Protestation du code électoral: La démarche du G7 passée au scanner

DOUALA - 26 Juin 2012
© Jacques Willy NTOUAL | Le Messager

Selon le Dr Serge Paulin Akono Evang, politologue et enseignant à la Faculté des sciences juridiques et politiques de l'Université de Douala, la main tendue de ces partis politiques de l'opposition à la société civile, aux intellectuels..., relève d'une stratégie politique normale mais qui n'a pas des chances de prospérer. Décryptage.

Avec la radicalisation à propos du code électoral qu'ils trouvent inique, les partis politiques rassemblés sous la bannière du Groupe des 7, à savoir le Sdf, l'Udc, la Dynamique, le Cpp, le Pap, le Paddec (mis en quarantaine lors des assises de Douala), l'Afp, ont tendu la main à la société civile, question de ratisser large. D'avoir l'adhésion de tous devant l'enjeu de la problématique du code électoral qui, Selon Ni John Fru Ndi, «est dangereuse pour la paix au Cameroun.» Si une telle entreprise est louable, et est «une stratégie politique normale susceptible de construire un poids politique», elle suscite néanmoins quelques interrogations quant à sa fiabilité et son bien-fondé: ont-ils seulement les moyens de leur politique? Si oui, quelles sont les chances de voir cette démarche prospérer?

Pour le politologue enseignant à la Faculté des sciences juridiques et politiques de l'Université de Douala, cette approche du G7 «relève d'une stratégie politique en ceci que l'homme politique se comporte généralement comme un entrepreneur qui essaye de collecter le maximum de ressources pour agir.» La ressource politique étant définit par Robert Dale comme «le moyen par lequel toute personne peut influencer le comportement d'autrui.» Et c'est en ce sens que la société civile devient une ressource politique. Mais pourquoi la société civile? Ce choix se justifie à en croire le politologue, par le fait que la société civile représente dans le contexte mondial, un véritable acteur tant au niveau national qu'international.


«Marafa réduit en ressource politique»

Mieux, la société civile qui n'est pas neutre représente aussi un espace de prise de position politique pour atteindre la communauté internationale afin d'y trouver une tribune. Car explique le Dr Serge Paulin Akono Evang «ces partis politiques dans un contexte politique critique et où ils sont discriminés et politiquement disqualifiés, ne peuvent que s'appuyer sur un levier qui puisse crédibiliser leur démarche.» Poursuivant, «c'est dans ce sillage que s'inscrit le rapprochement du Sdf par rapport au cas Marafa réduit ici en ressource politique.» Etant entendu qu'en politique tous les moyens sont bons lorsqu'ils sont efficaces, on ne peut faire le reproche à ces partis politiques qui veulent voir les lignes bouger.

Quid des chances de réussite d'une telle entreprise? Là aussi le politologue ne fait pas dans la langue de bois. Il est sans équivoque, «les chances de voir prospérer cette approche, sont hélas maigres.» Son argumentaire, il le fonde sur cinq facteurs qui plomberaient l'initiative du G7. D'abord, Dr Akono Evang met en relief l'impact qu'il trouve mitigé parce qu'il y a au Cameroun une société civile favorable au pouvoir et l'autre qui lui est hostile. «Si d'aventure l'opposition parvient à cristalliser une frange de l'opinion, cela entrainerait inexorablement une mobilisation de celle favorable au pouvoir qui va discréditer et saper toute l'opération.» Mieux encore, «avec le contexte international actuel marqué par la Cour pénale internationale devenue sujette à caution et la défaite de Sarkozy, on observe un regain de dynamisme qui fait qu'au niveau de la communauté internationale, on n'est pas très sûr que les prises de position de cette société civile puissent influencer la communauté internationale.»


Ego démesuré

L'autre facteur est inhérent aux «technologies de l'ordre dirigeant au Cameroun.» Autrement dit, tous les mécanismes de contrôle implicite des leaders soit de l'opposition soit de la société civile par des «pratiques corruptibles» dans un contexte de «manducation (mendicité) politique», pourront court-circuiter cette dynamique. Le jeu trouble du Paddec de Jean de Dieu Momo au sein de cette coalition en est un parfait exemple. Bien plus, «l'association des intelligences contradictoires et conflictuelles est aussi un facteur non négligeant.» Dans ce sens, avec le rassemblement de ces partis politiques et des leaders de la société civile, il va se poser la question du leadership et de management. Qui acceptera avaler son chapeau pour favoriser l'autre? Qui acceptera qu'un tel parle à sa place? Qui sera le leader, celui issu de la société civile ou celui des rangs des partis politiques?

Enfin, le politologue évoque la réceptivité des populations. Des populations au sein desquelles «aucun leader de l'opposition encore moins de la société civile ne fait l'unanimité». Pis, selon cet enseignant d'Université, le peuple camerounais est à la quête d'un leader, ceux qui existent ont déjà étalé leurs limites. Mais tout n'est pas sombre. Dr Akono Aveng préconise l'unité des forces politiques de l'opposition. «Pour qu'une telle démarche puisse prospérer, il faut d'abord envisager une véritable unité de l'opposition où une seule personne pourra en être le porte-étendard, le leader comme cela s'est fait au Sénégal.» Avec l'égo démesuré et des intérêts inavoués qui sont le lot de notre classe politique, la sortie de l'auberge n'est pas pour demain.


26/06/2012
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