Prise d'Otages: Il suffisait d’être vigilant

DOUALA - 25 FEV. 2013
© Jacques Doo Bell | Le Messager

Le Cameroun a été la semaine dernière le théâtre d’une prise d’otages des plus pathétiques ces derniers temps en Afrique. Il s’agit de la famille Moulin Fournier dont le père, la mère, un parent du mari et 4 petits innocents. La scène s’est passée mardi dernier à Dabanga, un village de l’Extrême-Nord à la lisière de la frontière nigériane. Ce qui a d’ailleurs facilité la traversée puis la « disparition » en territoire nigérian des ravisseurs et de leurs otages. Le père de famille, haut cadre de gaz de France en service au Cameroun, à Yaoundé, a voulu offrir à sa famille une randonnée dans l’un des plus beaux sites touristiques du Septentrion voire d’Afrique. Hélas ! La belle excursion s’est transformée en cauchemar pour nombre d’entre nous, en enfer pour les sept otages dont ces petits enfants qui, plus que les adultes ne savent pas ce qui leur arrive.

Et pourtant, on a vu venir pareille mésaventure depuis que les Américains ont signalé aux autorités camerounaises le carnage des éléphants – plus de 200 – perpétré par des braconniers venus du Soudan. Ils s’apprêtent d’ailleurs à revenir nous signale-t-on de nouveau. Il y a seulement quelques semaines, des tueurs venus du Nigeria sont arrivés à Kousseri abattre un individu tout indiqué. Après leur forfait, ces assassins ont enfourché leurs motos pour regagner leur base arrière. Sans être inquiétés, même par une mouche. C’était plus que des coups de semonce dans une région aussi névralgique. Compte tenu de tout ce qui se passe dans toute la zone sahélo-sahélienne à laquelle appartiennent notamment les régions du Nord et de l’Extrême-Nord où se trouvent des sites touristiques très prisés par ceux qui y vont malgré la faiblesse de leur promotion depuis plus de quinze ans.

On ne demande pas aux autorités camerounaises de poster des militaires tout au long de nos frontières ou même derrière chaque personne susceptible d’être la proie des preneurs d’otages. Mais la facilité avec laquelle cette famille a été enlevée laisse songeur et soulève des questions sur les mesures de sécurité prises depuis les incidents parmi d’autres que nous venons de mentionner. Des voix s’élèvent pour reprocher aux victimes de n’avoir pas signalé leur randonnée. C’est une fuite en avant qui vient s’ajouter à d’autres. Ce qui ne devrait pas étonner les habitués de certaines sorties médiatiques des autorités camerounaises. En pareille circonstances, une prudente réserve n’est pas signe de pusillanimité. Le sujet est très délicat et tout amalgame ne le compliquerait que davantage.

Que des quidans en motos arrivent à localiser et à s’emparer des touristes en territoire camerounais, le long d’une route pas très éloignée de la frontière d’un pays en ébulition pour une raison ou une autre, cela pose bien un problème de surveillance et de renseignements. Qui peut jurer la main sur le cœur que ces preneurs d’otages n’ont pas eu des informations sur la sortie de la famille Fournier de l’hôtel et sur leur destination ? Le meurtre du vendeur de carburant de Kousseri par des hommes à moto est un indice qui indique ces bandes armées sont renseignées sur leurs cibles. Leur victime était ciblée pour être abattue.

Un coup de Boko Haram ou un règlement de compte, le saura-t-on jamais ? L’enlèvement de toute une famille dont de petits innocents celle-là est française, mais elle pouvait être de n’importe quelle nationalité que l’émotion ou la douleur seraient le même. Quel émoi parmi les camarades de classe de ces petits enfants ? Enlevés au Cameroun puis transportés au Nigeria, cela nous ramène à regarder plus l’obstacle, origine de la chute que le point de cette dernière. Dans le cas d’espèce parce qu’il faut retrouver les otages dont on dit qu’ils sont séparés. Et ce n’est pas parce que le Cameroun est un pays où musulmans et chrétiens prient ensemble dans les services œcuméniques que c’est le paradis sur terre. Après la prière où vont les uns et les autres ? L’auteur de ces propos peut-il nous convaincre que la convivialité règne dans ces services œcuméniques ? Surtout dans le contexte qui est le nôtre en ce moment ?
Sans vouloir réveiller les vieux démons ou endosser une responsabilité collective à certains, je rafraichis la mémoire à l’auteur d’une telle bourde que quelques semaines avant le putsch manqué d’avril 1984, le commandant de la Garde républicaine de l’époque avait organisé un meeting à Banyo ou à Tibati sanctionné par une motion de soutien au président Paul Biya. L’heure est très grave parce que c’est une croûte noire et profonde que notre pays, cet ilôt de paix dans un océan agité, vient de prendre. Retrouver rapidement les otages sains et saufs est un devoir cardinal pour nous tous. Sans donner dans le bavardage et la gesticulation. Voilà un pan important de notre économie, le secteur touristique, qui va s’écrouler. On n’ignore pas ce qui est arrivé au circuit de la course automobile Paris-Dakar après une fusillade des terroristes sur les concurrents. N’en déplaise au ministre du tourisme et des loisirs.

Voilà bientôt une semaine que personne, en dehors de ceux qui les ont kidnappés, ne sait où sont les otages, encore moins ceux qui les ont enlevés et leurs motivations. C’est plus que stressant. Mais il faut garder la tête froide et espérer un happy end.



25/02/2013
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