Presse en danger: la santé de Flash Ndiomo se dégrade à Kondengui

YAOUNDE - 30 OCT. 2014
© Ousmane Shérif | La Météo

 

Le directeur de publication du journal Le Zénith peine à s’habituer à son nouvel environnement. Son état de santé se dégrade quotidiennement. Les autorités pénitentiaires et ses bourreaux restent impassibles. Il se présente au tribunal ce jour.

 

 

Ce n’est plus un secret pour personne. Un mauvais vent souffle depuis quelques semaines sur les professionnels des médias à capitaux privés au Cameroun. Il est caractérisé par des tracasseries en tout genre, des intimidations, des arrestations, des écoutes téléphoniques et même des emprisonnements, donnant l’impression soit d’une tentative de reprise en main, soit d’un rétrécissement des espaces de liberté, ou encore d’une incitation à l’autocensure.

Le 20 octobre 2014, le directeur de publication du journal Le Zénith, Flash Ndiomo, a été placé en détention provisoire à la prison centrale de Yaoundé, après une semaine de garde à vue à la police judiciaire. Il avait été convoqué sous le motif de «diffamation» à l’encontre du secrétaire général du ministère des Finances, Urbain Noel Ebang Mve.

Des informations relatives aux biens mal acquis d’Ebang Mve, ont été publiées récemment dans les colonnes du bimensuel Le Zénith. Cela a amplement entamé la réputation du numéro deux du ministère des Finances. Ce dernier a porté plainte pour diffamation et diffusion d’informations mensongères. L’accusation s’est ensuite muée en «chantage» et «menaces de mort». Sans même rentrer dans le cœur du problème, c’est davantage les méthodes utilisées dans la procédure qui questionnent.

En ce moment, Zacharie Ndiomo alias Flash est incarcéré à la prison centrale de Kondengui à Yaoundé. Sa famille et ses proches se sont mobilisés pour obtenir rapidement sa libération. Mais, sa situation reste très précaire, ce d’autant plus que des nouvelles sur son état de santé obtenues auprès des geôliers anonymes sont de plus en plus alarmantes. A en croire des indiscrétions, le journaliste détenu dans des conditions inhumaines aurait dans un premier temps cessé de s’alimenter. Dans un état de fatigue généralisé, il a été transporté à l’infirmerie du pénitencier où il a reçu de maigres soins.


Dénonciation
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Du côté des associations de défense des droits des journalistes, le ton monte. Face à la déferlante d’arrestations et d’interpellations, Reporters sans frontières dénonce le musèlement de la presse dans le pays et exhorte le gouvernement à dépénaliser les délits de presse. Guy Nsigué, reporter pour le site internet mboafootball.com et la Radio Sport Info (Rsi) a été interpellé, mardi 21 octobre, par les hommes du secrétariat à la Défense. Amungwa Tanyi Nicodemus, directeur de publication de l’hebdomadaire The Monitor, est lui incarcéré depuis le 29 mars dans une prison de Bamenda, dans la région du Nord-ouest.

«Ces trois affaires mettent en évidence les contradictions d’un régime qui se veut démocratique tout en ne respectant pas ses propres lois et en mettant le quatrième pouvoir derrière les barreaux. L’emprisonnement d’un journaliste pour diffamation porte non seulement atteinte à ses droits, mais également à la liberté de l’information en général, en raison de l’autocensure que de telles mesures entraînent. Nous appelons les autorités camerounaises à libérer Guy Nsigué, Zacharie Ndiomo et Amungwa Tanyi Nicodemus sans plus tarder», déclare dans un communiqué Cléa Kahn-Sriber, responsable du bureau Afrique de Reporters sans frontières.


Condamnations
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En outre, le 24 octobre 2014, le secrétaire général des rédactions de la South Media Corporation (Smc), par ailleurs président du Bureau exécutif du Syndicat national des journalistes du Cameroun (Snjc), Félix Cyriaque Ebolé Bola, Baba Wamé enseignant à l’École supérieure des Sciences de l’information et de la Communication (Esstic) de Yaoundé ainsi qu’un confrère du quotidien Le Messager Rodrigue Tongue ont, en tant qu’«inculpés», été convoqués à comparaître le 28 octobre à 9 heures au cabinet d’instruction du Tribunal militaire de Yaoundé. Il leur est reproché, «courant juillet-août 2014, en tout cas dans le temps légal des poursuites, en temps de paix, de n’avoir pas averti les autorités militaires, administratives ou judiciaires de toute activité de nature à nuire à la défense nationale, faits prévus et réprimés par les articles 74 et 107 du code pénal». Les trois journalistes sont interdits de sortie du pays, mais restent en liberté.

Ces arrestations et condamnations violent les lois nationales camerounaises. D’après l’article 305 du code pénal camerounais, la diffamation peut entraîner jusqu’à six mois de prison et une amende de deux millions de francs Cfa. De plus, selon l’article 218 du code de procédure pénale, si l’inculpé peut justifier d’un domicile connu, la détention provisoire n’est légale qu’en cas de crime. Or ces journalistes sont aujourd’hui derrière les barreaux.

Ousmane Shérif

 



01/11/2014
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