Recrutement de 25 000 jeunes : Marchandages autour des fiches de candidatures

Journal Mutations 16/03/2011

Recrutement de 25 000 jeunes : Marchandages autour des fiches de candidatures

Certains candidats l’achètent aux abords de la délégation régionale de la Fonction publique centre à 1000Fcfa.

12 h. A la délégation régionale de la Fonction publique du Centre, une marée humaine a pris d’assaut les cours centrale et arrière du bâtiment. La marée humaine déborde tellement que, les trottoirs, la rue, les couloirs et même le jardin aménagé au niveau du nouveau rond point dit de la Province, sont immergés par cette surpopulation inhabituelle au point de créer des bouchons à cet endroit. «Tu as vu cette marée humaine», s’exclame un candidat qui vient d’arriver. Un autre, dépité, lance : «Les 25 000 là vont remplir dans le bâtiment et je n’aurai toujours pas de fiche». Dans la journée de lundi, une bousculade a conduit à l’évanouissement d’une dizaine de candidats à cause de la chaleur.
Sur une fenêtre, tel un essaim d’abeilles, des centaines de candidats au recrutement à la Fonction publique sont agglutinés dans l’espoir de retirer la fiche de candidatures qui, tel que l’indique l’avis de recrutement, est téléchargeable sur le site du ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative (Minfopra). «Nous avons téléchargé la fiche mais lors du dépôt des dossiers, elle a été rejetée parce qu’elle comporte pas la mention indiquant la région qui pour ce qui est du Centre est «CE». Voilà pourquoi on est obligé de revenir ici s’aligner de 7h jusqu’à parfois 14h pour espérer l’avoir», témoigne un candidat.

Certains malins, soulignent des candidats, l’ont retirée en quantité importante. Ainsi pour gagner un peu d’argent, ils profitent de l’impatience des uns et de la foule pour monter les enchères. «La fiche est gratuite, mais moi j’ai retiré trois fiches qui portent déjà un cachet hier et je les vends à 1500Fcfa à ceux qui ne peuvent supporter le soleil», témoigne un individu qui se fait passer pour un candidat.
En dehors de la fiche de candidature, la chemise cartonnée vendue officiellement à 100Fcfa, fait aussi l’objet d’un commerce aux abords. «Les gens achètent à 100Fcfa et revendent à 500Fcfa ; imaginez le bénéfice lorsque quelqu’un prend 10 ou 20 chemises», s’indigne un candidat.
Au secrétariat technique chargé du recrutement, un responsable indique que la mention CE ne devrait conduire à ce type de malentendus. “Au niveau du ministère indique cette source, nous avons imprimé 10 mille fiches portant cette mention pour aider les candidats de la région. mais ce n’est pas une exigence que cette fiche porte cette mention qu’on doit porter à la main au sein des commissions régionales.”

Plaintes
D’après lui, cette fiche est téléchargée sur e site vierge sans cette inscription ni cachet. “Nous avons mis une machine de compostage que nous utilisons lors des recrutements au ministère à la région pour éviter ces marchandages qui sont le fait de personnes qui mettent les candidats en difficulté et dans le piège”, explique la source.
Malgré les assurances des cadres du Minfopra qui indiquent la mention précisant la région d’origine doit être apposée à la main par les membres de la commission de recrutement au dépôt des dossiers, beaucoup de candidats continuent de chercher la fiche portant la mention CE. A l’entrée du bâtiment abritant les services du gouverneur, une inscription rappelle que «désormais, les fiches de candidatures seront remises dans la salle de recrutement ; elles peuvent également être retirées sur le net.»
Mais des candidats continuent de se plaindre de l’absence sur le site de la fiche conforme qui comporte les mentions de la région d’origine, exigée lors du dépôt des dossiers. Hier, dans la journée, le stock de fiches a été épuisé à la délégation et à la région, tandis que le site n’était plus accessible.

«Quand on va à la délégation, on nous dirige vers la région. Et une fois ici, on dit qu’il faut aller sur le site du ministère où la fiche n’est pas toujours pas actualisée», se plaint une candidate.
Pour certains candidats, le marchandage des fiches et des chemises cartonnées provient du sommet. «Il y a un marché noir autour de cette opération, témoignait un postulant sur le poste national de la Crtv hier à 17h ; les fiches de candidatures sont vendues à 1500, les chemises cartonnées à 500Fcfa.»
Pour le superviseur de la commission de recrutement de la région du Centre, c’est l’oeuvre des arnaqueurs. «Il y a des arnaqueurs dehors qui font croire que les fiches et les chemises se vendent, et qu’on marchande les cachets, c’est faux. Les fiches sont gratuites, elles ne se vendent pas», a-t-elle souligné.
Ce qui amène un agent de la région à déclarer que «désormais, les cachets c’est au dépôt». Vers 15h, la tension a failli tourner à l’émeute. Les candidats, las d’attendre, ont brisé les baies vitrées qui donnent sur l’entrée principale des services de la région. Même la police appelée à la rescousse n’a pas pu discipliner les candidats.
Pierre Célestin Atangana

Attention danger
Le gouvernement est au pied du mur. Après avoir décidé de recruter 25 000 jeunes gens à la Fonction publique et dicté les conditions de recevabilité des dossiers, le voici une fois de plus pris dans le piège de la routine et de péchés mignons. Alors que le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, Emmanuel Bondé a clairement martelé que les fiches de candidatures sont gratuites et téléchargeables sur Internet, voilà que le délégué régional du Centre en a imprimé une spécialement marquée de son ressort de compétence. Au prétexte que les fiches téléchargées par les candidats sont anonymes de ce point de vue.
Ce n’est pas tout, les mêmes services ne reçoivent que les dossiers portants des timbres acquis à la délégation régionale de la Fonction publique du centre. Comme si cela ne suffisait pas, le cachet et la chemise cartonnée ont également chacun un prix. Respectivement donc de 1500, 1000 et 500Fcfa, ces prestations qu’on dit, le fait des responsables de ladite délégation sont proposées par des rabatteurs. Un marché est donc né autour d’une opération dont certains doutaient et savaient qu’elle était loin de soulager les populations en proie à la pauvreté et au chômage. Une occasion pour certains de se faire des fromages.
Et ce n’est pas tout dans la mesure où un drame semble se nouer aux abords des services du gouverneur au quartier Nlongkack à Yaoundé. Un peu comme lors du dépôt des dossiers de candidatures aux différents de police, il y a deux ans. Du fait de l’engorgement et de la grande affluence, l’on a enregistré des morts pour cause de bousculades et d’étouffement. Hier soir, des ouvertures ont cédé et des vitres ont été brisées à la délégation régionale de la Fonction publique où les postulants ne parviennent pas convenablement à se faire enregistrer. Comme le dit l’artiste, «attention danger» donc.

L N



16/03/2011
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