'armée. A ce jour, qu'est-ce que nous constatons ?
Diplomatie
Au niveau de la diplomatie, c'est terminé ! Gbagbo n'a plus aucun pouvoir. Même pas de nomination d'un ambassadeur. Seuls les ambassadeurs nommés par M. Ouattara sont reconnus. Il (Ndlr, Gbagbo) a perdu le soutien de la Cedeao. Ce qui, vous pouvez l'imaginer, n'était pas forcément évident. Je peux vous dire que Charles Taylor (ex-président du Libéria), jusqu'à la veille de son départ pour le TPI (Tribunal Pénal International), continuait d'avoir un ambassadeur reconnu aux Nations Unies et continuait de siéger aux instances de la Cedeao. Nous étions, à l'époque, à Lomé pour des négociations.
Aujourd'hui, Gbagbo, au niveau de la Cedeao, a perdu tout soutien. Au niveau de l'Union Africaine, il a perdu aussi tout soutien. Au niveau de l'Union Européenne, il a également perdu tout soutien. Et au niveau des Nations unies, il n'a plus de soutien. Donc, on peut dire que le président Alassane Dramane Ouattara, du point de vue de la diplomatie, est bel et bien reconnu comme le président de la République de Côte d'Ivoire. Et, ce sont ses actes de signature qui font foi au niveau de l'Afrique, de l'Europe et du monde entier. Je vous signale que même l'Organisation de la conférence islamique (OCI ) a fait une déclaration de reconnaissance.
Finances
Au niveau des finances, comme je le disais, jusqu'au 5 décembre, il (Gbagbo, ndlr) avait ces finances. Mais, à ce jour, quelle est la situation. L'Uemoa (L'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine) ne reconnait que la signature de M. Alassane Dramane Ouattara. Le ministre de l'Economie et des Finances de son gouvernement (M. Diby Koffi Charles) a rencontré le gouverneur de la Bceao, (Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest) il y a 48 heures, lorsqu'il était en visite officielle à Dakar.
Le gouverneur de la Bceao, après la décision du conseil extraordinaire des ministres de l'Uemoa, a reconnu la signature du président Alassane Dramane Ouattara. Le gouverneur ne pouvait que s'incliner face à cette décision. Et, la prochaine réunion de la conférence des chefs d'Etat de l'Uemoa, c'est bel et bien le ministre du Président Alassane Dramane Ouattara qui y sera. Le président de la République a nommé un directeur général du Trésor et de la Comptabilité publique. C'est celui-là aussi qui est reconnu par la Bceao. Donc, nous avons la signature au niveau des finances.
Administration publique
Dans l'administration publique, avec le mot d'ordre de désobéissance civile que nous avons lancé, bien que le gouvernement soit ici au Golf et que la manœuvre n'est pas forcément aisée, l'administration publique a suivi le gouvernement d'Alassane Dramane Ouattara. Et ça, nous considérons que c'est un élément important. Vous avez vu que bien que le mot d'ordre a été lancé depuis cette salle, toute la Côte d'Ivoire a été paralysée. Ce qui montre bien le lien intact entre le gouvernement, son administration et ses populations.
L'Armée
Au niveau de l'armée, là aussi, on voit bien que tous les éléments d'information montrent bien que le président de la République a le soutien de la frange républicaine de notre armée. Les signes sont évidents et je vais vous les donner.
Quand M. Gbagbo est obligé de recruter des miliciens, c'est parce que son armée ne le soutient pas. Parce qu'une milice, ça ne se justifie pas dans une République. Mais, quand on est obligé de recourir à des miliciens, à des mercenaires, c'est parce que l'Armée refuse de faire des besognes inacceptables. Les Ivoiriennes et les Ivoiriens ont pu noter à des moments donnés des velléités de cette armée de faire le basculement.
Aujourd'hui, tout le monde le sait, au second tour, la troupe de nos forces de défense et de sécurité a voté à plus de 60% le candidat du RHDP. Ce qui montre bien que la réalité de la base des troupes ivoiriennes est nette. C'est sans hésitation. Evidemment, quand on est dans une logique de confiscation du pouvoir, quand on s'est attaché les services de mercenaires et de miliciens, la situation est délétère et difficile. Et surtout quand on a pris le soin de désarticuler notre armée. Parce qu'il faut que vous le sachiez, nous sommes dans un régime militaire où, justement, ce sont les généraux qui ont voix au chapitre. Ce qui ne saurait tarder. Car, on peut contrôler une partie de l'armée tout le temps. Mais, on ne peut pas contrôler toute l'armée tout le temps. Forcément, la dislocation au sein des Fanci est inévitable. Entre la frange républicaine des Fanci qui veut reconnaitre le président Alassane Dramane Ouattara et son gouvernement et la frange qui s'est alliée aux mercenaires.
Voici, Mesdames et Messieurs les journalistes, les quelques informations que nous voulions vous donner à la veille du 1er janvier 2011, et rassurer tout le monde que le gouvernement est au travail sans relâche pour faire en sorte que l'effectivité du pouvoir et des prérogatives du président de la République soient non seulement reconnus, mais qu'il puisse les exercer. Je peux vous dire que nous y travaillons. C'est un gouvernement de mission de 12 membres. Les ministres sont tous à votre disposition pour répondre à toutes les questions spécifiques que vous voudriez leur poser.
La mission de la Cedeao
Le porte-parole du gouvernement me rappelle que la mission de la Cedeao qui s'est rendue ici, vous le savez, est venue demander sans concessions à M. Gbagbo de céder pacifiquement le pouvoir. Cette mission a demandé au président Alassane Ouattara de donner des garanties pour que si M. Gbagbo quitte le pouvoir, il n'ait pas des ennuis. Le président de la République lui a donné un délai. Ce délai expire aujourd'hui (vendredi, Ndlr) 31 décembre. S'il quitte, d'ici minuit, le pouvoir, le président de la République tiendra ses engagements. Parce que c'est un homme de parole. C'est un homme d'honneur. Et il tiendra ses engagements. Si d'ici minuit, il ne quitte pas le pouvoir, évidemment, le président de la République sera au regret d'envisager d'autres mesures. En ce qui nous concerne, nous gouvernement, je le redis, nous sommes convaincus que seule la force fera partir M. Gbagbo du pouvoir. Parce que tous les dictateurs se ressemblent. Et tous les dictateurs ne négocient pas leur départ. On les fait partir. Pour nous, la question est claire. Mais, nous laissons la diplomatie faire son travail. Et quand le temps sera arrivé, chacun prendra ses responsabilités.
Je vous remercie.

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04/01/2011
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