REMEMBER ‘’13 SEPTEMBRE, JOURNEE DES HEROS NATIONAUX ET DES MARTYRS’’ : Le jour où Lamberton et Um Nyobe se sont rencontrés

CAMEROUN - REMEMBER ‘’13 SEPTEMBRE,  JOURNEE DES HEROS NATIONAUX ET DES MARTYRS’’ : Le jour où Lamberton et Um Nyobe se sont rencontrésRegardez la photo ci-dessous. Elle figure une des pages les plus tristes de l’Histoire du Cameroun. On y voit, pour la première fois, au premier plan, en culotte, en  ZOPAC dans la Sanaga maritime, le 13 Septembre 1958, le tristement célèbre Colonel Lamberton, celui de la formule connue de ‘’ Le Cameroun va vers l’indépendance avec un caillou dans la chaussure, les Bamilékés…’’  A ses pieds gît le corps de Ruben UM NYOBE, symbole et héros de la lutte nationaliste, abattu sans sommation et dans le dos ce jour là dans la forêt de Boumyebel. Lamberton finira sa carrière militaire  avec le grade de Général de Division, une manière de la France de le ‘’ récompenser ’’. Um Nyobe quant à lui recevra pour sépulcre un bloc de béton dans lequel son corps sera coulé dans une tombe,  au cimetière protestant d’Eseka. Presque oublié par le peuple, il est ignoré, comme ses compagnons, par le régime installé à la tête du pays depuis 1960, sans rue, sans place, dédiées à sa mémoire….
 
Cette photo m’a été communiquée il ya quelques années par un Officier Général de l’armée camerounaise de mes connaissances.  J’ai attendu ce jour pour la partager avec le public.

Et pourquoi ce jour ?
Pour  éveiller à la conscience patriotique et convoquer au devoir de mémoire le peuple camerounais. Car ce ne sera qu’en reprenant le flambeau de nos martyrs que nous défierons et romprons avec l’esprit répressif de la gouvernance publique héritée de la colonisation pour  fonder les bases autant éthiques et morales que politiques et économiques dont notre pays a tant besoin, pour trouver le chemin et de la réconciliation avec lui-même,  et de sa  prospérité .

Le peuple camerounais semblait accepter, dans une attitude proche d’un viol avec consentement, que soit mutilée son histoire et effacée la mémoire de ses héros et martyrs morts pour notre liberté,  par ceux la même  qui y étaient opposés, mais entre les mains desquelles, par une imposture historique, un pseudo ‘’ indépendance’’ sera remise le 1er janvier  1960 ? Ceux là pourtant, non seulement ont  continué l’ extermination des Nationalistes, avec Moumie empoisonné en 1962  à Genève, Ossende Afana mitraillé avant d’ être décapité en 1969 à Moloundou, Ernest Ouandie exécuté sur la place publique en 1971 à Bafoussam, mais aussi perpétuent l’ oppression des Camerounais telle que vécue aujourd’ hui, par les brutalités des hommes en tenues, les entraves administratives et diktats des sous-préfets, les règlements de compte judiciaires,  pour leur empêcher  l’ exercice  de leurs droits politiques et humains.

En Septembre 2011, pour pallier cette grave anomalie, avec un groupe de Patriotes,  nous avons  pris l’initiative citoyenne de consacrer la journée du ‘’13 Septembre, Journée des Héros Nationaux et des Martyrs’’ du Cameroun. A cette occasion, une Proclamation Solennelle inspirée par les recommandations des uns et des autres a été rendue publique et un ‘’Comité du 13 Septembre’’ dont le Secrétaire Permanent est le Pr Franklin Nyamsi, Agrégé de Philosophie, a été mis en place.

Cette date qui correspond à la date anniversaire de l’assassinat de Ruben Um Nyobe veut  rappeler au souvenir de tous les Camerounais que des compatriotes qui s’opposaient à l’asservissement de nos populations depuis la  colonisation allemande et française jusqu’ au présent régime,   ont sacrifié  leur vie, alors qu’ils étaient jeunes ou  pour certains,  dans la force de l’âge. Il était  en effet inconséquent de continuer d’attendre de ceux là qui, installés dans  la logique d’ une continuité colonialiste- néocolonialiste qui prive le peuple camerounais de ses droits humains, civiques, politiques , et économiques de base,  qu’ils prennent l’initiative de célébrer  la mémoire de ceux qu’ils ont massacrés, torturés, présentés comme des criminels alors que  leur seul crime était d’ avoir rêvé d’ un Cameroun profitant aux Camerounais.

La proclamation du ‘’13 Septembre, Journée des Héros Nationaux et des Martyrs’’  et sa célébration  sont  donc un acte d’émancipation patriotique. Elles signent une volonté d’appropriation de notre Histoire et sont autant de pierres à l’édification du ‘’Panthéon Mémoriel’’ que nous rêvons de voir  un jour être érigé en temple  dédié à la mémoire de   ceux là qui, par leur combat et le sacrifice de leur vie, ont fondé  la Nation Camerounaise.

Bâtir ce ‘’Panthéon Mémoriel’’ est une œuvre ardue, tant sont profonds les effets du lavage de cerveau dont les Camerounais  ont été victimes depuis des décennies.

Guerre Révolutionnaire

Le lavage de cerveau des Camerounais s’est opéré par la combinaison d’une répression  politique et militaire  sanglante et d’une guerre psychologique féroce dont les methodes ont été théorisée par le Colonel Lacheroy dans la doctrine de la Guerre Révolutionnaire  - en fait la guerre contre-insurrectionnelle-   élaborée après la défaite militaire de la France en Indochine. Ses champs d’ expérimentation  ont  par la suite été l’ Algérie, où  la France coloniale a été à nouveau défaite, et… le Cameroun, où par contre,  elle a remporté une  victoire militaro-politique qui lui a permis d’ installer au pouvoir  le  régime néocolonial en place depuis ‘’ l’ indépendance’’. C’est ainsi qu’en plus de leur extermination physique systématique, la propagande coloniale a accolé aux combattants nationalistes le label infamant de ‘’ terroristes et maquisards’’ compris comme ‘’criminels’’, une perception ancrée dans l’esprit du petit peuple depuis lors. C’ est cette distorsion cognitive qui servira  à justifier les atrocités commises par les  méthodes de la terreur dite contre-insurrectionnelle,  traumatisant et prostrant de larges fractions du  peuple camerounais refugié depuis lors dans une passivité surprenante,  en comparaison aux sursauts des peuples d’ autres pays d’ Afrique qu’ on a vu se lever massivement et se  débarrasser de leurs dictateurs.

LE COLONEL LAMBERTON A DROITE EN CULOTTE EN ZOPAC EN 1958 AVEC A SES PIEDS LE CORPS DE RUBEN UM NYOBE
CAMEROUN - REMEMBER ‘’13 SEPTEMBRE,  JOURNEE DES HEROS NATIONAUX ET DES MARTYRS’’ : Le jour où Lamberton et Um Nyobe se sont rencontrés

Quiconque se donne la peine de visiter mentalement les catacombes du martyrologue camerounais découvrira un grand nombre de tombes abandonnées, oubliées, alors même qu’elles attestent de ce que peu de peuples au monde ont payé un prix aussi élevé en vies pour leur liberté et une réelle indépendance de leur pays. En voici quelques exemples pris dans la Proclamation Solennelle du ''13 Septembre, Journée des Héros Nationaux et des Martyrs'', et qui devrait être – et sera un jour – enseigné dans les écoles du Cameroun : 

• Le Chef Bakweri KUVA LIKENYE, après avoir défait les Allemands en 1891 au cours de la bataille de NAMONGUE (Buea) au cours de laquelle le Commandant Karl Freiher Gravenreuth est tué, il meurt au village de Wonya Mokumba en 1894 ;
• OMGBA BISSOGO, Chef des Mvog Ottou,  décapité par les Allemands à Yaoundé en 1895 au lieu dit Etoa Meki ;
• Le Lamido d'Agorma, le Djaouro de Bamé, le Djaouro de Oubao, le Yérima de Lagdo, le Lamido de Béngui, l‘Ardo de Déngui,  pendus le 30 Juillet 1907 par les Allemands à Garoua ;
• King Rudolph DOUALA MANGA BELL, pendu à Douala le 08 Août 1914  par les Allemands  en compagnie de son Secrétaire Ngosso Din;
• Martin Paul SAMBA, fusillé sur la place publique  à Ebolowa par les Allemands le 8 Août 1914 ;
• Le Chef Batanga  MADOLA, pendu à Kribi par les Allemands le 8 Aout 1914 ;
• Karnou, qui a dirigé la révolte lors de la guerre du Kongo-Wara contre les Français entre 1928 et 1932 dans la région de Meiganga, Garoua-Boulaï; 
• Ruben UM NYOBE, Dr. Félix Moumié, Dr. Castor  Ossende Afana, Ernest Ouandie, dirigeants Upecistes  assassinés;
• AUGUSTIN NGOM JUA, ancien Premier Ministre du Southern Cameroons, mort ‘’mystérieusement’’ en 1977 ;
• Dr. Marcel BEBEY EYIDI, nationaliste de la première heure, mort ‘’mystérieusement’’  en 1966.
• Monseigneur Albert NDOGMO, condamné à mort, exilé, mort en 1995 au Canada ;
• Le Chef MBILONGO à Nomo de Nlongbon par Monatélé, déporté à Mentum pour avoir refusé le bourrage des urnes aux élections de 1962. Au moment de son arrestation, il chargera  le Sous- Préfet  Bengono de dire à Ahidjo qu’il reviendrait mourir dans son village, mais que lui, Ahidjo ne mourra pas au Cameroun. Il sera ramené dans son village pour mourir en 1972  et... l’Histoire dira la suite ;
• Albert WOMAH MUKONG, intrépide activiste des Droits de l’Homme, mort à Bamenda le 13 Juillet 2004 ; 
• Jacques TIWA, nationaliste assassiné le 27 février 2008 à Douala, par la soldatesque du régime du Renouveau.
Nous ne saurions oublier, ni les centaines de Mvog Ottou d’ Omgba Bissogo de Mvog Betsi-Yaoundé massacrés  par les Allemands en 1895, ni les  300, 000 victimes des massacres des militants Upecistes perpétrés entre 1955 et 1965 dans le Wouri, la Sanaga Maritime et le Bamiléké,  ni les déportations massives des Eton  et Mvele en 1962  accusés d’ être des ‘’ démocrates’’ dans les camps de concentration de Mentum et Yoko  d’ où un grand nombre  ne sont pas revenus, ni les citoyens assassinés dans les années 90 dans la lutte pour le multipartisme et la démocratie, ni  les 139 morts  des émeutes contre la modification de la Constitution en février-mars 2008.

MUSOMO versus AFABISME
Tout ce sang versé trace une ligne qui définit  le véritable clivage du  champ politique camerounais, lequel comporte ainsi substantiellement deux pôles, les centaines de partis politiques enregistrés ne constituant qu’une ‘’ridicule farce à la camerounaise’’.
 
Ces deux pôles sont :
D’ un coté,  le pôle de ceux qui se situent dans la logique d’une continuité historique de  l’oppression  du peuple camerounais.  Ce sont les adeptes de ‘’ l’AFABisme’’, avec A pour Ahidjo, F pour Foccart, A pour Aujoulat, B pour Biya.  C’est le parti colonialiste et de ses survivances néo-colonialistes que sont l’UNC et le RDPC. Il se reconnait par ses methodes : fraudes électorales, étouffement de la Démocratie, repression barbare des citoyens,  justice aux ordres. Il est animé par des hommes au profil-type : fonctionnaires sans légitimité organisés en coterie maffieuse scellée par des pratiques douteuses héritées … d’Aujoulat, pour ne pas en dire plus.
D’un autre coté,  le pôle de ceux qui ont du Cameroun la vision d’ une Nation née du sang des martyrs qui a fondé  notre Nation, ceux qui rêvent d’ un Cameroun  maitre de son destin et dont les richesses profitent à ses populations, un pays où l’ expression démocratique des citoyens est sacrée et où la légitimité est  le principe fondateur de la détention du pouvoir  ; ce sont les adeptes de ‘’ MUSOMO’’, avec M pour Manga Bell, U pour Um Nyobe, S pour Samba, O pour Ouandie, M pour Moumie et O pour Ossende. Ils sont le ‘’Peuple Camerounais’’, à qui, depuis la nuit des temps,  la jouissance des  droits civiques, citoyens, politiques et économiques  légitimes est refusée.

Aggiornamento
La commémoration du ‘’13 Septembre’’ invite à un moment de réflexion tous ceux qui se reconnaissent  du pôle MUSOMO ,  afin qu’ ils sachent que,  même si les colonialistes et leurs suppôts de l’ AFABISME ont ‘’gagné une bataille’’ au début des années 60,  les patriotes nationalistes  qu’ ils sont constituent  la grande majorité du Peuple Camerounais. Ils   peuvent, par une mobilisation massive, ‘’gagner la guerre’’ de rendre  le Cameroun à son  ayant-droit légitime, le peuple camerounais,   pour que  le rêve de tous ceux là qui se sont sacrifiés pour notre pays deviennent  enfin réalité.

Les tentatives de rassemblement des différentes tendances de l’UPC faites par le Combattant Woungly, grand patriote s’il en reste un, sont un geste dans la bonne direction. Mais, ce serait sous la voilure plus large du  mouvement MUSOMO, l’ UPC traditionnelle dont la légitimité historique ne saurait être niée en étant un des courants, dans un esprit  d’inclusion,   accueillant  les citoyens,  organisations de la société civile ou regroupements de partis politiques qui se reconnaissent dans un idéal patriotique nationaliste, avec une pensée et des methodes modernisées  et ouvertes au monde, franc de tout reflexe d’ ‘’exclusivisme historique ou ethno-régionaliste’’,  qu’une victoire peut être entrevue. L’organisation de cet aggiornamento qui triompherait des egos exaltés et qui s’impose pour des raisons à la fois politiques et stratégiques, est une mission sacrée pour ceux qui aiment le Cameroun et refusent d’entériner la défaite infligée  aux aspirations du peuple camerounais dans les années 60.

La dynamique MUSOMO  ouvrira ainsi la deuxième phase de la confrontation politique appelée cette fois à être  victorieuse contre l’AFABISME. Instruits et tirant les leçons  des  erreurs politiques et stratégiques d’avant-hier,   des tentatives avortées de coalition d’ hier, s’appuyant sur la mobilisation du peuple, arme irrésistible contre les dictatures, ceux qui, comme moi, partagent  la vision d’un Cameroun, terre de démocratie  et de prospérité, serviront  les aspirations des Camerounais, pour la  matérialisation du rêve qui  a valu à  nos héros et martyrs,  le sacrifice de leurs vies. Afin que leur sacrifice n’aie pas été en vain.

Célestin Bedzigui
Comité du ‘’13 Septembre’’
Senior Fellow, Free Kameroun Foundation
New York, Septembre 2012

© Correspondance Via Le Messager : Célestin Bedzigui


13/09/2012
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