Projet immobilier: L’Etat veut passer en force à Warda

Yaoundé, 19 Août 2013
© YVONNE SALAMATOU | L'Oeil du Sahel

 

Les occupants du site en face du Palais des sports à Yaoundé vivent mal le silence du gouvernement qui envisage pourtant de les déloger pour y faire bâtir un complexe immobilier.

 

 

Souvent un bon projet peut partir en vrille à cause du non-respect des formes. Une grogne est en train de monter dans le quartier Briqueterie à Yaoundé. Et pour cause, les occupants du site en face du Palais des sports sont la cible d'une opération de déguerpissement pour cause d'utilité publique. Mais depuis près d'un an, ils attendent le moindre signe des pouvoirs publics pour savoir à quelle sauce ils seront mangés mais rien ne vient. Pourtant, ces populations, essentiellement installées à cet endroit pour des raisons d'activités économiques, sont informées par des sources informelles que les préparatifs sont avancés pour le démarrage de la construction sur leur site d'un complexe immobilier. 

En effet, le Ministre de l'Habitat et du développement urbain, Jean Claude Mbwentchou, a, en décembre 2012, conduit une importante délégation pour une visite de ce terrain. Parmi les membres de cette expédition bien médiatisée, outre le Ministre des Domaines, du cadastre et des affaires foncières, Mme Jacqueline Koung à Bessiké, et le Ministre des Travaux publics, Patrice Amba Salla se trouvaient les responsables de Liaison Sud Investment &Trading. C'est la société sud-africaine chargée du financement exclusif de ce pro¬jet estimé à 32,5 milliards de francs CFA. 

Ce complexe immobilier, réaliser pendant trois ans, sera composé, selon les explications fournies sur site, de 8 blocs d'immeubles offrant 136 appar¬tements incluant une résidence hôtelière de standing 5 étoiles, d'une capacité de 100 chambres (80 de grand standing, 15 suites platinum et 5 suites penthouse). Il y aura également 31 villas exclusives de grand standing, un centre commercial qualifié d' «exceptionnel» et un centre de conférence international de 1 000 places. Lors de la visite du site du futur projet, les responsables de Liaison Sud Investment &Trading étaient confiants et annonçaient le début des travaux dans les six prochains mois, le temps «de régler certains modalités techniques pour démarrer le chantier. Les études techniques et financières sont déjà faites. La zone a été déclarée d'utilité publique» avait déclaré Godfroy Mballa, responsable du futur chantier. 

En effet, ce lieu-dit Warda a été déclaré d'utilité publique par le Ministre des Domaines le 1er novembre 2012, soit un mois avant la visite de la délégation ministérielle. Cette prérogative de l'Etat induit une procédure pour l'expropriation des occu¬pants du lieu déclaré d'utilité publique. Et c'est là que le bât blesse. Essentiellement destinée à des activités économiques, cette zone a été jugée stratégique par des hommes et femmes d'affaires qui y ont installé leurs entreprises. C'est donc avec amertume qu'ils ont appris la fin prochaine de leurs importantes activités commerciales. Les indemnisations ne sont donc pas pour eux une excellente perspective. 

Leurs inquiétudes sont d'au¬tant plus grandes que même ces indemnisations ne constituent pas encore une garantie. En effet, les consultations qui doi¬vent être menées dans le cadre de la commission préfectorale chargée de «constater les droits, évaluer les biens en cause et identifier leurs propriétaires et titulaires» n'ont pas lieu. Les rencontres prévues dans le cadre de l'audit environnemental et social ne se sont jamais tenues. Pourtant, dispose le décret du Premier Ministre du 14 février 2013, «la réalisation d'un audit environnemental et social doit être faite avec la participation des popu lotions concernées à travers les consultations et les audiences publiques afin de recueillir les avis des popula¬tions sur l'activité». Une réunion a été convoquée en fin juillet par le sous-préfet de Yaoundé 1er. Alors qu'il l'avait lui-même programmée à 7 heures, le chef de terre est arrivé à 14 heures et a néanmoins tenu la rencontre alors qu'il ne restait plus grand monde. 

A la vérité, si les occupants du site souhaitent ardemment une concertation avec les pouvoirs publics, c'est parce qu'elles ont une proposition présenter. Ils ne sont pas particulièrement enchantés par les indemnisations, mais sollicitent une relocalisation sur un site équivalent compte tenu du type d'activités menées. «Nous ne sommes pas des vendeurs de terrains, nous sommes des hommes d'affaires, des commerçants. Nous voulons continuer et mener nos activités», déclare l'un d'entre eux. Ce qu'il ne dit pas, c'est que de nombreux emplois sont ici en jeu. Cela ne peut être négligeable dans un pays qui peine à en créer.



25/08/2013
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