Réforme: Le budget programme dans tous ses états - Perspective: 25% du budget 2013 pour les salaires des fonctionnaires

Yaoundé, 21 Novembre 2012
© Parfait N. Siki | Repères

Les multiples formations reçues par les députés sur la nouvelle forme du budget ne leur servent pas encore. Plus d'une semaine après le début de la session qui lui est consacrée, le projet de loi de finances se fait attendre. Mais déjà le gouvernement s'exprime sur sa nouveauté : le budget programme. Prévu dans le régime financier de l'Etat, constitution financière du Cameroun, adoptée en 2007, le budget programme est totalement mis en œuvre pour la première fois au cours de l'année 2013. C'est une réforme fondamentale destiné à changer la manière de dépenser l'argent public qui est créditée d'une forte dose d'efficacité. En dehors d'expliquer que le budget programme est

1-QU'EST-CE QU'UN BUDGET PROGRAMME

Techniquement, c'est un outil de gestion des finances publiques consistant à élaborer, présenter et exécuter la loi des finances sur la base de programmes. Ainsi le gouvernement n'entend plus dépenser le budget de l'Etat comme une sorte de gâteau national que se partagent les ministères, mais veut apporter des réponses à des problèmes liés aux besoins des populations clairement identifiés sur le terrain. C'est la formulation claire et précise de ce problème, le but poursuivi en le résolvant, les indicateurs de suivi et les moyens à dégager pour sa résolution qu'on appelle programme. Le budget est donc l'ensemble des programmes ainsi arrêtés. La comparaison avec l'ancien système permet en effet de mieux dégager la fenêtre de compréhension du budget programmé.

Le gouvernement explique que le budget programme organise les choix budgétaires autour des politiques publiques, compare les coûts et les résultats des programmes et n'en retient que les plus efficace par rapport aux priorités. Un programme ne vaut donc que par sa capacité à résorber un déficit, accroître des capacités, réduire un fléau, approvisionner en biens, etc. Vu sous cet angle, le budget est l'étape finale qui passe par la prospective (Vision stratégique 25 ans), la planification (DSCE 10 ans) et la programmation (3 ans), avant la budgétisation (un an).


2-LA DIFFÉRENCE ENTRE LE BUDGET PROGRAMME ET L'ANCIEN BUDGET

La limitation des engagements budgétaires sur l'année est remplacée par une programmation pluriannuelle, un programme pouvant s'inscrire sur trois ans, même s'il est décliné en annualité.

Jusqu'en 2012, l'Etat dotait les administrations des moyens en fonction de leurs besoins. C'est pour cette raison qu'on l'appelle budget des moyens et qu'on nomme budget programme budget des résultats. La différence se situe dans la finalité des dépenses: avant on jugeait un gestionnaire sur la régularité de la dépense, qu'elle ait permis de résoudre un problème ou non ; alors que désormais le même gestionnaire est noté sur les résultats atteints avec les moyens reçus, ce qui présuppose que les fonds sont allés au bon endroit. Cette nouvelle donne améliore les renseignements sur la dépense.


A travers les présentations ci-dessous, la différence d'approche et de suivi de la qualité de la dépense apparaît nettement.


3-EXEMPLES D'AILLEURS

Le budget programme est en vigueur dans six pays africains : l'Afrique du Sud, le Mali, la Tunisie, l’île Maurice, le Maroc et le Gabon. Les pays de l'OCDE (USA, France, Nouvelle-Zélande, etc.) ont mis en place une budgétisation par la performance ou budget programme depuis deux décennies. Aux Etats-Unis, le budget programme est introduit à travers le «Planning; programming and budgeting system» (PPBS), dès 1960. Dix ans après, la France adopte la Rationalisation des choix budgétaires (RCB) et institutionnalise le budget programme par une loi organique en 2001. Ce n'est que dans les années 80 que le budget programme se répand dans les autres pays développes et dès 2000 dans ceux d'Europe de l'Est, d'Amérique latine et d'Asie.

Dans tous ces pays, les résultats en termes de définition des priorités et de leur déclinaison budgétaire en compte des politiques publiques.

Un processus dont le Cameroun a échappé, lui qui connaît son premier régime financier en 1962. A cette époque, le ministre des Finances était le seul et unique ordonnateur du budget de l'Etat. En 1967, un décret aménage la législation financière de la République fédérale du Cameroun avec l'introduction des bons d'engagement et de commande. Les ministres et les responsables des services déconcentrés de l'Etat peuvent ordonnancer. Ce régime a prospéré jusqu'à la réforme de décembre 2007, elle-même le fruit de près de dix ans de réforme générale du système en place.

Parfait N. Siki



PERSPECTIVE: 25% du budget 2013 pour les salaires des fonctionnaires

Avec une enveloppe budgétaire désormais prévue à 3.236 milliards, le projet de loi de finances. 2013 est un douloureux arbitrage entre les ambitions d'investissement et les gros besoins de fonctionnement de l'Etat.

C’est bien la somme de 3236 milliards qui a été présentée par les autorités à la mission d'évaluation du FMI en séjour au Cameroun comme projet de budget de l'Etat pour l'année 2013. L'année en cours, le budget de l'Etat est de 2. 800 milliards, soit une augmentation de 15,6%. 1.957 milliards viendront des impôts et taxes, des recettes douanières et des recettes non fiscales. Une pression est mise sur la rubrique «impôts et taxes», dont le gouvernement attend 50 milliards de recettes supplémentaires au-delà de l'augmentation normale liée à la progression du PIB non pétrolier (8,2%). Les recettes pétrolières s'élèveront à 705 milliards, dont 533 milliards pour la seule redevance à verser par la SNH. Il est prévu, dans les autres recettes, les émissions des titres publics à hauteur de 250 milliards de francs CFA.

Plus d'une semaine après l'ouverture de la session parlementaire consacrée à son examen, le projet de loi de finances n'est toujours pas parvenu aux élus de la nation. Le gouvernement étrenne pourtant le budget-programme, qui est un changement de fond dans la manière de dépenser l'argent public. Axé sur une recherche de résultats, le budget-programme ne pourra pas résoudre l'équation complexe des dépenses de personnel, avec une masse salariale prévue en 2013 pour absorber le quart des dépenses totales de l'Etat, soit 801 milliards. La question est d'autant plus préoccupante que le niveau des salaires des agents publics est considéré comme relativement bas, alors que la masse salariale est très élevée. Elle progresse paradoxalement chaque année, indépendamment de nouveaux recrutements ou d'une revalorisation des rémunérations, dont la dernière date de mars 2008.

La masse salariale est passée de 414,5 milliards en 2005 à 684,5 milliards en 2011, soit une hausse de 65%, alors que le PIB n'augmentait que de 43%. Les recommandations internationales admises fixent le niveau de la masse salariale de l'Etat à 5% du PIB ; le Cameroun dépasse ce seuil d'un demi-point. Les différents ministres des Finances ont proclamé leur ferme volonté de réduire ce coût du personnel mais n'ont réussi qu'à l'augmenter. Toutes les initiatives prises pour l'assainissement du fichier soldé n'ont produit qu'un répit provisoire. Au fil des ans, la masse salariale va devenir une préoccupation. Comme les pensions.

La gestion du régime des retraites est un vrai casse-tête, même s'il ne souffre pour le moment d'aucun problème de financement Dans le rapport sur l'économie camerounaise, on peut lire qu'«en 2011, les cotisations pour la retraites se sont élevées à 35,1 milliards. Pendant le mérite exercice, l'Est a versé 137,5 milliards au titre des pensions.» La différence est énorme 102,4 milliards, que I ’Etat va chercher dans les impôts et taxes. Dans ce cas aussi, aucune opération d'assainissement n'a été décisive alors que des «morts» continuent à toucher leur retraite.

Mais le ton général du budget 2013 est optimiste. Avec 6,1% dé taux de croissance du PIB - soit un point de plus que l'année en cours -, le Cameroun retrouve là un niveau de progression qu'il n'avait plus jamais atteint depuis 1986. Le pays espère en effet réaliser un produit intérieur brut de 14.589 milliards de francs l'année prochaine, contre 13.488 milliards cette année. Les excitants de cette croissance, si l'on en croit le rapport sur les perspectives économiques prépare par la direction des Affaires économiques du Minfi, sont l'agriculture en plein réveil, la mise en œuvre des grands projets d'infrastructures et le dynamisme des agro-industries, des banques, des communications et des transports. Le secteur pétrolier rebondit après deux années moroses : la production repart à la hausse avec la découverte de nouveaux pétroliers. La mise en service de la centrale à gaz de Kribi, au Premier trimestre 2013, avec ses 216 MW sera un coup de pouce supplémentaire.

Parfait N. Siki



25/11/2012
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