Refonte des listes électorales: A l'épreuve de la biométrie - Mohaman Sani Tanimou, Directeur Général des Elections: «Inscrire au moins 7 millions d'électeurs»

YAOUNDÉ - 01 Octobre 2012
© Cameroon Tribune

C’est cette semaine, plus exactement ce mercredi, que les inscriptions sur les listes électorales commencent. Le calendrier va alors afficher le 3 octobre 2012. Le Cameroun va utiliser la biométrie pour la première fois afin de constituer un fichier électoral. Elections Cameroon (Elecam), après un premier test lors de l'élection présidentielle de 2011, se trouve là face à un nouveau challenge. Inscrire de nouveaux électeurs pour les échéances électorales attendues. Déjà, pour mieux roder la machine, la loi portant Code électoral a apporté son lot d'ajustements. Elecam a vu sa place confortée dans le nouveau système électoral. Les mandats des députés et des conseillers municipaux ont également connu une prorogation pour donner du temps à l'organisme indépendant chargé de l'organisation, de la gestion et de la supervision de l'ensemble du processus électoral et référendaire.

Avec la sélection de l'opérateur allemand, Giesecke & Devrient, les kits électoraux ont fait leur apparition dans le jargon politique du Camerounais moyen. Et en signant, jeudi dernier, la décision qui ordonne la refonte des listes électorales, le directeur général des Elections, Mohaman Sani Tanimou, s'est voulu pédagogue. Dans l'article 3 de ce texte, il revient, en effet, sur le contenu de la technologie biométrique que les Camerounais utiliseront dans les prochains mois. On apprend ainsi que les kits d’inscriptions sont constitués chacun d’une valise étanche. Elle comprend un micro-ordinateur, une caméra photo, un scanner d'empreintes digitales et une imprimante de récépissés d'inscription. Les procédés de traitement des données électorales, constitués notamment du système «Automated Finger print Identification System» (ANS), nécessaire pour la recherche des doublons et de systèmes d'impression des cartes d'électeur et des cartes d'électeur et des listes électorales, font partie de cette technologie.

En un mot comme en mille, les habitudes vont changer au Cameroun en matière d'inscriptions sur les listes électorales et il est temps que tout le monde s'en accommode. D'abord, les partis politiques qui devront sensibiliser leurs militants à se rendre massivement auprès des antennes communales d'Elections Cameroon ou à suivre attentivement le calendrier de descente des équipes mobiles sur le terrain. Ensuite, selon la loi portant Code électoral, «Est électeur, toute personne de nationalité camerounaise, sans distinction de sexe, âgée de vingt (20 ans) révolus, inscrite sur une liste électorale et ne se trouvant dans aucun cas d'incapacité prévue par la loi.». Il ne s'agit pas seulement de se sentir concerné. Il est aussi question de se conformer aux exigences de la refonte biométrique des listes électorales.

Ceux qui voudront choisir, le moment venu, leurs conseillers municipaux ou leurs députés doivent dès à présent savoir qu'avec la biométrie, tout commence par la carte nationale d'identité informatisée ou le récépissé dé ladite carte. Le reste de l'inscription sur les listes électorales est conditionné par ce préalable. Il est donc encore temps pour que les partis politiques et la société civile sensibilisent les citoyens sur la nécessité d'obtenir, le plus tôt possible, sa carte nationale d'identité. Mais de leur rappeler que l'inscription est physique.

Si ces conditions sont remplies, on appréciera les efforts déployés jusque-là par ELECAM. L'opération de refonte des listes électorales va commencer pour l'instant dans les chefs lieux de région avec les 250 kits électoraux disponibles en ce moment au Cameroun. Dans les antennes communales de l'arrière-pays, pendant ce temps, la formation des personnels à la manipulation de la technologie biométrique va s'intensifier jusqu'à la livraison des derniers kits à la mi-octobre. Tout en poursuivant ces ajustements internes, ELECAM se donne jusqu'au 28 février 2013, un objectif de sept à huit millions d'électeurs inscrits. Les prévisions actuelles montrent que 50 électeurs peuvent être inscrits par jour, 50 000 en une semaine et 1 500 000 par mois. Toutes ces dispositions sont prises, apprend-on du côté d'Elecam, pour la mise en place, au Cameroun, d'un fichier électoral fiable et transparent. Nul doute que ce message sera communiqué aux partis politiques et autres acteurs de la société civile que le président du Conseil électoral d'Elections Cameroon rencontre demain, au palais des Congrès.

Armand Essogo


Mohaman Sani Tanimou, Directeur Général des Elections: «Inscrire au moins 7 millions d'électeurs»

Concrètement, nous disposons de 250 kits électoraux. 50 d'entre eux servent uniquement à la formation du personnel. Les 200 autres seront utilisés dans les chefs-lieux de région.


Les opérations de refonte des listes électorales vont commencer au niveau des chefs-lieux de région. Pourquoi cette option?

C'est juste une question pratique. Il faut retenir que ces chefs-lieux de région représentent 45% de l'électorat. C'est dans ces chefs-lieux de région que nous pensons que l'opération devra durer entre cinq et six mois. Il est donc bon pour nous que nous y commencions. La seconde raison de ce choix tient au fait que le personnel des antennes communales des zones rurales est encore en formation. Celle-ci n'est pas achevée à ce niveau. Elle prendra fin avant le 20 octobre 2012. Le personnel chargé des inscriptions au niveau des régions est formé depuis et il est donc suffisamment prêt pour commencer cette opération mercredi prochain.


A quelle fréquence va se faire l'extension de l'opération dans le reste du pays?

Il n'y a pas de fréquence en tant que tel. Une fois que la formation sera achevée, nous allons étendre l'opération. Nous pensons que d'ici le 20 octobre au plus tard, tout le personnel concerné sera apte à l'utilisation des kits électoraux et les inscriptions seront lancées dans les communes restantes.


Elecam dispose aujourd'hui de combien de kits électoraux pour le lancement de la refonte biométrique des listes électorales?

Concrètement, nous disposons de 250 kits électoraux. 50 d'entre eux servent uniquement à la formation du personnel. Les 200 autres seront utilisés dans les chefs-lieux de région. Avant le 20 octobre 2012, les kits restants vont être livrés. Au fur et à mesure qu'ils arrivent, ils passent par noie centre informatique où ils subissent une dernière configuration et ils vont ensuite sur le terrain.


Quel est l'objectif visé par Election’s Cameroon au cours de cette refonte des listes électorales?

En termes d'objectifs, nous en avons plusieurs. Mais le plus important, à notre avis, est l'élaboration d'un fichier électoral fiable et transparent. Pour ce faire, nous voulons inscrire au moins les 7 millions d'électeurs qui ont pris part à la dernière élection présidentielle. Si nous pouvons faire 75 ou 8 millions; ce n'est pas négligeable. Mais il faut déjà que nous ayions les 7 millions de la dernière élection. Sur la façon de procéder, nous avons assigné à nos collaborateurs sur le terrain, à travers une circulaire; l'inscription, par jour et par kit électoral, de 50 électeurs. En mettant à leur disposition un minimum de 1 000 kits, nous pensons obtenir par jour 50 000 inscrits. Si dans le mois le mécanisme fonctionne bien, mus espérons avoir 1,5 million d'inscrits sur cette période. Si nous prenons la décision qui a été signée, nous avons cinq mois pour mener l'opération. Ce qui fait une moyenne de 7,5 millions de personnes que nous pouvons inscrire en cinq mois. Même si nous n'atteignons pas exactement ce chiffre-là, nous sommes certains d'avoir un résultat respectable.


Les Camerounais résidant à l'étranger sont-ils concernés par l'opération qui démarre le 3 octobre prochain?

Les Camerounais résidant à l'étranger seront dans le fichier. Toutefois, le processus de refonte pour les Camerounais établis où résidant à l'étranger sera décalé pour des raisons d'ordre pratique et juridique. Les raisons pratiques tiennent au fait que le processus doit être bien maîtrisé ici au pays avant de le lancer à l'extérieur. Pour l'aspect juridique, le Code électoral renvoie à un texte particulier, la composition des commissions auprès des ambassades. Ces commissions ne sont pas encore composées et il n'est pas encore passible d'envoyer des gens procéder aux inscriptions alors que les modalités pratiques ne sont pas encore connues.


Avez-vous le sentiment aujourd'hui que les Camerounais sont suffisamment informés en ce qui concerne le processus à la suite de la campagne de communication lancée par Elecam?

Ce n'est pas aujourd'hui que les électeurs attendent la biométrie. Ils sont suffisamment informés sur le sujet. Nous nous sommes d'ailleurs déployés à travers une campagne d'affichage. Les affiches sont assez explicatives. Elles indiquent ce qu'est la biométrie. Nous excipons la carte nationale d'identité pour que l'électeur comprenne qu'il faudra disposer de cette pièce au moment de l'inscription, ou alors au moins du récépissé de demande de ladite carte. Nous allons continuer notre communication en passant à la phase qui les invite à venir s'inscrire. Nous diffusons parfois nos messages dans les langues locales pour mieux les faire passer. Nous faisons pour cela appel à des partenaires extérieurs pour nous accompagner dans cette démarche.


Il y a eu dans le passé des problèmes liés aux inscriptions multiples. Qu'est-ce qui est fait pour garantir toute la transparence nécessaire dans le processus qui démarre?

Le processus électoral rentre dans une phase moderne. La biométrie, c'est l'informatique. S'agissant des cas de fraude, dans la décision qui a été signée, j'ai rappelé les dispositions de l'article 122 du Code pénal, parce que celui-ci sanctionne les fraudes électorales notamment les inscriptions multiples. Dans notre mécanisme, il n'y a pas de système parfait. Nous ne pouvons pas dire qu'il n'y aura pas de défaillance, mais nous pouvons dire qu'il n'y en aura plus comme par le passé parce que les empreintes digitales vont nous aider à rechercher très facilement les doublons. Les visages peuvent se ressembler, mais ce n'est pas le cas avec les empreintes. Nous avons le système AFIS (Automated Finger print Indentification System NDLR) qui permet de traquer les doublons. Ce que nous allons faire lorsque nous aurons répété des cas de doublons là, nous solliciterons sans doute l'appui des médias à ce sujet, c'est de publier la liste de ceux qui ont voulu s'inscrire frauduleusement afin que l'opinion le sache. Mais nous pouvons nous assurer que ce sera très difficile pour ceux qui essaieront de tricher. Que ce soit dans la mime commune ou dans une autre. Pour ceux qui sont dans les cas d'affectation et qui changent de commune, on leur demande d'obtenir un certificat de radiation ou de non inscription dans l'ancienne commune. C'est le chef d'antenne communale qui délivre ce document. Si l'électeur ne suit pas cette démarche, la machine va s'en occupes et il sera répété. Des copies de ces fraudeurs seront publiées dans la presse, sur notre site Interner et l'une d'elle sera remise au Procureur de la République qui va diligenter des poursuites sur la base de l'article 22 du Code pénal.


Qu'est-ce que les partis politiques sont en droit d'attendre d'Elecam dans le cadre des opérations annoncées?

La concertation qui se tient mardi prochain (demain NDLR) portera essentiellement sur la sensibilisation des autres acteurs du processus électoral pour qu'ils s'impliquent davantage dans les opérations de refonte des listes électorales. Pour ce qui est de leur participation au sein des commissions mixtes, je peux dire aujourd'hui que des moyens subséquents ont été dégagés en leur faveur. Mais il ne s'agit pas d'un salaire, mais comme dit la loi, ce sont des commodités de travail. Elles concernent les membres présents. Ils recevront à la fin du mois une compensation pour leur transport et leur restauration. Lors de la dernière élection présidentielle, nous avions identifié plus de 5 000 membres dans les commissions. Pour cette phase qui commence, nous en attendons environ 7 000. Cela va coûter cher. Le montant qui va leur être versé a été revu à la hausse par rapport à la dernière élection.


Dès mercredi prochain, Elecam commence-t-il seul les opérations ou alors c'est avec les autres acteurs?

La loi est claire. Le fichier électoral est établi par Elections Cameroon. Les membres des Commissions n'inscrivent pas. Ils viendront assister et s'assurer que le travail se fait normalement et dans le respect de la loi. Ils ne touchent pas aux appareils. A la fin du processus, ils vont valider les listes.


L’inscription avec le récépissé ne posera-t-il pas le problème de la tentative de nouvelle inscription après le retrait de la CNI?

Dans la décision qui fixe les modalités du déroulement de la refonte, nous indiquons que l'électeur qui veut s'inscrire doit se munir de la cane nationale d'identité ou du récépissé de demande de ladite pièce. Ceci pour une raison simple. Les phases de l'inscription, telles que déroulées dans la décision se suivent. Vous ne pouvez pas passer à une étape sans avoir validé la précédente. La première étape de l'inscription, c'est l'enregistrement du numéro de la carte nationale d'identité. Tant que le kit n'a pas enregistré ce numéro, il ne vous filme pas. Tant que vous n'êtes pas filmé, le kit ne peut pas enregistrer vos empreintes. Nous acceptons le récépissé parce que celui-ci porte le numéro définitif de la carte nationale d'identité. Ça ne nous pose pas de problème. Mais il faut néanmoins ajouter que l'électeur qui va se présenter avec le récépissé devra aussi se munir de la copie de l'acte de naissance pour que nous puissions avoir sa filiation complète qui ne figure pas sur le récépissé.


Qu'est-ce qui est prévu pour les zones difficiles d'accès?

Dans notre technique d'inscription, nous avons les postes fixes qui sont constitués des antennes communales. Ceux qui le souhaitent peuvent venir s'inscrire dans ces postes fixes. Pour le reste, Elecam va déployer des équipes mobiles. A travers une campagne de sensibilisation qui sera bientôt lancée, les électeurs seront informés du passage de celles-ci. Ceci est valable en ville et dans les zones difficiles d'accès. Ce qui a été fait lors de l'élection présidentielle peut être refait dans le cadre de la présente refonte. Mais il faut le dire, l'inscription est volontaire. L'opération qui commence mercredi prochain concerne tous les Camerounais, parce que le fichier utilisé lors de l'élection présidentielle n'existe plus.

Jean Francis Belibi



02/10/2012
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